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Du sursis pour les rappeurs de Farwest et leur cameraman
Clap de fin. Le dernier chapitre judiciaire du tournage interdit du groupe de rap Farwest, le 22 mai sur le toit d’un immeuble de onze étages de la rue Paulhan, a été refermé le mercredi 6 septembre.
Dans ce dossier, une première condamnation était intervenue le 21 juin. Un jeune de 18 ans, qui était parmi les figurants, avait été placé en détention après avoir écopé de 8 mois de prison (dont quatre avec sursis). On lui reprochait essentiellement des violences et des outrages à personnes dépositaires de l’autorité publique mais aussi sa participation aux débordements qui ont suivi.
Ce soir-là, vers 21 heures, l’irruption des forces de l’ordre n’avait pas vraiment été appréciée. Les policiers, accueillis par des insultes puis ciblés par des jets de pierres à l’issue de l’évacuation, avaient été contraints d’utiliser à sept reprises leurs armes de dispersion pour restaurer le calme sur place. Huit containers avaient été ensuite brûlés en représailles à l’entrée du Mail mais aussi rues Bastié, Louvois, Rabourdin et Louis-blériot. Le calme n’était revenu que vers 1 heure du matin.
Trois mois et demi après les faits, les principaux protagonistes - les deux membres du groupe de rap (Lassana et Mahamadou) et leur cameraman (Killian), qui a utilisé un drone pour filmer certaines images ont été présentés à leur tour devant les juges. Ils avaient été interpellés sur les lieux.
Placés sous contrôle judiciaire le 24 mai, les trois accusés de 22 ans sont arrivés libres à l’audience. Les rappeurs étaient poursuivis pour violation de domicile, occupation d’un toit en réunion et mise en danger d’autrui. Les deux premières mentions frappaient également l’étudiant en cinéma et ami d’enfance des chanteurs de Farwest. Il était également poursuivi pour l’utilisation du drone.
Inconnus ou presque de la justice (N.D.L.R : une ordonnance pénale pour conduite sans permis figure seulement au casier judiciaire de Mahamadou), les trois prévenus ont fait amende honorable face au tribunal.
Lors de leur arrestation sur les lieux du tournage, ils avaient notamment lancé aux policiers : « Vous nous faites chier pour rien ! » Ce mercredi 6 septembre, le trio semblait avoir retrouvé ses esprits. « Sur les images, on voit un figurant chuter d’une rambarde sur le toit et tomber sur le gravier ! », avait raconté la juge, Pascale Humbert-massa. « Ça aurait pu être dramatique, on en a conscience maintenant,a avoué l’un des rappeurs. On ne fera plus jamais de tournage sur un toit ou un lieu dangereux. » Faute excusée à moitié pardonnée ?
L’enjeu de l’audience était pourtant ailleurs. La question était en fait de savoir si Farwest avait délibérément choisi ce toit pour tourner et y avait accédé en pénétrant dans l’immeuble par manoeuvres, menaces ou contraintes. Le sommet de l’immeuble de la rue Paulhan est en effet protégé par une porte d’accès dont le gardien est le seul à avoir la clé. Une autre se trouve dans une armoire sécurisée, qu’il faut forcer ou briser pour s’en emparer.
Les constatations faites le lendemain ont confirmé que cette armoire n’avait pas été forcée. « On a commencé à tourner en bas, sous un porche. Et puis on s’est dit que ça pourrait être pas mal d’aller sur le toit. » « Pour capter le coucher de soleil notamment »,a ajouté Killian, qui s’était éclipsé des lieux quelques minutes pour aller chercher chez lui son drone. « On est entré dans l’immeuble avant de monter. En haut, la porte était ouverte. » « Qui a ouvert la porte du toit ? », a demandé la juge Humbert-massa. « On ne sait pas. » « Il se dit qu’un jeune du coin aurait un double », a précisé maître Loïc Padonou, l’avocat des deux rappeurs.
« On a fait ça au feeling, sans rien préméditer », a insisté ensuite le trio. Le visionnage des rushs du clip - « où aucune insulte, ni arme ni attaque contre les institutions ne sont présentes », a souligné la juge Humbert-massa - donne du poids à cette version.
« Ils se sont fait pincer, oui », a poursuivi maître Padonou en préambule de sa brillante plaidoirie après avoir entendu la procureure requérir des peines avec sursis (6 mois pour les rappeurs, 3 mois pour le cameraman). Évoquant l’artiste contemporain français JR, connu et reconnu pour ses photoscollages sauvages et subversifs aux quatre coins du monde, la défense a insisté sur « la dimension transgressive » que peut revêtir l’art. « Certains artistes s’affranchissent des lois pour exprimer leur art. » « 6 mois avec sursis pour mes clients, c’est très grave », a-t-il finalement tonné.
Le tribunal de Versailles a semble-t-il était sensible à la démonstration de la défense. Le trio a été relaxé des poursuites de violation de domicile. Lassana et Mahamadou ont écopé chacun de 3 mois avec sursis. Killian, dont le drone est confisqué, a été condamné à 2 mois avec sursis.
Les trois hommes devront par ailleurs indemniser solidairement le bailleur SEMIV à hauteur de 1 000 euros au titre du préjudice moral (contre les 1 500 euros demandés). La société réclamait également 7 837,68 euros de dédommagement pour les dix dégradations recensées dans ses immeubles dans les jours suivant les faits. La SEMIV estimait sans doute qu’elles étaient consécutives aux débordements qui ont suivi l’occupation du toit. Le tribunal a débouté la partie civile sur ce point.
Deux et trois mois de prison avec sursis ont été infligés aux rappeurs de Vélizy et à leur cameraman dans l’affaire du tournage interdit sur le toit d’un immeuble de la rue Paulhan, le 22 mai. La violation de domicile et la préméditation ont été écartées. Un figurant déjà condamné en juin « On ne tournera plus jamais dans un lieu dangereux » La SEMIV en partie déboutée