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AMINE BOUHAFA
Avant tout : que fait Amine Bouhafa à Cannes ? Amine donne une Master Class de musique de film à la Fabrique du cinéma du monde et pour le film «Amin» de Philippe Faucon sélectionné à la Quinzaine.
Quelles est votre playlist idéale pour le Festival ?
Je dirais la musique de Miles Davis pour “L’ascenseur pour l’échafaud”,
“Ms. Celies Blues” chanson de “La couleur pourpre”, et Buena vista social club, “Chanchan”.
Pouvez-vous nous parler de la place de la composition musicale dans le monde du cinéma ?
Les usages et les préférences diffèrent selon le réalisateur et les films. Mais, généralement la musique a une place très importante dans le cinéma, car ils sont historiquement, extrêmement liés, et ce depuis le cinéma muet.
Dans le cinéma d’auteur, la musique a une place forte, à la fois délicate et fragile, parce que c’est un cinéma lui-même très fragile. L’auteur se confie au spectateur. C’est un cinéma intime. Et on ne peut pas se permettre en tant que compositeur de rompre cet équilibre et cette intimité. Il faut savoir s’effacer, renier son ego de musicien, et ne pas chercher à imposer sa musique, ou essayer de dominer l’image. Il faut rester discret.
De plus, la musique ne doit pas faire doublon, c’est-à-dire qu’avec ce qui est dit à l’image, si toute l’émotion est là, on n’a pas besoin de musique. Elle est la pour apporter une deuxième ligne au discours, lui donner une autre dimension et une profondeur de champ supplémentaire.
La musique accompagne donc une histoire, joue la voix dun personnage, crée une émotion, son rôle et de sublimer l’image et de la faire vibrer.
D’après vous, quelle est la place de la musique Électronique DANS LA COMPOSITION DE MUSIQUE DE FILM ?
Aujourd’hui, la musique électronique est un outil extrêmement important. Personnellement, je pars d’une culture musicale classique, mais quand le film le permet, j’essaye de mélanger les couleurs acoustiques avec des instruments venant de la musique électronique, que ce soient des synthétiseurs, des guitares électriques préparées, et aller même à remoduler des sons d’instruments classiques (piano, trompette ou autre) en les processant dans des outils électroniques. Cela permet de créer des timbres uniques, des ambiances et des textures subtiles qui se marient bien avec les images.
De plus, aujourd’hui, avant de passer à des enregistrements avec des vrais musiciens, le compositeur de musique de film produit des maquettes à l’aide de libraires de sons via les outils de musique assistés par ordinateur. Le but étant que le réalisateur puisse valider les musiques et les écouter avec son film. Cette étape est importante dans le processus de création et de collaboration avec le réalisateur, car ça permet d’essayer ce que le compositeur écrit directement sur les images du film, de changer et de modifier l’écriture en fonction des retours et exigences du réalisateur avant de passer aux enregistrement.
Préférez-vous travailler à partir d’images ou de scénarios ?
Ça dépend vraiment des projets. Partir du scénario permet d’avoir plus de temps de réflexion, d’essai et de travail avec le réalisateur.
Personnellement, ce qui m’inspire le plus c’est vraiment les images, les couleurs, les lumières. Je me base sur ces éléments dans mon orchestration, car la musique aussi a sa propre balance de couleurs et de timbres.
Je pense que l’idéal serait de commencer à composer dès le début du montage. La musique serait donc établie, petit à petit, avec la construction du film, avec les images. En général, le compositeur arrive à la fin, quand le film est presque achevé, mais l’avantage de pouvoir travailler en parallèle avec le montage c’est le fait que le film commence à s’identifier dès le départ à la musique. Ça donne plus de temps pour réfléchir et trouver la couleur et l’identité sonore du film. Souvent, les réalisateurs livrent au compositeur le film avec des échantillons de musiques déjà existantes dans le montage. Ça les aide à monter le film, d’une part, mais ça permet aussi de véhiculer un message sur la musique au compositeur. En revanche c’est aussi une contrainte majeur voir un frein pour la créativité du compositeur. C’est pour ça que construire la musique en parallèle avec la construction du film lui même présente un grand avantage.
Néanmoins, sur certains projets, ma collaboration peut commencer à partir du scénario. Par exemple sur le film “Amin” de Philippe Faucon (quinzaine des réalisateurs), je suis intervenu à partir du scénario car il fallait composer des musiques joués par un personnage du film.
Quelle est votre histoire avec la COMPOSITION DE MUSIQUE DE FILM ?
Ma passion pour le cinéma est née très tôt. Je pense qu’elle est venue à travers ma passion pour la musique de film. En effet, j’admirais la musique des grands compositeurs de films, John Williams, Jerry Goldsmith, Bernard Herman, Maurice Jarre, Delerue etc. Et donc, dès qu’un film sortait avec la B.O. d’un des mes compositeurs préférés je courrais le voir. Petit à petit, mon intérêt pour le cinéma a grandi et a dépassé le simple désir d’écouter une musique avec un film à une passion pour le film lui même, pour sa musicalité propre. Cet intérêt est devenu une grande passion pour le 7ème art. Aujourd’hui, je peux dire que c’est cet amour pour le cinéma qui me motive et qui m’a poussé à avoir une carrière de compositeur de musique de film. C’est une vocation qui a commencé très tôt, car j’ai eu la grande chance de composer ma première musique de film à 15 ans (pour un court métrage).