Trek

ENTRE GÉNÉPI ET LAVANDE

- TEXTE ET PHOTOS : GÉRARD GUERRIER

BAPTISÉE « GÉNÉPI-LAVANDE » PAR L’AUTEUR, CETTE LONGUE RANDONNÉE SAUVAGE NOUS INVITE À RENOUER AVEC L’ESSENCE DE LA MONTAGNE ET À REMONTER LE TEMPS, EN RALLIANT LES SOURCES DU VAR DEPUIS LE QUEYRAS. UNE BONNE OCCASION, POUR LES MONTAGNARD­S EXPÉRIMENT­ÉS, DE RESSORTIR LA BOUSSOLE, AFIN DE S’ÉVADER À L’ÉCART DES GRANDS ITINÉRAIRE­S CLASSIQUES.

rands magasins, métro, périphériq­ue, aéroports… Rien à faire, je ne m’y fais pas! Je suis et resterai jusqu’à mon dernier souffle, un ochlophobe : celui qui a peur de la foule. Pas étonnant que je sois devenu montagnard! Oui, mais voilà… Même la montagne se balise, se civilise et s’urbanise pour améliorer la vie des hommes, faciliter la circulatio­n, créer des emplois et permettre aux randonneur­s de se suivre à la queue leu leu sur des sentiers sécurisés pour déambuler tout en conversant avec leurs smartphone­s. « Pourtant que la montagne est belle ! » Pour la retrouver à l’état sauvage, nul besoin de s’exiler dans le Karakoram, le Haut Kabarakh ou la cordillère de Darwin! Elle est là, à portée de Vibram, pour peu que l’on veuille s’en donner la peine…

MAIS OÙ EST LE SENTIER ?

Nous serons six : Birgit, mon épouse et quatre solides et rustiques trekkeuse et trekkeurs qui ont connu aussi bien la taïga sibérienne que la selva colombienn­e. Un court trajet en taxi, depuis Guillestre vers la vallée du Cristillan, suffit à nous basculer dans un autre temps, quand les montagnard­s vivaient encore de leurs terres, quand les prairies étaient encore fauchées quand les fustes sentaient encore la bouse et le foin. La première montée permet de vérifier la forme et l’humeur de notre équipe. Les blagues fusent… Pourtant, dès l’arrivée à notre premier col, l’ambiance redescend d’un cran :

— Mais où est le sentier ? fait l’un.

— À partir d’ici, il n’y a plus de sentier.

— Mais ça passe où ?

— Là…

Oui, là… dans des pentes escarpées que nous devons franchir en dévers quitte à plier les chevilles et à optimiser l’usage des bâtons. Quelques pierres roulent sous nos pieds. Le rythme ralentit. L’inquiétude grandit : « Pourquoi n’avons-nous pas pris le GR dans l’autre vallée ? » Enfin nous rallions la terre ferme ou plutôt la pelouse qui mène à une bergerie d’alpage. Si des hommes sont déjà montés là… On devrait pouvoir en redescendr­e ! Encore faut-il repérer une « traçouille » qui serpente dans les schistes gris pour rejoindre le Plan de Parouart où l’Ubaye joue les grandes rivières en étalant ses méandres entre le sable et le gravier. Une occasion rêvée pour piquer une tête dans l’eau glacée. L’aventure déjà…

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