Un peu, beaucoup, à la… COMBI !
Tout près de Verneuil-sur-Avre (27), avec la passion démesurée d’un seul homme, le temps s’est arrêté. Et nous aussi, pour découvrir la riche collection de vans de Bruno Verscheure, l’amiral en chef de la flotte Only Combi, qui surfe sur la vague vintage depuis déjà quelques années. La location de vieux « vévé » en tous genres, c’est son dada. La revente après restauration aussi, parfois. Bienvenue chez ce dingue de Combi – et pas qu’un peu –, comme dans un musée à ciel ouvert.
Il faut le voir pour le croire. Non, nous ne sommes pas au rassemblement annuel d’un club de collectionneurs. Et pourtant, dans les 100 Combi au global sous nos yeux ? Un peu plus, un peu moins ? Impossible d’avoir une idée au plus juste du nombre de Transporter, toutes générations confondues, remisés ici. Ceux-ci sont d’abord destinés à trouver un locataire, éventuellement et par opportunité un acheteur, mais ils sont surtout en route pour une seconde vie, dont quelques-uns en attente d’une restauration complète. Chez Only Combi, le parc de véhicules évolue sans cesse. Pour exemple, tout début avril, le jour de notre reportage, Bruno Verscheure nous indiquait qu’il venait encore d’acquérir deux T3 et un T2 dans la semaine. Une chose est sûre, il n’y a pas deux collections privées de Combi comme la sienne en France et sans doute aucune autre également en Europe. Car si un peu partout dans l’Hexagone, les loueurs ne manquent pas et se multiplient, Only Combi a assurément le choix le plus riche que l’on puisse trouver. Pour le parc locatif, d’ailleurs, la composition de la flotte est plus précise : environ 40 Combi aménagés et une petite dizaine d’autres façons Combi bus et Combi bar destinés, eux, à des foires, festivals et autres événements comparables. Bien sûr, les modèles « camper » sont les favoris des particuliers en quête de week-ends et vacances en mode vintage. Et c’est bien là la vocation originelle d’Only Combi, le point de départ.
uD’abord que des T3
Tout a finalement commencé il y a 10 ans. Bruno était encore dans sa vie professionnelle d’avant, maraîcher, allant de marchés en marchés pour vendre ses fruits et légumes. Pas le temps pour l’oisiveté, ses week-ends étaient également occupés à traverser la France en camping-car afin d’accompagner son fils sur des compétitions de moto.
« À l’époque je voulais préparer ma retraite. Je me disais, surtout pas les Seychelles, je vais m’ennuyer, nous explique-t-il. J’ai alors commencé à m’acheter des vieilles voitures Mercedes pour m’occuper. » Bruno a aussi mis en place, assez vite, une société de location de quelques camping-cars, percevant parfaitement l’intérêt de la formule avec sa propre expérience. « J’en ai eu jusqu’à cinq en location. » Reste que le camping-car, ce n’était pas vraiment sa tasse de thé. Et c’est par hasard, en cherchant un véhicule ancien des plus spécifiques, une DKW à moteur deux-temps d’origine, qu’il entend parler d’un autre modèle en vente et à restaurer, un Volkswagen T3 aménagé. Bruno n’est pas encore un spécialiste du genre, mais il se renseigne pour connaître la valeur de ce Combi de troisième génération. Les réponses qu’on lui apporte sont plutôt évasives, mais les questions répétées sur l’endroit où se trouverait ce fameux T3 à racheter éveillent son instinct. À Rungis, les notions de valeur en regard de l’offre et la demande, il connaît. L’intérêt de ses interlocuteurs pour localiser ce T3 confirme qu’il doit être sur une piste inté
ressante. Pour lui, c’est aussi quelque part un clin d’oeil à ses souvenirs d’enfance. « Mes parents, agriculteurs, avaient un T2 bus. Pour les vacances, on retirait la paille qui était dedans, on le nettoyait, on ajoutait une banquette et on partait avec. » Le T3 en question, avait notamment d’une nouvelle boîte de vitesses. Remis en état, Bruno l’a ensuite proposé en location sous le petit nom de Scoobi. « C’était en avril 2014, en août j’en avais quatre de plus à proposer, tous restaurés » , se souvient-il.
uLa nostalgie sans cambouis
L’année d’après, Bruno disposait d’une quinzaine de Combi, puis carrément le double, un an plus tard encore. « Ce qui m’a surtout plu dans cette activité de location, c’est la clientèle. Moi je ne suis pas forcément un puriste du Combi, mais j’ai tout de suite senti le capital sympathie qui était énorme autour de ce véhicule. Dans mes deux premières années, j’ai acheté tous les T3 que je trouvais, car les T2 étaient hors de prix. » Son parc locatif grossit alors très vite, à la mesure de « l’acheteur compulsif » qu’il avoue, sans détours, être devenu. Conséquemment, Only Combi – avouons que le nom est bien choisi – s’inscrit comme un solide pilier du secteur de la location de vans aménagés vintage, avec ce slogan tout aussi bien trouvé, « La nostalgie sans cambouis » ! Pour tous ceux qui n’ont pas les moyens de s’offrir un Combi hors d’âge, il est toujours possible d’en profiter pour des escapades tranquilles, sans les soucis de la remise en état, de l’entretien et du garage à l’année. « Je me souviens de mes premiers locataires, comme si c’était hier, un couple de retraités de 70 ans. Ils sont venus trois ans de suite. Leur truc à eux, c’était de faire les bords de canaux à vélo. Ils faisaient étape avec mon Combi à un endroit et partaient à bicyclette dans un sens une journée, puis dans l’autre sens le lendemain. Et tous les deux jours, ils changeaient d’endroit. », nous raconte-t-il. Une pratique bien dans l’esprit d’un parcours en Combi des années 70/80, façon slow tourisme, en quête de nature et de petites routes, le supplément d’âme en bonus.
Pour gérer au mieux sa flotte grandissante, Bruno s’est entouré d’une petite équipe : mécanicien, carrossier, soudeur et employée administrative sont aujourd’hui indispensables au bon fonctionnement de la structure. Reste que c’est souvent son 06 qui sonne pour répondre aux multiples demandes, du particulier aux entreprises en recherche de plusieurs véhicules pour des opérations spéciales, des tournages de film, des émissions de télévision, des publicités, des tournées promotionnelles, des séminaires, etc. Qui d’autre que lui est finalement en mesure de pouvoir mettre à disposition une trentaine de Combi T2 et T3, éventuellement avec chauffeur ? « J’ai déjà signé de gros contrats,
avec Google, Apple, Orange, des offices de tourisme… Aujourd’hui, l’événementiel peut aller jusqu’à 50 % de mon activité » (du moins en situation normale, car la contrainte sanitaire 2020 a un peu modifié la donne). Pour Google, par exemple, ce sont 31 véhicules qui ont été mis à disposition en 2018, avec plus de 40,000 km parcourus en 15 jours, et 440 points de vente visités dans plus de 230 villes en France. Cette logistique-là, en effet, ça demande des ressources rares. Tous clients confondus, pour les bons crus connus, c’est ainsi un total de 300 à 400 départs en location que gère Bruno dans une année.
Itinéraires conseillés
Le locataire particulier doit néanmoins respecter quelques règles établies. « Je veux que mes Combi restent dans un périmètre de 250 à 300 km maxi, car j’assure l’assistance moi-même » (NDLR : deux camions sont prévus pour ça). Dans ce cercle défini, depuis Armentières-sur-Avre (27), tout près de Verneuilsur-Avre où sont mis à disposition les vans, les circuits touristiques dignes d’intérêt sont déjà nombreux : largement jusqu’à Saint-Malo en Bretagne, Cherbourg ou Dieppe en Normandie, les châteaux de la Loire en région Centre, tandis que Versailles est à peine à plus de 100 km, et le parc Naturel Régional du
Perche carrément voisin. Quelques itinéraires sont même proposés, à l’instar de road trips « Au fil de la Seine normande » (de Giverny à Honfleur, afin de suivre tout en douceur les méandres de la Seine), « Best-Of de l’Eure » (via les jardins de peintre, la Seine, etc.), ou encore un circuit voulu plus champêtre dans l’Eure (jolis villages en petites villes, à travers champs, prairies et marais). Tout cela est envisageable à bord des Combi les plus recherchés, T1, T2 et T3 (voir tarifs et conditions dans notre encadré), mais aussi en T4, T5 ou T6, car Only Combi c’est aussi désormais plusieurs Transporter bien plus récents. Tous ont un petit nom que Bruno évoque avec enthousiasme au fil de notre visite. Pour les modèles spécifiques que nous souhaitions prendre en photo, et qu’il fallait donc déplacer, il ne nous sortait pas simplement un T3 bicolore avec des fleurs, mais plutôt « Garlaban », ni un T2 vert mais, dit avec tact, le joli « Tic », et pas plus un T2 orange et blanc, mais plus littéralement un « Malaga » (tiré cette fois du nom choisi par Volkswagen lors du lancement du protagoniste). Le T1 vert et blanc doté d’un phare indépendant au-dessus de la cabine ? C’est « Léo », proche parent de « Sweat Dreams » sorti la même année. Et parmi les T2, nous avons aussi croisé « Beber », « Biloute », « Buzz », « Caramel », « César », « Cornichon », « Elvis », « Samy »… Enfin, le T6 jaune et blanc que vous pouvez apercevoir dans ce sujet, répond quant à lui au surnom évocateur de « Golden Wind ».
L’addiction, c’est pour lui
Partir quelques jours en Combi, nous avons déjà eu l’occasion de le faire, et c’est toujours une expérience sympa à vivre (voir Van Life n°5). Il faut rester attentif aux conseils avant le départ, rouler cool et savoir apprécier tout ce qui fait le charme de ce choix vintage ( pas de climatisation, ni direction assistée, ni vitres électriques…). Bruno, qui ne se considère pas comme un « puriste du Combi », n’hésite pas à enrichir les presta
tions d’origine. Un bon chauffage stationnaire moderne ajouté par-là, une douchette extérieure en plus par-ci, un tout nouveau moteur, des éclairages intérieurs efficaces, voire un réfrigérateur flambant neuf caché derrière une porte de placard qui préserve le style seventies, au final, nombre de ses Combi ont été bonifiés. Certes, ça sort des clous pour le concours d’élégance classique des fans de la première heure, mais les locataires, eux, ne s’en plaignent pas.
Au-delà de la location, au-delà de la passion, et donc par raison cette fois, Only Combi revend aussi quelques véhicules. « Souvent à un client qui a loué, et beaucoup par le biais du bouche-à-oreille » , assure Bruno qui confie également aimer choisir le futur propriétaire. Il faut que le courant passe, comme on dit, et que le projet soit réalisable à partir des différents modèles en restauration au fond du garage, du pont élévateur côté mécanique, à la cabine de peinture côté carrosserie. D’autres Combi sont stockés à l’arrière des ateliers, à l’abri ou en plein air. Pour certains, on n’imagine même pas le nombre d’heures de travail que cela va représenter avant d’être remis en état et pouvoir reprendre la route. « Quand je rachète un Combi, je ne sais jamais vraiment ce que je vais en faire, soit de la location, soit de la revente après restauration. Parfois, dans un lot que je reprends, il y en a des pourris, ça arrive. Ceux-là servent juste à récupérer des pièces. En tout cas, mes Combi je les connais tous, ils ont tous une histoire. » Intarissable sur le sujet, avec un peu plus de temps devant nous, il nous aurait sans doute détaillé la plupart de celles-ci. Quand on aime, pour sûr, on peut conter. ◆