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# LindonRéMi­FaSol

Engagé, enragé, CGT, Vincent Lindon incarne dans En guerre, un syndicalis­te jusqu’au bout des ongles et de ses forces qui vampirise peu à peu la lutte, comme l’acteur vampirise le film.

- LÉONARD HADDAD

Un quasi gag se niche dans les cinq premières minutes d’En guerre. En guise d’exposition, des news BFM nous expliquent la délocalisa­tion, les ouvriers qui bloquent l’usine, les piquets, la foule en colère, les visages sur lesquels se lisent l’angoisse et la déterminat­ion. Au détour d’un plan, on aperçoit Vincent Lindon, l’air de rien, presque modeste, presque spectateur, volontaire­ment bord cadre, là sans être là (on ne voit que lui). S’ensuit une AG et le revoilà, le grand acteur, toujours en mode discret, prenant la parole pour donner un p’tit avis de rien du tout, un avis parmi d’autres, un avis fondu dans le col

lectif. Tout l’inverse de la Loi du marché, en somme, ce film qui commençait et finissait par sa moustache. Sauf que bien évidemment, ce début d’En guerre est un leurre. Le programme du film (et de sa mise en scène) sera la cannibalis­ation progressiv­e du cadre, de l’histoire, de l’émotion, par Saint Vincent Lindon (dans le rôle de Jeanne d’Arc), un peu, beaucoup, passionném­ent, jusqu’à la folie d’un dernier plan en majesté, au ralenti, pour l’éternité.

En nous, un certain mauvais esprit journalist­e ricane, ramène En guerre à la sale propension de l’acteur à tout tirer à lui, le film, l’affiche, la couverture, pour bien s’emmitoufle­r dedans, en laissant le reste du monde à poil, grelottant dans un lit tout froid. On ricane, oui, mais il y a là, tout de même, une idée de mise en scène, le grignotage progressif d’un dispositif de docu-reconstitu­tion par la fiction, à travers un personnage et l’acteur qui lui prête sa gueule. De Zelig à Jeanne d’Arc en 1h53 minutes, c’était osé, ils l’ont fait.

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