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Fratelli d’Italia
Pour son deuxième film comme réalisatrice (après Miele, déjà présenté à Un Certain Regard), l’Italienne Valeria Golino compose Euforia, un mélo pop, élégant et émouvant, sur l’amour fraternel.
« Et si tu n’existais pas/Dis-moi pourquoi j’existerais ?/ Pour traîner dans un monde
sans toi/Sans espoir et sans regret. » La chanson de Jo Dassin qui enveloppe la scène d’ouverture d’Euforia fait aussi figure de programme au second film de Valeria Golino. Il sera question d’amour et de perte, de ce que l’on veut retenir et ce qu’il faut laisser glisser, des mensonges qu’on prononce pour rassurer les autres et de ceux qu’on se fait parce qu’on les préfère à la vérité. Cet amour est celui de frangins que tout semble opposer : quand Matteo (Riccardo Scarmacio), homo flamboyant, fait fortune dans le business de l’art et mène une vie d’excès, son aîné Ettore (Valerio Mastandrea), resté professeur, se débat entre un mariage à l’agonie et ses obligations de père. C’est lui qui va bientôt mourir d’un cancer, mais c’est son petit frère qui connaît le diagnostic et décide de le garder pour lui. Dès qu’Ettore s’installe dans l’appartement de Matteo, leurs modes de vie se mélangent et le reste du monde s’écarte. Seule compte désormais cette intimité dont ils retrouvent le goût unique, faite d’affections puissantes et de dominations subtiles, et qui n’existe que dans la fraternité. Golino tire le meilleur de ses acteurs et trouve un équilibre séduisant entre lisibilité et inventivité formelle – l’ombre de Sorrentino ne plane jamais trop loin. On rit (le séjour à Lourdes), on pleure (le vol final des étourneaux), on s’enivre (l’agitation toute italienne des scènes collectives), mais toujours en-dedans, pudiquement. Jusqu’à l’ultime embrassade et le lancement d’une autre merveilleuse pop song, signée Tuxedomoon, qui prend acte du chemin parcouru jusqu’à l’acceptation. « In a Manner of speaking/I just want to say/That I could never forget the way/You told me everything. »