GORGE PROFONDE

La vie dans les pôles, c’est mieux quand c’est les autres qui la racontent.

Tanya Tagaq n’a pas volé son surnom de « punk polaire ». Clashée pendant des mois pour avoir mangé du phoque « par ces connard.asse.s de Californien.ne.s qui font cueillir leurs avocats par des Hispaniques », elle n’a cessé de rappeler la réalité de la société inuit à ceux.celles qui ne voudraient y voir qu’une version pacifique et gentiment chamanique de la vie en plein air. D’abord en devenant l’une des figures mondiales du chant de gorge – une technique vocale ancestrale qui donne l’impression que le.la chanteur.euse est habité.e par deux êtres différents et qui lui a valu les faveurs de Björk, et de la mémoire des femmes enlevées et assassinées au Nunavut. C’est à ces mêmes femmes qu’elle dédie son premier roman, tout aussi brut et polyphonique. Un récit sur la jeunesse inuit pleine de beauté de la toundra mais aussi d’heures d’ennui à sniffer du butane, scandé par des poèmes et l'alphabet inuktitut. Serrez les mâchoires, Croc fendu est là pour vous en mettre plein les dents. M.K. Croc fendu de Tanya Tagaq, Christian Bourgois, 224 p., 21 €.