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PARIS- KATMANDOU

- Anthony Nicolazzi

Voilà plus d’un an maintenant que nous rêvions de tenir entre nos mains ce Grand guide du Mustang. Nous l’ avons imaginé. Idéalisé. Bien avant que ne surviennen­t le séisme du 25 avril dernier au Népal et ses violentes répliques. L’abattement, déjà. Et puis, alors qu’il était quasiment bouclé, il y a eu ce 13 novembre. Un vendredi. Un vendredi noir. À nouveau, la stupeur. La douleur. La rage, aussi. Avec, de retour au bureau – un lundi de deuil national –, une minute de silence, et une évidente impression d’être à contretemp­s. À quelques mois d’intervalle, tout concourait à nous rappeler cet état d’hébétude lorsque les sismograph­es se sont mis à trembler à Katmandou… Et toujours les mêmes questions. Peut-on continuer d’évoquer le voyage, la montagne, la beauté du monde… lorsque le Monde enterre ses morts ? Abandonner? Premier battement de coeur sur notre électrocar­diogramme plat. Un réflexe, plus qu’une réflexion. Tous, comme un seul homme, nous avons ressenti le besoin de respecter nos engagement­s envers les équipes locales népalaises, qui nous attendaien­t sur le terrain. Et puis, à mesure que nous découvrion­s ce Népal d’un courage et d’une solidarité sans faille, une rage nouvelle, une envie de se battre, de prendre la vie à bras-le-corps, d’aider à reconstrui­re, le mieux possible, ce monde que nous avions tant aimé. Sept mois après le Népal, la France pleure ses morts. Et à l’heure où planent la mort ou l’obscuranti­sme, une à une, les flammes des bougies illuminent dans la nuit. De Paris à Katmandou, la vie qui renaît. Nous revivrons. Tous et toutes. Demain, nous entendrons à nouveau les rires au bivouac, aux terrasses de cafés ou dans les travées du Bataclan. Ce numéro a été conçu alors que les tentes des réfugiés s’alignaient en rangs serrés dans Ratna Park ou dans les jardins du monastère de Shechen, à Katmandou. Il a été imprimé au beau milieu des « Une » sanglantes. Mais ce qu’il incarne est à mille lieues de cela. Il rend grâce à l’indicible beauté du monde, à sa fragilité, à son humanité. À ce que nous avons de plus précieux, ce que nous devons sauvegarde­r, célébrer, transmettr­e. Le coeur. La vie.

 ??  ?? EN COUVERTURE : LES LATHOS DOMINANT LE SITE DE GHAR GOMPA, À LO GEKAR (3 950 M). © J. CHAVY
EN COUVERTURE : LES LATHOS DOMINANT LE SITE DE GHAR GOMPA, À LO GEKAR (3 950 M). © J. CHAVY

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