PERMIS DE CONSTRUIRE
L’ARTISTE CLAIRE ADELFANG, SPÉCIALISÉE DANS LES PORTRAITS DE LIEUX FRAÎCHEMENT DÉMOLIS, A CHRONIQUÉ LA RÉCENTE RÉNOVATION DU HAMEAU DE MARIE-ANTOINETTE. VIVE LA REINE ?
Construit pour l’éternelle rebelle du protocole Marie-Antoinette, entre 1783 et 1787, le hameau de la Reine qui prenait la poussière depuis 170 ans a été rénové grâce au mécénat de Dior. Ouvert au public depuis le 12 mai, il renferme un bijou d'art contemporain : une série de photographies prises pendant la rénovation par Claire Adelfang, à 34 ans la star montante de chez Thaddaeus Ropac (et accessoirement - full disclosure - la fille de notre comercial historique, Serge Adelfang, ndlr). L'artiste, ancienne de la classe préparatoire à l'Atelier de Sèvres puis promo 2005 des Beaux-Arts de Paris, a aiguisé son regard chez Patrick Tosani (notamment auteur d'impressionnantes images spatiales). « Dès ma première année aux Beaux-arts, j'ai pu me perfectionner dans la pratique de la photographie argentique et rapidement j'ai opté pour un Rolleiflex, avec ce choix du format carré qui restera mon mode d'expression » explique-t-elle. La lauréate du prix Agnès b. et du prix Thaddaeus Ropac (qui lui permit d'intégrer la galerie) interroge l'architecture comme trace de l'activité humaine. Elle s'intéresse tout particulièrement aux lieux désertés qui laissent une impression de temps suspendu. Dans les lieux qu'elle a pu photographier jusqu'à présent, bases sous-marines de la seconde guerre mondiale, estuaires, barrages, vestiges industriels, il s'agissait de monumental. Au Hameau aussi, le temps s'est arrêté. « On a l'impression d'être au lendemain de la Révolution » rappelle-t-elle.
FRAGMENTS DU RÉEL
Les photographies de Claire Adelfang sont chargés et émouvantes bien que simples et épurées. On retrouve ici ses inspirations, plus cinématographiques cette fois : la grâce silencieuse d'Andreï Tarkovski, la part visionnaire de Fritz Lang et l'immensité des grands espaces de John Ford. On retrouve aussi ses inspirations picturales, dans les peintures de Giorgio de Chirico et de Paul Nash pour leurs compositions architecturales mais également dans la peinture hollandaise, avec son rapport si particulier à la lumière.
Son regard sur ces différents espaces, avant, pendant et après la transformation, est une mise en abyme de l'oeuvre dans l'oeuvre. Des fragments du réel, zéro artifice, une vérité nue. « Pour la première fois, je touchais à de l'intime » confie-t-elle.
Jusqu’au 2 sept embre, Petit Trianon, Château de V ersailles 78000