LE TURLUTUTU DU CITRON
C’est précisément la flûte que le compositeur Daniel Sonabend a choisie pour exprimer le citron dans l’installation Scent
Constellation du Grand Musée du Parfum, à Paris, pour laquelle il a composé une interprétation sonore de deux cents ingrédients. « En intégrant à la fois des descriptions verbales, les résultats des recherches sur les associations son/ odeur et mes propres olfactions, je suis parvenu à des résultats d’une telle justesse que les parfumeurs Anne Flipo et Jeanchristophe Hérault de la société IFF ont souvent pu identifier le matériau rien qu’en l’entendant ! », s’étonne-t-il encore. Si l’installation ne permet pas de « jouer » le santal ou la rose, elle permet d’écouter, comme à l’église, cet orgue sans odeur jouer les accords de grandes familles olfactives comme l’eau de Cologne ou les orientaux. Pour Daniel Sonabend, si ces compositions odoro-soniques sont harmonieuses, c’est que « les notes olfactives forment entre elles le même type de langage que les notes musicales ». Car entre le son et l’odeur, les mêmes associations reviennent trop souvent pour qu’il s’agisse d’un flashback proustien. À quand l’invention de la playlist olfactive ? En attendant, on assortira les pistes à vue de nez. L’odeur des fruits étant plutôt aiguë, on sentirait bien les flutiaux pyjama-partysous-lsd du dernier Björk, Utopia, mettre en musique L’air du paradis, variation tropicale de Calice Becker sur L’air du temps aux accents de fruit de la passion et de combava. Music for a While de Carlos Benaïm pour Frédéric Malle tire son nom d’une chanson du compositeur Henry Purcell (1659-1695). Le grondement du patchouli assurant la partition de la basse continue, tandis que la voix du contre-ténor se traduit par l’ananas hyperréaliste qui coiffe sa touffe de lavande… Ledit jus nous semblera-t-il plus élégant en écoutant un opéra baroque, plus pimpant sur fond d’opérette de Francis Lopez ?