BE THERE OR BE SQUARE
Faussement misanthrope, vraiment satirique : ça fait longtemps qu’une Palme d’or ne nous avait pas fait rire.
Mais pourquoi sont-ils aussi méchants ? Chaque année, quelques crapules font le déplacement à Cannes pour distribuer les baffes et les leçons de nihilisme : Haneke (Happy End), Zvyaginstev
(Faute d’amour), pour ne citer que ceux qui squattent les salles ces jours-ci. À cette ligue de pères Fouettard, on a tôt fait d’intégrer Ruben Östlund, le réalisateur de The Square : à peine avait-il reçu sa Palme d’or que son procès était ouvert. Alors, Ruben, si méchant que ça ? Oui et non. Avec cet examen de conscience d’un papa maladroit doublé d’un tableau au vitriol du milieu de l’art contemporain, le cinéaste fait peu mystère de ses intentions : tirer sur tout ce qui bouge, faisant craqueler séquence après séquence le vernis d’hypocrisie et de vanité de nos sociétés occidentales. Or le film a le bon goût de maintenir son réquisitoire sur un registre délicieusement léger, au point d’équilibre parfait entre le sarcasme et l’empathie. Contrairement aux champions de la cruauté susnommés qui ne retournent jamais dans leurs grottes sans abandonner quelques cadavres, Östlund préfère conclure sur des hommes humiliés, mais enfin réconciliés avec eux-mêmes – sympa. L.BI. The Square de Ruben Östlund avec Claes Bang. Durée : 2 h 31.