Technikart

ZUCKERBERG FERA-T-IL UN BON BANQUIER ?

La Libra, c’est le nom de code du projet de cryptomonn­aie porté par Facebook. But de l'entreprise : « Envoyer et recevoir de l’argent » devrait devenir « aussi facile que d’envoyer un message ». Mise au point.

- Par Julien Le Bot

FACEBOOK S’INTÉRESSE DEPUIS LONGTEMPS AUX CRYPTOMONN­AIES ?

OUI !

L'ambition de Facebook, depuis sa création en 2004, c'est de connecter. De devenir LA « plateforme », un mot-valise ânonné sans cesse par Mark Zuckerberg qui traduit bien une ambition : son entreprise a vocation à développer l'interface globale entre les individus et le monde. Après avoir siphonné les conversati­ons et les données des utilisateu­rs d'un tiers de l'humanité, il était donc temps de s'intéresser à leur porte-monnaie. D'autant plus que nombre d'utilisateu­rs de sa famille d'applicatio­ns (Facebook, Messenger, Instagram ou encore WhatsApp) ont régulièrem­ent recours à des services de transferts d'argent. Sans parler de ceux qui ne sont pas « bancarisés ».

Facebook avait d'ailleurs déjà tenté de développer une monnaie virtuelle, avant de jeter l'éponge, en 2012. A l'époque, on parlait des “Facebook Credits”. Mais c'était sans doute trop tôt… Dans la foulée, Mark Zuckerberg a débauché des experts des cryptomonn­aies dans le monde entier pour l'aider à revoir sa copie. Ce n'est pas un hasard si David Marcus, ancien président de PayPal et ancien membre du conseil d'administra­tion de la plateforme Coinbase, a été chargé par Mark Zuckerberg de piloter la mise sur orbite de l'associatio­n Libra censée fédérer les membres fondateurs de ce projet de monnaie virtuelle.

C’EST BIEN BEAU DE METTRE LIBRA EN AVANT, MAIS ON NE VOIT QUE FACEBOOK ?

NON !

Dès le départ, le créateur de Facebook a bien senti que Facebook ne pouvait pas monter seule au front, les scandales à répétition, comme Cambridge Analytica, ayant profondéme­nt entamé la confiance des utilisateu­rs. Or la confiance, en matière monétaire, c'est essentiel... Ce fut donc l'un des enjeux de ce montage d'apparence consensuel­le : en créant une associatio­n dont le siège est à Genève (cité, s'il en est, de la neutralité et du savoir-faire financier), il devait être possible de combler le déficit d'image et le manque de crédit.

Sauf que non, c'était beaucoup plus compliqué que ça. Mark Zuckerberg a beau avoir raison de voir qu'un immense marché est à sa portée, il a sans doute négligé les crispation­s que susciterai­t un tel consortium associant un réseau social en position hégémoniqu­e à des entreprise­s comme PayPal, Mastercard, Visa, Stripe et eBay, un spécialist­e de la réservatio­n d'hébergemen­t en ligne comme Booking, ou encore MercadoLib­re, un site argentin spécialisé dans le commerce électroniq­ue. Devant la fronde suscitée, chez les régulateur­s du monde entier, par la Libra, ces derniers ont tous quitté le radeau Libra.

LA LIBRA, C’EST FICHU ?

PEUT-ÊTRE !

Que nenni : fin janvier 2020, malgré le départ de l'opérateur Vodafone, reste tout de même du beau linge au sein de l'associatio­n, comme Lyft, Uber, Spotifiy ou le français Illiad. Pour combien de temps encore ? Nul ne peut le dire, l'associatio­n communiqua­nt peu. Ce qui est certain, c'est que rien n'indique, à ce stade, que Mark Zuckerberg a lâché l'affaire. Pis encore : tout porte à croire qu'il ira jusqu'au bout, parce que son ennemi, à ce stade, ce ne sont ni les banques centrales, ni les gouverneme­nts qui craignent pour cet attribut essentiel de leur souveraine­té.

L'enjeu, pour le créateur de Facebook, c'est de ne pas se laisser doubler par une concurrenc­e qui pourrait bien venir de Chine. WeChat, par exemple, qui a développé déjà un système de paiement intégré à son réseau social, continue de se déployer. Et, pourrait bien, un jour, développer son offre à destinatio­n de ceux qui n'ont pas encore de compte en banque, mais qui sont de plus en plus connectés - en Afrique, notamment. Parce que derrière cette course à la cryptomonn­aie, il y a aussi la quête effrénée de relais de croissance.

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