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Cannal historique

Et vous pensiez tout savoir sur le festival ?

- JONATHAN BRODA

DU MARCHÉ FAISONS TABLE RASE

Pendant que le Festival fêtes les auteurs pointus des centaines de films plus ou moins commerciau­x sont présentés au Marché du film. L’art contre les affaire ? C’est un peu plus compliqué que cela. Explicatio­ns. Quelle est cette terrible logique ? Qui supporte qui dans cette affaire ?

Il est bon de présenter des films dans les différente­s sélections, de faire venir les artistes, d’attirer les médias du monde entier… Mais pourquoi ne pas en profiter pour acheter ou vendre des films, sélectionn­és ou non. Ce n’est pourtant qu’en 1959 qu’est apparu officielle­ment, le « Salon profession­nel » en parallèle du Festival artistique. C’est le producteur Emile Natan qui le crée. Mais il n’en profite pas vraimement et meure en 1962… La famille Natan est d’ailleurs plus associée au cinéma français des années 20-30. Époque ou les premières « majors » du cinéma français vont prendre des distances avec la production. Pourquoi risquer de produire Vigo, quand on peut distribuer Chaplin … Du coup les maisons Gaumont et Pathé vont se fracasser sur la crise de 29. Et Bernard Natan (son frère) empoche Pathé en février 29 avant d’être déporté pendant la guerre… Emile, lui, échappe aux Nazis, se relança après guerre et crée le Marché du film. Michel Bonnet prend le relais, patron de Pathé Marconi EMI en Italie, il redynamise le Festival (dont il deviendra le Secrétaire général) jusqu’à sa mort en 95. Avec lui, et les années 80, le Marché va vivre son heure de gloire. Apporter quelque chose de nouveau à Cannes. La sélection officielle a pris un tournant hyper auteuriste dès les années 70 et les Palmes vont à Kurosawa (Kagemusha), Wajda (L’homme de fer), Imamura (La ballade de Narayama) ou Pialat (Sous le soleil de Satan)... Au Marché on peut découvrir des films de genres réalisés par les auteurs de demain

Dans ce non-choix que représenta­it le marché, dans cette liasse de films au statuts, intentions et réussites variables, on découvre Ferrara avant King of New York, Kitano avant Sonatine ou Cronenberg avant Videodrome…

Le Festival en tirera des leçons, faisant ensuite la part belle aux néo-auteurs américains : Soderbergh en 89, Lynch en 90, les Coen en 91 et bouquet final de cette série sous influence du film de genre : Tarantino en 94… Pour en revenir à Cronenberg, il finira par être accepté par le Festival, d’abord avec un prix très spécial du Jury pour « Crash » en 1996, puis en président le jury en 1999. Surprise, le canadien étrange révélé par ses films d’horreurs récompense Rosetta des frères Dardenne et La vie de Jésus de Bruno Dumont. Retour à l’hyper-auteurisme de la sélection pendant qu’au Marché on fait des affaires tranquille­ment. Chacun à sa place ?

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