PARANGO LE MAGNIFIQUE
La belle surprise de l’hiver : Octave Parango est de retour, laissant derrière lui les mondes merveilleux de la publicité (99 francs) et de la mode (Au secours, pardon). Il a été le héros de deux films, mais il a l’âme cabossée. Sorte de Big Lebowski parisien en exil dans le sudouest, pigiste de luxe au Figaro Magazine et chroniqueur dilettante dans la Matinale de France Publique. Ca sent le déclassement. La proximité hebdomadaire des animateurs Laura Salomé, rescapée de Sciences Po, et Nathan Dechardonne, ex Cost-killer à la tête de Libération, est en train de l’achever. Comment faire rire la France, mission assignée à Octave, quand le voisinage est froid comme un canon de pistolet sur la tempe ? Faire sienne la devise de Stendhal. Se Foutre Carrément De TOUT : SFCDT. Et toucher le fond de la piscine, le temps d’une longue nuit blanchie dans les quartiers chics de la Capitale qu’Octave a jadis écumés jusqu’à plus soif, entre silhouettes de jeunes filles aux fines attaches, reste d’abribus fracassés par des hommes portant des gilets fluorescents, Moscow Mules et souvenir d’une époque où la frivolité, l’inepte, la légèreté, le vain et la folie douce étaient encore des idées neuves. Avec son roman sans titre - seul le smiley d’un visage pleurant de rire orne la couverture - Beigbeder touche comme rarement. Il se confesse tel un vieil enfant perdu entre deux siècles. Arbore sa mélancolie à la boutonnière, tout en trinquant à ce qui reste de beauté ici-bas. Et derrière le masque de Parango, c’est un autre Roman français qu’il offre. Où les mots esquissent avec une élégance rare notre horizon : « Il serait désormais un chômeur de plus de cinquante ans. Son actualité serait le lever du soleil, l’aurore sur la mer, les premières lueurs de l’aube qui filtrent par-dessus la Rhune. Trouver à manger pour les enfants dans le jardin, écrire et rester amoureux encore, jusqu’au bout de la piste noire. »
L’homme qui pleurait de rire (éditions Grasset, 320 pages, 20,90 €, en librairie le 2 janvier)