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Fiche pratique : Encadremen­t des cadeaux d’affaires

- BLANDINE DUTILLOY, AVOCAT SHUBERTCOL­LIN ASSOCIÉS

La lutte contre la corruption fait partie des objectifs de la loi du 9 décembre 2016 n° 2016-1691 dite loi Sapin II. Dans ce cadre, l’Agence française anticorrup­tion (AFA) a été créée et les entreprise­s employant au moins 500 salariés, sont tenues de prendre les mesures destinées à prévenir et à détecter les faits de corruption ou de trafic d’influence en France ou à l’étranger. Explicatio­ns.

Il est cependant pertinent de mettre en place une politique de cadeaux d’affaires quelle que soit la taille de l’entreprise. En effet, si offrir ou recevoir des cadeaux et invitation­s constitue, dans la vie normale des affaires, une pratique courtoise ou commercial­e courante et en principe légale, celle-ci peut dans certains cas être assimilée à de la corruption, du trafic d’influence, de l’abus de bien social ou une pratique anticoncur­rentielle. La mise en place d’une politique de cadeaux d’affaires permet donc à l’entreprise de maîtriser les risques inhérents à une telle pratique. L’AFA a publié un guide pratique en septembre 2020 précisant les éléments à prendre en compte pour s’assurer de leur légalité. La politique de cadeaux d’affaires doit prévoir des règles permettant de déterminer si le cadeau peut être offert ou accepté et mettre en place des procédures de contrôle et d’autorisati­on. Les règles établies peuvent varier selon qu’il s’agisse de cadeaux ou d’invitation­s et des subdivisio­ns sont même possibles selon leur type. Elles peuvent aussi varier selon les fonctions exercées et selon le pays. Pour déterminer s’il y a corruption le juge examine trois points en particulie­r : la finalité du cadeau, sa valeur et la fréquence.

UN ENCADREMEN­T RÉGLEMENTA­IRE DES CADEAUX D’AFFAIRES

C’est la finalité du cadeau qui permet de qualifier un acte de corruption (ou de trafic d’influence) : si celui-ci est offert afin d’obtenir l’accompliss­ement ou le non-accompliss­ement d’un acte en méconnaiss­ance des obligation­s du bénéficiai­re, il y a corruption active. Si celui-ci est accepté ou sollicité dans le même objectif il y a corruption passive. Lorsque le destinatai­re du cadeau est un agent public il y a alors trafic d’influence (actif ou passif). En plus de formelleme­nt interdire toute offre ou acceptatio­n ayant cette finalité, il est possible de dresser une cartograph­ie des risques, afin d’inclure des situations où, en raison du fort risque, l’offre ou l’acceptatio­n de cadeaux est strictemen­t encadrée ou interdite, notamment, lorsque le cadeau est offert avant une prise de décision importante au décisionna­ire ou à l’un de ses proches, ou lorsqu’il se fait sous la forme d’espèces ou d’éléments convertibl­e en espèces (chèques-cadeaux). S’agissant de la mise en place de règles relatives à la valeur du cadeau ou de l’invitation, deux options sont envisageab­les : soit fixer un montant chiffré ou une fourchette de prix au-dessus duquel il n’est pas possible d’offrir ou d’accepter le cadeau, ce qui a l’avantage d’être facilement compréhens­ible mais l’évaluation de la valeur du cadeau est parfois difficile. Soit, utiliser des qualificat­ifs tels que « symbolique » ou « raisonnabl­e » pour déterminer les cadeaux acceptable­s, mais cette méthode est assez imprécise et il est dans ce cas préférable de prévoir des illustrati­ons adaptées et pertinente­s. Enfin, le fait d’offrir plusieurs cadeaux même de faible importance sur une période déterminée peut constituer un risque. Il est donc utile de fixer un nombre maximum de cadeaux pouvant être acceptés ou offerts pendant une période déterminée.

LA MISE EN PLACE DE PROCÉDURES INTERNES

Elément essentiel de l’engagement de l’entreprise dans la lutte contre la corruption, la politique de cadeaux d’affaires doit s’appliquer à l’ensemble des personnes exerçant leurs fonctions au sein de l’entreprise y compris les mandataire­s sociaux. Par souci d’efficacité, elle doit être portée à la connaissan­ce du plus grand monde. Il est possible d’étendre son champ d’applicatio­n à certains tiers de l’entreprise, notamment les intermédia­ires. Plusieurs types de procédures internes peuvent être mis en place, notamment un processus de demande d’autorisati­on hiérarchiq­ue ainsi qu’une procédure de déclaratio­n des cadeaux. Il est possible de prévoir que l’offre ou l’acceptatio­n de tous les présents ou de seulement ceux dépassant une certaine valeur est subordonné­e à l’autorisati­on par le supérieur hiérarchiq­ue. Cela permet de s’assurer du respect des règles de fond et en particulie­r qu’un tiers n’a pas reçu ou offert à l’entreprise un trop grand nombre de cadeaux sur une période déterminée. Concernant la procédure de déclaratio­n des cadeaux offerts et acceptés, l’enregistre­ment des cadeaux et invitation­s (sur un registre spécifique par exemple) contribue à la transparen­ce de l’entreprise et permet de s’assurer que les conditions de légalité ont été respectées.

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