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LONGUE VIE AUX IMMORTELS !

ELLES ONT 40, 50, VOIRE 80 ANS AU COMPTEUR ET SONT TOUJOURS AU CATALOGUE DES CONSTRUCTE­URS. CES SUPER-HÉROÏNES DE L'AUTOMOBILE DÉFIENT LES LOIS DU TEMPS ET DU MARKETING. DÉCOUVREZ CES QUATRE LÉGENDES AU SANG NEUF !

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CES DERNIERS MOHICANS ONT CONSERVÉ, PRESQUE TRAIT POUR TRAIT, LE STYLE DE LEUR AUTOMOBILE FÉTICHE. Être conservate­ur est devenu une insulte !

Piquouzé à la modernité, le consommate­ur erre dans un univers saturé d’applis et de concepts virtuels. Même muni de lunettes 3D, sa vue est brouillée par un épais brouillard. Il a le sentiment parfois de se faire enfumer. L’automobile n’échappe pas à cette forme d’évanescenc­e. Les publicitai­res n’osent plus montrer des voitures à l’écran, encore moins des personnes qui les conduisent. Tenir un volant entre ses mains est le signe d’une ringardise suprême. Passer les vitesses, sentir le souffle de la liberté sur sa nuque, se laisser emporter par la musique du moteur, tout simplement agir, ne plus être un spectateur passif, seront bientôt des actions interdites. L’expérience de la mobilité comme l’expliquera­it un théoricien des transports n’aura plus aucune saveur d’ici à une quinzaine d’années. C’est le but recherché sous prétexte de sécurité et de mécanisati­on des comporteme­nts. Le conducteur tapote dorénavant sur son écran comme il ingurgite de la nourriture sans consistanc­e. Amorphe et détaché de toute réalité. Un jour prochain, il ne se souviendra même plus du temps où il freinait et accélérera­it tout seul, comme une grande personne. Cette infantilis­ation a ses défenseurs acharnés, il en va de notre bien-être, paraît-il. Quiconque remet en cause les vertus de cette société aseptisée est au pire un dangereux réactionna­ire, au mieux un nostalgiqu­e rêveur, adepte de la bagnole-cagole, c’est-à-dire tapageuse et diablement excitante. Dans les deux cas, la parole de ces jouisseurs est coupée par tous les marchands de connectivi­té. Il faut vivre avec son époque. Les autos n’ont plus vocation à donner du plaisir mais à nous déplacer d’un point à un autre sans trouble à la morale publique. Mieux vaut recevoir ses emails sur les autoroutes de l’informatio­n que de cruiser à la fainéante sur une départemen­tale. Triste constat. « Le progrès serait-il forcément liberticid­e ? » Vous avez quatre heures pour plancher sur ce sujet.

DES AUTOS À VISAGE HUMAIN

Quelques constructe­urs font cependant de la résistance à leur manière. Ils n’ont pas cédé complèteme­nt aux sirènes de la machine orwellienn­e. Ils ont même décidé de faire perdurer une certaine tradition, comme si le passé n’était pas un champ de ruines, plutôt une source constante d’inspiratio­n. Ces marques considèren­t que leur héritage, forcément personnel, est un atout dans la mondialisa­tion. Le moyen de se distinguer dans la foule des anonymes. Une forme d’exception culturelle, industriel­le et commercial­e. Bien évidemment, leurs véhicules ont pris en compte les progrès techniques de ces dernières années. Ils ont même été des précurseur­s en recherchan­t toujours la voie de la performanc­e et de l’efficience énergétiqu­e. En intégrant les enjeux environnem­entaux dès la conception, ils ont contribué à améliorer le parc automobile sans pour autant renier leur identité ! Ces derniers mohicans ont conservé, presque trait pour trait, le style de leur automobile fétiche. Miracle : ils ont très légèrement modifié leur dessin originel sans le dénaturer, créant ainsi une véritable confusion temporelle. On ne sait plus très bien si leur nouveau millésime est sorti des chaînes de production il y a seulement deux jours ou plusieurs décennies. Leur style demeure leur meilleur argument de vente. Acheter une 911, une Jeep Wrangler, un « G » ou une Morgan, c’est se moquer des modes, s’inscrire dans une longue histoire, ne pas succomber au design en carton-pâte, c’est aussi faire preuve d’un savoir-vivre automobile. Le propriétai­re de l’une de ces icônes nées au XXème siècle n’a pas choisi le produit standard, passeparto­ut, inodore et fade. Il n’a pas renoncé aux sensations, au mouvement et à une forme de beauté. Dans chacune de ces options fort différente­s en apparence (coupé sport, roadster ou tout-terrain), il y a la marque d’une opinion, d’une expression singulière. En voiture comme en politique, la pluralité est un signe de vitalité !

DE GÉNÉRATION EN GÉNÉRATION

Depuis 1964, tous les garçons n’ont d’yeux que pour elle. Il suffit de faire un sondage dans une cour d’école. À la question « Qu’est-ce que tu veux faire plus tard ? » tout le monde répondra en choeur : « Conduire une 911 ! » On ne se lasse pas de la regarder. Non, elle n’a pas changé comme le chantait Julio Iglesias. Sa ligne a bien pris quelques largeurs,

l’embonpoint est la maladie du siècle, son regard reste toujours aussi tendre et sa mécanique refroidie à l’air ou désormais à l’eau, peu importent les débats théologiqu­es, distille la mélodie du bonheur. L’aura du six cylindres à plat est une quête quasi-mystique. Il suffit de monter une seule fois à bord, de mettre le contact, pour repenser complèteme­nt sa philosophi­e de vie. Cette 911 est ultra sportive, puissante, redoutable d’efficacité, inabordabl­e et intemporel­le. Ce n’est pas un hasard si Porsche vient de remporter sa 19ème victoire aux 24 Heures du Mans en juin. S’installer dans son baquet, c’est communier avec la mythologie de la route. Se prendre pour McQueen, chahuter dans les Hunaudière­s ou le Turini, s’imaginer être un autre homme. Peu de voitures vous offrent cette possibilit­é de vous transcende­r. Ce voyage autant intérieur qu’extérieur a le prix de l’exclusivit­é. Alors, afin d’aller au bout de vos rêves, optez pour la version Targa ! Quel enchanteme­nt d’apercevoir les arceaux de sécurité et cette lunette arrière arrondie, polie comme un galet, votre coeur bat la chamade, vous venez d’attraper le virus 911. Aucun traitement n’est disponible sur le marché, tant mieux. Au royaume des 4x4, deux marques continuent de creuser le sillon de l’aventure extrême. Deux engins à la motricité phénoménal­e qui ont gardé le caractère brut et indomptabl­e des origines. Ils sont construits pour durer et aller toujours plus loin, tout là-bas, derrière cette montagne ou cette dune. Ils n’ont pas fait appel à des chirurgien­s esthétique­s qui, sans aucun doute, auraient raboté leur carrosseri­e. Ils n’ont donc pas adopté des lignes fuyantes, des courbes alambiquée­s, ils n’ont pas besoin de ça pour se faire désirer. Ils sont d’un seul bloc. Depuis 1979, MercedesBe­nz produit la Classe G dans son usine de Graz en Autriche. Cyrano aurait pu s’exclamer : « C’est un roc !... C’est un pic !... C’est un cap !... Que dis-je, c’est un cap ?... C’est une péninsule ! » Avec sa transmissi­on permanente intégrale et ses trois blocages de différenti­el à 100 %, le « G » grimpe partout. Notre monde ne lui suffit pas. Jeep fait remonter sa Wrangler encore plus loin dans le temps. Héritier de la Willys du débarqueme­nt allié, ce tout-terrain venu d’Amérique est idéal pour la ruée vers l’or ou des vacances en plein air. Avec sa calandre à 7 fentes, ses charnières apparentes sur le capot ou les portières, la Wrangler est un passeport pour l’évasion. Son look de baroudeuse vous donne envie d’emprunter les routes parallèles. Elle exprime tout son potentiel sur les chemins buissonnie­rs, le vagabondag­e est sa seconde nature. Désormais disponible en « Unlimited » (quatre portes), elle permet à un père ou une mère de famille de sortir du périphériq­ue, de quitter la ville et de retrouver son âme d’enfant. Encore plus radicale que la 911, plus exotique que la Wrangler ou le « G », elle nous vient d’Angleterre. On sait que l’insularité pousse parfois à la folie. Et des dingueries de la sorte, on en redemande et on applaudit. La firme Morgan s’est fait connaître en 1909 en créant une trois roues démoniaque (Three-Wheeler) dont la réinterpré­tation est, de nouveau, au catalogue depuis 2011. Puis, à partir de 1936, elle a daigné s’intéresser aux quatre roues. La « Morgan » était née. Imaginez un roadster posé à même le sol, au plus près du bitume, une décapotabl­e comme seuls les Britanniqu­es ont le chic de fabriquer, du bois précieux, du cuir pleine fleur et une expérience de pilotage unique au monde. Cette Morgan existe toujours. Elle est terrible ! Dans un paysage aussi conformist­e, dans une époque qui a tant besoin de super-héros, ces quatre véhicules rivalisent d’audace, de tempéramen­t et de féérie. Ils n’ont pas abdiqué face à l’homogénéis­ation des goûts. Longue vie à eux ! THOMAS MORALES porsche.com mercedes-benz.fr jeep.fr morgan-motor.co.uk

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