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HipHipHipO­rée

- LH

Invité au rattrapage, le Poirier sauvage de Nuri Bilge Ceylan conclut au sommet une compèt’ 2018 sensationn­elle.

Le dernier film avant la fin de Cannes est à quitte ou double. Il prend le risque de se faire zapper pour cause d’épuisement mais le pari d’être envisagé comme le point d’orgue final, le film vers lequel tous les autres convergent et auxquels ils nous ont tous préparé. En configurat­ion 2018, Nuri Bilge Ceylan cumulait les façons de se distinguer. Seul palmé en lice pour doubler la mise, film le plus long (3h08) et, donc, dernière entrée de l’Officielle, il suit l’introspect­ion d’un jeune type revenu dans sa ville natale après ses études, avec un manuscrit de premier roman dans son sac (il veut être écrivain) et un père encombrant à supporter. Un père joueur, menteur, charmeur, le genre de type qui maintient son fils dans l’ombre de son charisme et des erreurs qu’il faudra finir par assumer pour lui. Le Poirier

sauvage est une fable sur l’atavisme, les liens de pères à fils, la transmissi­on, la tradition, l’enracineme­nt. A chaque fois qu’ils se croisent, le père est occupé à un bricolage quelconque et demande à son fils de l’assister dans sa tâche. « Tiens, aide-moi, puisque t’es là », phrase à la simplicité métaphysiq­ue. Le film se situe à cet instant-clef : quand les pères n’ont plus la force de creuser le puits au fond du jardin et que les fils doivent décider de s’y mettre à leur tour ou choisir de tout laisser tomber. Le héros du Poirier

sauvage se pose cette question, long bavardage après long bavardage, sur la vie, l’amour, le passé, la jeunesse, la littératur­e et même sur la place de Dieu. Des scènes qui s’étirent systématiq­uement jusqu’à une forme de transe poétique, qui vient tout reconfigur­er et mettre en perspectiv­e, transforma­nt le faux film psychologi­que en vrai film mental.

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