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LA PEAU DU SP RITZ ?

LE SOLEIL EST LÀ, LA TERRASSE EST BONDÉE ET VOS COMPAGNONS DE TABLÉE RÉCLAMENT TOUS LEUR SPRITZ ? POURTANT, D’AUTRES MARQUES MANOEUVREN­T POUR DÉTRÔNER LE COCKTAIL NUMERO UNO. ENQUÊTE BIEN AU FRAIS.

- ARIANE QUIGNON

C’est le tube de la saison. Aussi difficile à éviter, à l’heure de l’apéro dès les premiers jours du mois de juin, que la chanson « Merci patron » à une manif anti-réformes. Nous parlons bien sûr de l’Aperol Spritz, ce cocktail orange réalisable par tous. Vous prenez votre Spritz (mix d’un vin blanc pétillant et d’une eau de Seltz créé à Venise au XIXème siècle par un startender avant l’heure), vous y ajoutez votre Aperol (cet apéritif faiblement alcoolisé à base d’oranges amères) bien frais et… salute ! « Si l’Aperol est devenu aussi “in”, c’est grâce à une campagne de pub colossale, globale et transversa­le qui a permis d’ins-

crire et d’ancrer ce mode de consommati­on dans la tête de millions de consommate­urs, rappelle Éric Fossard, gérant du salon Cocktails Spirits. Il y a cinq ans, vous auriez demandé à quelqu’un ce qu’était le prosecco (vin blanc effervesce­nt utilisé dans l’Aperol Spritz, ndlr), personne ne vous aurait répondu. Jamais nous n’aurions fait rentrer du prosecco dans nos caves et établissem­ents. Et pourtant, maintenant, il existe dans les supermarch­és… Quand tout est mis en place pour faire la promotion d’une certaine consommati­on, ça aide à la rendre globale et tendance. » « Il n’y a pas que la com’ pour expliquer le succès du Spritz en France, nuance Nicolas Specht, le graphiste bon vivant derrière Quaff-Magazine.com, le blog dédié à la culture cocktail. Au-delà de son côté très rafraîchis­sant, l’utilisatio­n de l’Aperol (plus doux que la plupart des autres amers italiens) a certaineme­nt joué un rôle important dans cette réussite. Son amertume reste assez légère, et a rapidement su se faire apprécier du grand public. Mais réussira-t-il à garder son sta-

tut de cocktail préféré des Français – et surtout des Françaises – longtemps ? » La question est posée. En début d’été, le Concierge Masqué, le plus facétieux des chroniqueu­rs du magazine Vanity Fair, y déclarait : « Caspritz, c’est fini. Le fameux cocktail apéritif vénitien est cuit, K-O, kaputt. Après trois étés d’intoxicati­on chimique sous le signe de la kryptonite orange, l’heure d’été a changé de cap. » Le coupable selon lui ? Le lancement d’un Spritz au Cynar (un bitter italien à base de feuilles d’artichaut) l’an dernier, et la qualité du prosecco, qui serait devenu mauvais à force de surproduct­ion... L’hégémonie de l’Aperol Spritz toucherait-elle à sa fin ? Et si c’est le cas, quel cocktail pour lui ravir sa place ?

UN GIN-TO POUR 2018 ?

« C’est la question à un milliard d’euros, avoue Éric Fossard du Cocktails Spirits. Quelle sera la prochaine marque à s’imposer comme l’incontourn­able de l’été ? Il faut savoir qu’ici en France, nous sommes un pays “suiveur” dès qu’il s’agit de cocktails. On est encore à un stade où l’on copie ce qu’ils font en Angleterre, aux États-Unis ou en Espagne… En étudiant les tendances de consommati­on là-bas, je dirais que la France est prête à faire un “succès” dans les gin-tonics. Reste à voir quelle marque s’imposera. Mais sachant que la consommati­on de gin-tonic est importante aussi bien pour les producteur­s de gin que ceux de tonic, ils n’ont tous qu’une envie, que le secteur se développe

dans un maximum de pays. Donc voilà, je parie que d’ici un an ou deux, vous aurez terribleme­nt envie de siroter un gin-to au mois de juillet. Reste à voir lequel… » Si vous ne croyez pas aux chances de ce cocktail très british ici en France, allez voir votre barman préféré : gageons qu’il ne vous servira pas votre gin comme il le faisait il y a peu de temps, dans un petit tube en verre accompagné d’une bouteille taille mini-bar de Schweppes, mais plutôt dans un verre ballon avec un max de glaçons et un apport aromatique supplément­aire (zeste, romarin, anis étoilé)... Ça vous rappelle quelque chose ? « Pour ma part, je mise aussi sur le gin, et plus précisémen­t sur le Negroni, ajoute Nicolas Specht du blog Quaff. Né au début du XXème siècle, il se compose de gin donc, de vermouth et d’un amer italien (souvent du Campari). Il est à la fois extrêmemen­t parfumé et rafraîchis­sant, et permet de nombreuses variantes… Tout comme le Spritz ! » Laissons le mot de la fin à nos bartenders préférés de l’été 2016, Antonin et Olivier du Pavillon Puebla : « Le Moscow Mule a toutes ses chances pour devenir le prochain it-cocktail : il est classique et facilement réalisable, à base de vodka, citron vert, gingembre et eau gazeuse. Mais bon, soyons réalistes : le Spritz n’a pas encore dit son dernier mot ! » On sait ce qu’il nous reste à faire : retrouvons-nous en terrasse en un début de soirée de l’été 2018. Pour y commander un Negroni ? Un Suze Tonic ? Un gin-to ? Ou tout simplement un Spritz ? Rendez-vous dans un an… Pavillon Puebla, parc des Buttes-Chaumont, avenue Darcel, Paris 19ème

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PAR ARIANE QUIGNON PHOTOS SKISS REMERCIEME­NTS PAVILLON PUEBLA — ROYAL AU BAR Antonin prépare un Aperol Spritz avec sa diligence légendaire.
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