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CANNAL HISTORIQUE
Et vous pensiez tout savoir sur le festival ?
FRÈRES 200
Des Lumières au Coen, le cinéma est souvent une affaire de frateries. Retour sur plus d’un siècle de liens du sang alors que les frères Safdie présentent Good Time aujourd’hui. Le cinématographe aurait été inventé par deux frères au nom hautement symbolique : les frères Lumière. A Cannes, la plus belle salle de projection s’appelle l’Auditorium Louis Lumière, pourquoi pas Auguste ? Ou Louis et Auguste Lumière ? La fratrie et sa collaboration artistique est donc une question ontologique inhérente au cinéma et au festival de Cannes.
D’autres frères ont d’ailleurs marqué l’histoire du Cinéma, des frères entrepreneurs : les frères Pathé en France, ou les frères Warner aux Etats-Unis, pour ne prendre que deux cas exemplaires.
En 2015, Thierry Frémaux et son « frère de cinéma » Bertrand Tavernier ont présenté une belle compilation de films des frères Lumière qui a ravie les 3000 personnes de l’Auditorium Louis Lumière. Cette année là, le(s) président(s) du Jury étaient les frères Coen (Lauréats de la Palme 1991 pour Barton Fink). Thierry Frémaux (et/ou Gilles Jacob, Le grand frère) avait jugé bon d’inviter à cette projection d’autres frères célèbres du cinéma et du Festival. Les frères Taviani (Palme 1977 avec Padre Padrone) mais aussi les frères Dardenne (double Palmes avec Rosetta, 1999, et L’enfant, 2005). Aujourd’hui, deux frères américains perpétuent cette tradition de fratries cannoises : les frères Safdie (Good Time, aujourd’hui). Une histoire de frères braqueurs avec Robert Pattinson et Ben Safdie lui-même, doublement frère donc. Souhaitons leur la même carrière que leurs aînés, que ce soit les résistants Taviani (toujours intègres), les résidents Dardenne (toujours à Cannes) et les
résilients Coen (toujours en forme).
Cependant deux questions restent en suspens…
Mais ou sont les soeurs ? Elle existent aussi au cinéma, même si elles n’ont pas eu de palmes. Les soeurs de cinéma sont souvent actrices : Olivia de Havilland (première femme Présidente du Jury à Cannes en 1965) et Joan Fontaine qui se détestaient et ne travaillaient jamais ensemble. Les demoiselles de Rochefort ont immortalisé Françoise Dorléac et Catherine Deneuve, quant aux soeurs Arquette, elles ont chacune eu leurs up and down, et continuent à travailler ensemble ou pas. Mais pas des Réalistarices… Pourtant si. Au Canada, les jumelles Soska (Jen et Sylvia) font des films d’horreur. Comme American Mary (2012) dont le succès d’estime démontre que la sororité fonctionne tout autant que la fraternité ! Nous laisserons volontairement de côté le cas des frères Wackowski (Matrix) devenu soeur Wackowski. Trop hors norme pour en tirer des conclusions.
Et, seconde question, un auteur peut-il être dual ?
Le fait que deux personnes, frères ou soeurs ou juste complice de travail, cosignent un film prouve que la notion d’auteur individualisée est parfois réductrice et peut être dépassée. La complicité artistique est plus importante qu’une vision du monde égoïste. A Cannes en 1951, deux hommes s’étaient partagés le « Prix spécial pour la transposition d’une oeuvre musicale au cinéma » pour leur film : Les contes d’Hoffmann. Ils cosignaient leurs films du nom de The Archers, se partageant le scénario, la réalisation et la production… Il n’y avait aucun lien de sang mais des liens du cinéma, des affinités électives... Vive Michael Powell et Emeric Pressburger, vive le Cinéma.