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Depuis le temps qu’on se demandait quelle série on emporterait dans son bunker.

On avait prévu d’aller prendre l’air au festival Séries Mania de Lille pour se rouler avec joie dans les séries du monde entier, bien chauffé.e.s notamment par Run (la nouvelle série de la créatrice de Fleabag – on attendra le 13 avril sur OCS) ou encore The Cursed (horreur et corruption d’entreprise à la coréenne, par l’auteur de Dernier train pour Busan)… mais face aux contraintes liées au coronavirus, le festival a malheureusement dû, à neuf jours de son ouverture, tout annuler. Pour bien profiter des provisions engrangées façon film catastrophe en vue d’une hypothétique quarantaine générale, on envisage de se réfugier dans Dispatches from Elsewhere, la série qui déborde de tout. Ovni adapté d’un documentaire sur l’étrange Jejune Institute (un jeu fictionnalisé IRL à mi-chemin entre la réalité alternative et la secte), ce récit allumé et illuminé ne ressemble à rien, saute par-dessus les genres, les formats, les conventions et s’offre comme une fiction pure et totale à la fois ironique, chamanique et pop. La série conçue et jouée par le trop rare Jason Segel (How I Met Your Mother, Sans Sarah rien ne va) nous entraîne dans les méandres d’un jeu de piste géant à travers Philadelphie, orchestré par une mystérieuse organisation secrète. Dans les pas chaotiques d’une bande de citadin.e.s égaré.e.s (un mec triste, une femme trans, une veuve naïve et un adepte de la théorie du complot), réuni.e.s et attiré.e.s malgré eux.elles dans ce jeu qui n’en est peut-être pas un, on plonge dans cette histoire folle et nébuleuse en perdant tous nos repères. Conte philosophique, thriller à la Lynch, odyssée poétique et drame brutal, chaque épisode étonne et donne l’impression de vouloir contenir à lui seul toutes les séries du monde. Une oeuvre dense et iconoclaste dont l’audace et la beauté collent aux corps et rassérènent. Parfait en cas de crise de la quarantaine. R.C. Dispatches from Elsewhere de Jason Segel avec lui-même, Sally Field, Andre Benjamin, Eve Lindley, saison 1 : 10 x 60 min., diffusée aux USA sur AMC.