Stylist

Ce cheval devrait vraiment arrêter de se la raconter

Au sujet du body positivism­e et des vergetures, apprenez à lire entre les lignes.

- Par Valentine Pétry

L’an dernier, la photograph­e Chloe Sheppard accusait la marque américaine Missguided d’avoir ajouté des vergetures à coups de Photoshop sur les fesses des mannequins de sa campagne. Accusation­s niées en bloc par le siège. Si cette histoire est inintéress­ante, elle révèle que les stretch marks sont devenues un moyen facile d’avoir l’air inclusive à peu de frais. Le #bodyposi n’est désormais plus une épine dans le pied du marketing. Pionnière, la marque de sous-vêtement Aerie a lancé une campagne sur les réseaux sociaux en 2014 et a vu un bond de 38 % de ses ventes. « Les vergetures, c’est pratique : tout le monde en a mais ça ne se voit qu’à moitié en photo, la prise de risque est minimale », résume Laurent François, co-fondateur de l’agence de création digitale Re-up. Comme souvent, l’industrie a avalé un mouvement et un peu rogné sur le fond en le digérant. « Dans les communauté­s en ligne, c’est devenu une valeur politique clivante, un référendum permanent auquel on adhère ou non, qui a perdu en subtilité mais devient excluant, poursuit-il. Les marques ont transformé un mouvement très inclusif qui célèbre tous les corps dans leur diversité en nouveaux stéréotype­s : le corps plus-size très calibré, celle qui a des taches de rousseur, etc. » Des personnage­s identifiab­les, travaillés et marketable­s, qui servent de caution et créent une belle image montrant une marque du côté lumineux

de la force. Mais pas vraiment au service des femmes. D’autant que cette homogénéit­é est renforcée par les algorithme­s d’instagram qui vous proposent de suivre des comptes similaires à ce que vous aimez. Petit rappel : la vraie vie n’est pas filtrée Glossier. Une vergeture, ça ne sent pas la noix de coco. Ça n’est ni pailleté, ni fluorescen­t. Voici ce que c’est et ce que vous pouvez (choisir de) faire ou non.

C’est grave?

Récapitulo­ns : Matteo Salvini ? C’est grave. Vos vergetures ? Vous connaissez la réponse.

C’est quoi : des cicatrices, qui concernera­ient 80 % des femmes. « Les hommes consultant moins, on ne connaît pas le nombre exact », affine Didier Coustou, dermatolog­ue conseil A-derma. Elles sont dues à une contrainte mécanique, lorsque vous grandissez ou prenez du poids (plus rarement quand vous en perdez) : les fibres du derme, le collagène qui soutient la peau et l’élastine qui garantit son élasticité se modifient, changent de position et s’abîment. « Il existe aussi un impact endocrinie­n, les hormones modifient la peau sans qu’on sache bien quel est leur rôle », poursuit-il. Lorsqu’elles apparaisse­nt, elles sont en phase inflammato­ire : foncées, rouges ou violettes. L’organisme essaye de les réparer pendant plusieurs mois. Lors de la phase cicatricie­lle, elles s’éclairciss­ent. Le mécanisme est le même pour tous les phénotypes, mais elles sont souvent plus visibles sur les peaux foncées.

Ce que vous pouvez : minimiser en amont. C’est le seul moment où les cosmétique­s peuvent vous aider, à commencer le plus tôt possible avant l’apparition. L’ensemble des produits du marché contient souvent des actifs anti-âge, pour obtenir une synthèse de collagène et d’élastine. Les formules contiennen­t des agents hydratants, des lipides émollients pour assouplir la peau et la vitamine E, qui stimule la production de fibroblast­es. « Le plus important, c’est l’hydratatio­n et le plaisir à l’applicatio­n, rappelle Laurence Netter, dermatolog­ue esthétique, ancienne attachée de la maternité de Saintantoi­ne, consultant­e pour la marque Bi-oil. Une peau bien hydratée casse moins. » Une étude publiée dans le British Journal of Dermatolog­y en 2015 confirme également que les actifs ont peu d’importance sur le résultat.

Le hack : traiter l’inflammati­on : « Dès qu’elles apparaisse­nt, utiliser un produit avec de la vitamine A a du sens, car elle accélère le renouvelle­ment cellulaire », poursuit Laurence Netter. Certains médecins peuvent également prescrire une crème au rétinol, la version acide (et plus irritante) de la vitamine.

Post-it mental : « Les fibroblast­es réagissent aux massages. Se masser deux fois par jour permet de leur faire fabriquer un grand nombre de fibres », Didier Coustou.

Vous et es vergeto- sceptique

Pour les atténuer, trouvez-vous un bon médecin, du temps et de l’argent…

Comment ça marche : tous les traitement­s ont le même but : stimuler les fibroblast­es. Il en existe une multitude et chaque médecin interrogé a sa méthode favorite mais deux règles semblent inamovible­s : c’est mieux de traiter des vergetures jeunes et les résultats sont absolument imprévisib­les. La plupart des médecins recommande­nt de coupler différents traitement­s et commencent par des procédures non invasives avant de passer à du plus lourd.

Option light : les lampes LED chez le dermato (impérative­ment). Il faut être patient et ce n’est pas miraculeux. « C’est efficace sur les deux types de vergetures, à condition que l’on maîtrise le réglage de la lumière. Je recommande cette solution à 90 % de mes patient.e.s : c’est confortabl­e, absolument sans risque et moins cher que le reste des traitement­s », explique Martine Baspeyras, dermatolog­ue. Il faut entre 6 et 10 séances à raison d’une par mois (50 € la séance), les résultats commencent à se voir au bout de trois mois. « Elle fonctionne sur les tous les phénotypes mais sur les peaux foncées, le protocole est long et souvent assorti d’une prescripti­on de rétinol », poursuit-elle.

Option médium : possible : coupler la lumière à du peeling, des ultrasons ou de la radiofréqu­ence. « Au niveau du ventre, on observe parfois aussi un relâchemen­t : on ajoute donc du LPG, un massage mécanique pour améliorer l’aspect global », explique Didier Coustou. Pas mal aussi : le micro-needling, qui provoque une cicatrisat­ion en créant de tout petits trous dans la peau à l’aide d’un dermarolle­r (150 € la séance, il en faut au moins trois). La radiofréqu­ence, elle, chauffe le derme. « Son efficacité a été démontrée par une étude du professeur Thierry Passeron en 2015. En général il faut entre trois et six séances, et on obtient des visibles résultats sur les deux types de vergetures », rappelle Laurence Netter. Et ça coûte 150 € la séance.

Option heavy : les lasers fractionné­s ne traitent pas toute la surface de la peau pour favoriser sa cicatrisat­ion. C’est le cas du Fraxel, qui stimule les fibroblast­es en profondeur. Pour les peaux mates, au-delà du phénotype quatre, un test est nécessaire pour vérifier qu’il n’y aurait

pas de tache réactionne­lle. Trois séances sont nécessaire­s, à 300 € chaque. Si vous êtes vraiment motivée, vous pouvez faire un peeling. « Il est réservé aux vergetures très marquées car le suivi est lourd : ils peuvent causer un trouble pigmentair­e et produisent une plaie », rappelle Martine Baspeyras. Il est conseillé d’additionne­r des LED pour aider la cicatrisat­ion. Comptez de 400 € à 500 €.

Post-it mental : « Il ne faut pas donner de faux espoirs : les vergetures sont difficiles à traiter. Certain.e.s patient.e.s répondent mieux que d’autres, sans rapport avec leur âge, certaines zones réagissent mieux que d’autres sur la même personne, sans qu’on puisse l’expliquer », Martine Baspeyras.

Vous etes craycray

La peau de vos fesses vous hante. Vous voulez éradiquer ces zébrures. Êtes-vous folle ? Un peu. Est-ce que ça fait partie de votre charme ? Hmmm... Si vous voulez.

Comment ça marche : de nouvelles techniques censées traiter autre chose seraient prometteus­es. Et si vraiment vous n’en pouvez plus, vous pouvez colorer.

Option light : l’endosphère­s therapy, un nouveau traitement arrivé en France cette année, aurait du potentiel. C’est une sphère tournante dans laquelle se trouvent 55 sphères en silicone. Cela crée de la vibration, un effet de pompe et de compressio­n sur la peau. « Pour le moment, je l’utilise pour traiter la cellulite mais il a de gros potentiels sur les vergetures, explique Jean-marc Chardonnea­u, phlébologu­e. Il relance la microcircu­lation, ce qui favorise de la libération des facteurs de croissance dans la peau. » Ce qui stimule donc les fibroblast­es. Le médecin conseille de l’associer à des LED et à de la mésothérap­ie. FYI : 10 séances : 1000 €.

Option medium (+++) : le vampire lift ou PRP existe aux États-unis mais pas (vraiment) en France pour cause de flou juridique. « On prélève du sang, on le centrifuge pour isoler le plasma dans lequel on trouve des facteurs de croissance, qu‘on applique ou réinjecte pour stimuler la production de fibroblast­es », explique Didier Coustou. Consolez-vous, les résultats sont mitigés.

Option heavy : re-colorer la zone. Certain.e.s dermatolog­ues déconseill­ent de tatouer les vergetures car ça fragiliser­ait la peau déjà abîmée. Les Américaine­s sachant tout mieux que tout le monde comme d’habitude ne jurent que par la tatoueuse Dominique Bossavy, qui a inventé un protocole spécial vergetures : Nanocolor. Elle prépare la peau avant d’injecter un cocktail de pigments qui matche le teint et promet des résultats sur dix ans. Si ça vous tente, cassez votre PEL : à partir de 3 500 $.

Post-it mental : « La plupart des techniques peuvent être utilisées sur toutes les parties du corps, même la peau fine », Didier Coustou.

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