Trek

PLUIE LECTURE

-

Préférer un parapluie léger

à une cape de pluie.

Une liseuse plutôt que Guerre et Paix, même en

livre de poche !

que nous sortons de la forêt, nous engageons la conversati­on avec un vieux berger qui nous offre le coup à boire :

— Vous avez du loup, ici ?

— Oh sûr. C’est même ici qu’il a été vu le premier. Ça fait plus de vingt ans.

— Il vous prend des bêtes

— Pas trop, mais faut être vigilant, rentrer les bêtes le soir. C’est plus une vie ! Ils veulent la mort des bergers.

— Vous avez des patous ?

— Pas besoin, j’ai ma femme…

En passant le col de Pal, protégé par des vestiges de la ligne Maginot, en béton et « tôle métro », nous accédons à des reliefs qui annoncent déjà la Haute Provence. D’ailleurs, dans la très raide descente vers Les Tourres, nous apercevons nos premières lavandes d’altitude, vers 1 800 mètres : une merveille de la nature, tant les parfums et les couleurs sont intenses ! Il est 14 heures quand, assoiffés, nous atteignons le hameau des Tourres que Giono aurait sans doute aimé. Une source sortie droit du ventre de la montagne alimente un grand bassin dans lequel les propriétai­res ont immergé des bouteilles de vin et de champagne. Nous sommes invités à boire une coupe. Nous déclinons prudemment pour nous contenter de l’eau délicieuse­ment fraîche… Trois heures plus loin, le village de Châteauneu­f d’Entraunes s’enroule autour de sa colline comme le ferait une coquille autour de son escargot. Des jeunes gens endimanché­s fêtent un mariage autour de la fontaine. Sur la placette, un berger néo-rural vend ses fromages de brebis. Des anciens chapeautés jouent à la pétanque, d’autres sirotent un pastis en tapant le carton… C’est sûr, Giono aurait aimé !

RALENTIR LE TEMPS

Trace incertaine, ressauts de rocher où l’on doit mettre les mains sans s’exposer, chamois ébahis de voir des randonneur­s en ces lieux. On aimerait prolonger ces moments de magie. Mais la montre, ou plutôt le soleil, sont des maîtres intraitabl­es ! Le pas Roubinous atteint, nous faisons un crochet par les lacs de Lignin, notre Atacama, avant de descendre le très long vallon de Fouès, vierge de toute trace. Nous arrivons à Aurent, sept heures après le départ, pour une sieste à l’ombre du lavoir. Aucune route ne dessert ce village jalousemen­t préservé par les quelques résidents saisonnier­s. Nous partons à regret afin de rallier Argenton, un autre bout du monde, en remontant un sentier un peu vertigineu­x. Combien de temps, résistera-t-il encore aux outrages du temps, faute de paysans, de colporteur­s et de mulets ? Le calcaire bientôt s’efface au profit du grès, les chênes au profit des châtaignie­rs qui ombragent le sentier romain. L’envie de ralentir le pas ou même le temps, nous tenaille. Mais la nuit approche. Le temps est intraitabl­e !

Un long voyage à pied à travers les Alpes du Sud. Comme un retour aux valeurs essentiell­es...

Newspapers in French

Newspapers from France