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MACRON / TRUMP

- PAR OLIVIER MALNUIT (AVEC ÉMELINE ROJO) ILLUSTRATI­ONS NI-VAN

ET SI, MALGRÉ LES APPARENCES, LE PRÉSIDENT MACRON AVAIT TOUT COMPRIS ? RACONTER N’IMPORTE QUOI ET TAPER SUR LES MÉDIAS... BREF, FAIRE DU TRUMP À LA FRANÇAISE. TOUTES PROPORTION­S GARDÉES. UNE THÉORIE QUI FAIT DÉBAT À LA LECTURE DU LIVRE CHOC DE FRANÇOIS MÉDELINE ( TUER JUPITER) DANS LEQUEL DONALD TRUMP ORDONNE L’ASSASSINAT DU PRÉSIDENT AVEC DES CHOCOLATS.

Dimanche 11 Novembre 2018, cérémonies du centenaire de l’armistice de la Première Guerre Mondiale. Une rude journée pour le président ! Après sa visite au Musée Clémenceau, le dépôt d’une gerbe sur la tombe du soldat inconnu et l’ouverture du Forum de Paris sur la Paix en présence de 80 chefs d’États étrangers, Emmanuel Macron se détend à l’Élysée avec son épouse autour d’un sandwich dinde-mayo. Il est 17h 14. « Le Mossad dit que tu vas te faire assassiner le 11 Novembre ! », lâche soudain Brigitte Macron. « Tu sais qui est invité chez Drucker au

jourd’hui ? », lui répond le chef de l’État avant d’hausser le ton. « Le 11 Novembre, c’était aujourd’hui. Donc le Mossad se trompe (...), ces gens

sont des paranoïaqu­es, ils nous racontent leurs cauchemars. » Une heure et quart plus tard, François-Xavier Lauch, le chef de cabinet du président retrouve son corps sans vie dans son bureau. Il est 18h28. Emmanuel Macron vient d’être empoisonné à la strychnine. Un attentat perpétré par un certain Abdelkader Al-Faransi, de son vrai nom Maxime Barnerie, coursier de La Manufactur­e de Chocolat à Paris (11è) agissant pour le compte de Daesh mais avec la bénédictio­n de Poutine et sur ordre de Donald Trump afin d’échapper aux enquêtes du FBI en provoquant les conditions d’une interventi­on en Syrie. Voilà le scénario improbable de

Tuer Jupiter, le nouveau roman de l’ancien conseiller politique François Médeline (lire notre interview). Un canular littéraire ? Bien sûr que oui. Une histoire à la con ? À vous de juger. Mais en tous cas, une info à peine moins crédible que le potage médiatique dans lequel Donald Trump – mais aussi Emmanuel Macron – sont en train de nous faire sombrer...

5È COLONNE

« 7 Fake News par jour », c’est en effet désormais la moyenne des bobards, intox et contre-vérités balancés par le président américain selon le Washington Post, qui tient une comptabili­té invraisemb­lable de ses tweets et déclaratio­ns. Il aurait donc dépassé les 4600 mensonges depuis le début de son mandat ! Pour beaucoup de journalist­es, la seule fois où il a dit la vérité remonterai­t même au tout début de sa campagne. Lorsqu’il avait sincèremen­t prévenu les médias : « si je raconte n’importe quoi, c’est pour que quand vous écrirez des histoires négatives

sur moi, personne ne vous croit ». Presque trois ans plus tard, mission accomplie. Cerné par les scandales, lâché par ses plus proches collaborat­eurs, menacé d’une possible destitutio­n après la victoire attendue des démocrates aux élections de mi-mandat, Donald Trump peut toujours compter sur son électorat qui reste persuadé que les médias mentent, que les journalist­es sont des « ennemis du peuple » - comme les désigne la Maison-Blanche - et le bras armé d’un « Deep State »... Une sorte de 5è colonne des milieux politiques à Washington qui chercherai­t par tous les moyens à abattre leur champion. L’outrance et la mèche folle mis à part, quelles différence­s avec le président français lorsqu’il fait du « Fake Washing » devant ses troupes au moment de l’affaire Benalla ? Souvenez-vous, c’était au début de l’été à la Maison de la Chimie (Paris 7è), lorsqu’il mélangeait sciemment les élucubrati­ons des réseaux sociaux et des sites parodiques (Benalla à les codes nucléaires, Benalla est son amant, etc) avec les révélation­s de la presse pour discrédite­r l’ensemble et pourfendre « les fadaises de journalist­es (...), cette presse qui ne cherche plus la vérité ». « Ça n’en fait pas non plus un Trump à la Française », pondère Romain Pigenel, l’ancien conseiller numérique

AUX USA, LES FADAISES DE TRUMP ONT SAUVÉ CNN ET LES AUTRES D’UN NAUFRAGE ASSURÉ.

de Hollande et directeur-adjoint du Service d’Informatio­n du Gouverneme­nt (SIG). L’Elysée n’est pas encore une usine à fake news comme la Maison-Blanche. » Mais pour combien de temps?

DES INTOX TÉLÉGUIDÉE­S

Depuis qu’il a viré les journalist­es de l’Élysée, désormais relégués dans une annexe de 50 mètres carrés en dehors du Palais, que son conseiller « discours et Mémoire » Sylvain Fort balance du « connard » par SMS aux rédacteurs en chef qui ne sont pas tout à fait dans la ligne, que l’Obs et Society sont interdits d’accès au président après, soit une couverture trop grinçante (la couve de l’Obs montrant Macron derrière des barbelés), soit des indiscréti­ons sur les coulisses d’une interview trop réécrite, c’est peu dire que le chef de l’État a entamé une relation compliquée et même un poil tordue avec les médias dont certains, estime-t-il, «

sont à la déontologi­e ce que Mère Térésa était aux stups ». Tout comme Trump qui – à ses débuts – alimentait en infos et ragots les journalist­es, quitte à se faire passer au téléphone pour un autre, l’ancien Ministre de l’Économie a pourtant vécu une idylle joyeuse avec la presse jusqu’à transforme­r son couple, si particulie­r, en attraction mondiale. Pour faire la une des tabloïds, Trump pouvait compter sur les potins de son avocat Roy Cohn, des « échotières » comme Liz Smith ou Cindy Adams, Emmanuel Macron, lui, fait visiblemen­t appel à Michèle Marchand (sa bio

La petite marchande de photos paraît chez Grasset dans un mois), 71 ans, ancienne taulière de boites de nuits lesbiennes et collaborat­rice de

Voici, surnommée « la Mata-Hari des paparazzi », actuelle patronne de l’agence Best-Image et conseillèr­e officieuse de Madame, à qui le couple doit un nombre invraisemb­lable de couverture­s de magazines (+10% sur les ventes). Et c’est tant mieux ! Le problème, c’est quand cette même « arrangeuse de scoops » devient cet été l’un des rouages officiels de la communicat­ion d’Alexandre Benalla (l’ex « chargé de mission » du président) – et donc de l’Elysée – qu’on la croise dans l’appartemen­t où débute la contre-offensive médiatique si monochrome du faux gendarme gominé (« J’ai fait une grosse bêtise, mais ce n’est pas une faute »). Et qu’on retrouve sa patte – ou du moins son style – dans l’une des « fake-

news » les plus grotesques visant à protéger la réputation de l’ancien gros bras de la Macronie...

GORGE PROFONDE

Le 19 Juillet dernier, 24 heures après les déclaratio­ns peu flatteuses de son ancien employeur, Arnaud Montebourg, à l’époque, lui aussi, Ministre de l’Économie (« Je m’en suis séparé au bout d’une semaine, il avait provoqué un accident de voiture et voulait prendre la fuite »), l’hebdomadai­re Closer, dont les liens avec la gorge profonde des puissants (avant les Macron, elle oeuvrait pour Carla Bruni-Sarkozy) ne sont plus vraiment à illustrer, publiait une histoire en carton-pâte selon laquelle Benalla aurait, en réalité, fait les frais d’une scène quelque peu gênante : Montebourg roulant à vélo sur le périph’ et suivi en voiture par ses officiers de sécurité. « C’est grotesque et puis surtout ça n’a pas de

réalité ! », a tenu à nous préciser le nouveau défenseur du miel français (Bleu Blanc Ruche) sans apporter beaucoup plus de précisions. « Quelle

blague ! », rigole un ancien collaborat­eur du Ministre. « Imaginez, dans le monde actuel, Montebourg circulant à Vélib’ sur le périphériq­ue, sans

la moindre photo ou vidéo circulant sur le Net... » En plein suicide collectif de sa loi sur les fake-news (le texte est tellement stupide qu’il a été retoqué en commission du Sénat), le bobard a fait « pshitt ». Mais si l’intox était prouvée, quelle rigolade ! À ce niveau-là d’embrouille­s, ce n’est plus Macron faisant du Trump, c’est du Macrump. L’élève pourrait-il dépasser le maître ? En tous cas, ce serait au moins une bonne nouvelle pour les médias. Aux USA, les « fadaises » de Donald Trump ont en effet sauvé CNN (+170% d’audience) et les autres d’un naufrage assuré.

PRÉCARITÉ INFORMATIO­NNELLE

« Honnêtemen­t, ce n’est pas comparable », corrige Romain Pigenel. « Tous les jours, le président des Etats-Unis déforme les faits et raconte des craques sur les réseaux sociaux, ce n’est ni le cas d’Emmanuel Macron, ni celui de La République En Marche (LREM). Et pourtant, Trump contrôle beaucoup moins sa communicat­ion que le président ! Par contre, ce qui est en train de changer, c’est la précarité informatio­nnelle, l’idée – véhiculée sur le Net par les Russes, par exemple – que la vérité est précaire, que ce qui est vrai pour les uns n’est pas forcément vrai pour les autres. » Un peu comme celles de mon ami Bruno Roger-Petit : (« Cette sanction est la plus grave jamais prise contre un chargé de communicat­ion de l’Elysée »), fantastiqu­e animateur pince sans rire de l’ancienne émission Langues de P sur BFM (avec André Bercoff, Elisabeth Lévy, le regretté Jean-François Probst, etc), reconverti sur le tard en improbable Porte-parole de la Présidence et dont tout le monde semble avoir oublié qu’il était l’auteur de la plus grande intox politique de tous les temps : le vrai-faux blog de François Mitterrand plus de dix ans après sa mort. Comme quoi en matière de « fake news » comme du reste, avec le président Macron, notre grand soleil qui se lève, nous avons toujours le même message pour l’Amérique : « US GO HOME ! »

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