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« Supreme, donc »

- ENTRETIEN MARIE MERLET

Quelles sont les « anti-lois » les plus importante­s pour le secteur ?

Jean-Noël Kapferer : Le luxe est le seul secteur pour lequel la croissance est un problème, non qu’elle soit difficile à réaliser, mais parce que dès lors qu’une marque de luxe réussit, elle cesse d’être luxe et rentre dans des catégories inventées pour donner le change et faire croire qu’on est encore luxe alors qu’on ne l’est plus (« nouveau luxe », « luxe postmodern­e »…). Il y a une soif gigantesqu­e de luxe aujourd’hui dans le monde, en particulie­r chez les millennial­s des pays émergents, ces paysmêmes qui font la croissance du secteur depuis vingt ans (oubliez la France, voire l’Europe). La première des antilois à respecter aujourd’hui est : dès qu’un produit se vend trop, arrêtez sa commercial­isation ! Donc tout faire comme la collab Louis Vuitton x Supreme ?

Louis Vuitton est le pilier de tout l’édifice financier LVMH. La marque Vuitton, seule, représente plus de 50 % des bénéfices de ce groupe qui est coté en bourse. Il lui faut donc nourrir en permanence une croissance rentable : elle le fait en travaillan­t sur son futur. C’està-dire son acceptabil­ité par ceux qui n’ont pas encore les moyens d’acheter Vuitton aujourd’hui, mais qui doivent impérative­ment mettre cette marque parmi leurs marques de coeur pour demain : les millennial­s. Il est donc vital pour Vuitton de s’associer aux icônes de la modernité, fugaces mais efficaces dans l’instant pour nourrir le buzz et les préférence­s. Supreme, donc.

Luxe : nouveaux challenges, nouveaux challenger­s (Eyrolles)

PROFESSEUR À HEC PARIS ET CHERCHEUR À L’INSEEC LUXURY INSTITUTE, JEAN-NOËL KAPFERER Y ENSEIGNE LES « ANTILOIS » DU MARKETING. POUR DE VRAI.

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