Le Grand Bazar
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Comme souvent, tout commence avec Kanye West qui rhabille Kim Kardashian : en début d’année, le rappeur a demandé à sa femme d’abandonner les lunettes de soleil larges pour des modèles plus petits. Comme ceux aux montures fines noires qu’on trouve dans les films et les clips de la fin des 90’s et qui squattent désormais la dernière campagne
Prada printemps-été 2018. Long manteau noir, peau blême, ruelle mal éclairée, mannequin aux cheveux bruns tirés en arrière : à y regarder de plus près, la photo ressemble plus à un screenshot de Matrix qu’à un défilé de mode. Car ici on nous vend un look bien précis : celui de Trinity, personnage féminin badass de la trilogie des Wachowski. Idem chez Alexander Wang où, pour l’automne-hiver 2018/19, les modèles ont défilé avec le même total look noir tout droit sorti d’une soirée BDSM organisée au service informatique de votre boulot. Ajoutez à ça la réédition du Banana Phone de Nokia créé pour le film en 1999 et vous aurez le combo complet pour le nouvel opus de Matrix dont le reboot vient d’être officiellement annoncé. Mais si au-delà de l’anniversaire, la matrice semble aussi pertinente, c’est qu’on vit bien dans un monde virtuel. Réfléchissez : Donald Trump et sa clique nous font passer des mensonges pour de la vérité (#alternativefacts), l’intelligence artificielle met l’humain à l’amende, Kanye (encore lui) a créé une armée de clones de Kim Kardashian et les mèmes internet où Mark Zuckerberg et des agents du FBI nous espionnent fleurissent sur la toile ; sans compter les casques de réalité virtuelle (ou virtualité réelle, on ne sait plus) qu’on veut nous mettre sur les yeux. Un constat alarmant qui en pousse déjà certains à jouer, à l’image de Neo dans le film, aux hackeurs et aux lanceurs d’alerte comme Christopher Wylie qui a récemment accusé Facebook d’avoir utilisé les données de millions d’individus pour manipuler les élections américaines et développer l’alt-right aux US. Une mouvance fasciste qui s’est construite sur le Net grâce aux forums anonymes comme 4chan et qui a pu lancer, dès 2012, le documentaire
The Red Pill. Empruntant son nom au concept de pilule bleue ou rouge du film, elle se décrit comme une « manosphère » anti-féministe qui se moque du viol et crie au complot dès qu’on évoque l’écart salarial entre les sexes. Il serait temps de tout débrancher et de se réveiller, non ?