Vanity Fair (France)

VANITY FLORE

-

Cfouiiiiie ’est un triste soir de novembre et je me demande pourquoi les trenchs, censés être des manteaux de pluie, n’ont pas de capuche. Un de ces soirs où l’on ne sait plus si l’été et Saint-Rémy- de-Provence ont réellement existé un jour ou si c’était une vue de l’esprit. En parlant d’esprit, la jeune fille qui vient de s’asseoir à côté de moi affiche un sweat-shirt à slogan : « Le seul moyen de résister à la tentation, c’est d’y céder. » Pauvre , devenu

Oscar Wilde malgré lui roi de la citation sur Internet – j’ai même vu qu’un site en recensait plus de mille. Le cynisme de l’époque transforme les poètes morts en chair à punchline et l’auteur de Dorian Gray en Thierry Ardisson 3.0. Paix à son âme, paix à ses vannes et à ses restes, pas sûr que sa mort soit LOL tous les jours du côté du Père-Lachaise, entre un squatté par

Jim Morrison les fumeurs de mauvaise herbe et un qui n’a pas encore réussi à rire de sa propre

Pierre Desproges disparitio­n. Je ne citerai pas le nom de cette actrice américaine très connue, qui, de passage à Paris, m’a demandé en aparté : « Mais qui est ce pew’ lechez’dont on me pawl’ ? » Allons, comme je ne suis pas du genre à me laisser abattre, je décide de trinquer, aux Parisienne­s trempées, à Wilde et à mon actrice. Serveur ! Savez-vous que « les folies sont les seules choses que l’on ne regrette jamais ? » Non ? Alors réglons ça avec une bouteille de sancerre s’il vous plaît !

Ce soir, je me suis arrêtée seule au Flore pour PREMIER VERRE. contempler le flot des Parisiens pressés par la pluie, humer l’ambiance, écouter – et puis, il faut bien l’écrire, cette chronique.

n’est pas à Paris, elle s’est échappée – « enCatherin­e Baba darling, enfouiiiii­e » – à L.A. passer un casting avec pour un rôle dans un blockbuste­r futuriste. Enfin, c’est Omar Sy ce qu’elle raconte à tout le monde. Même si au fond, je la soupçonne de s’envoyer des cafés calva à Chausey, Basse-Normandie, avec sa bande que Wilde himself n’aurait pas reniée : les créatrices sexy et , le designer sautillant

Yaz Bukey Marie Marot , l’artiste aux cheveux roses et le

Vincent Darré Marie Beltrami créateur de bijoux . Il se chuchote que Chausey serait

Elie Top devenue la nouvelle destinatio­n confidenti­elle des gens de goût, après que la très basque Guéthary s’est retrouvée envahie par les Parisiens intello-branchés dans le sillage de .

Frédéric Beigbeder Imaginez un peu, un carré VIP dans un carré VIP dans un carré VIP et vous êtes à Chausey. Quarante- cinq minutes de bateau depuis Granville pour arriver sur une île venteuse et déserte grande comme trois studios parisiens, sans voitures avec quelques dizaines de maison et un hôtel de quelques chambres à peine. Le comble du luxe pour les badass de palaces que nous sommes.

« Serviteur très cher / tu DEUXIÈME VERRE. me ressers / un petit verre / de sancerre ? » La fille au sweat- shirt a été rejointe par son amie. Je me demande si ces deux-là ont des coiffures de gauche ou de droite. C’est la théorie de mon ami le Consultant – un homme politique piquant et charmant qui me saurait gré de ne pas publier ses hypothèses politico- capillaire­s dans la presse. Pour lui donc, on peut savoir de quel bord vote une fille en observant sa coiffure. Pour paraphrase­r Proust, je dirais que les théories fumeuses sont le sel de la vie. De la mienne en tout cas.

Pas possible de voir sous TROISIÈME VERRE. leur voile le bord politique des trois femmes du Golfe qui viennent de s’installer à ma gauche, mais on devine, à travers l’abaya et les lourdes senteurs d’oud, les vêtements siglés et sexys. Depuis quelque temps, le Flore est envahi par ces princesses orientales graves, belles et intimidant­es, qui achètent un diamant ou un total look Fendi comme nous allons chez Cos. Mon amie , rédactrice en chef du

Sofia Guellaty Style.com arabe, réussit le tour de force d’être la fashion passerelle entre ce monde et Paris, entre le maximalism­e moyen- oriental, le nail art, les brushings à la kératine et le less is more français. Plus qu’un grand écart, un travail d’équilibris­te. Cheers, habibi !

Après les stilettos (porter ou pas plus de QUATRIÈME VERRE. 12 cm de talon), le bouddhisme (je te jure, ça fait vachement de bien) et les pervers narcissiqu­es (qui sont partout), mes voisines ont atteint le point Godwin de toute conversati­on éducativo-psychanaly­tique : , le chanteur. « Tu te rends compte que c’était le

Carlos fils de ? » À ce moment précis de la soirée, je suis

Françoise Dolto prête à vendre Bouddha, mes Aperlaï de 12 cm et les meilleurs de mes amis pervers pour un tirelipimp­on avec lui dans n’importe quel bar miteux de la rive droite.

« J’adorerais me faire tatouer. Un gros taCINQUIÈM­E VERRE. touage. Mais je ne vais pas le faire. Déjà, j’ai peur d’avoir mal. Et surtout, je n’ai pas envie de ressembler à une porte de chiottes quand j’aurai 50 ans. » Ce qui devait arriver est arrivé : mes voisines de table se sont installées avec moi. Devrais-je leur dire que mon propre dos ressemble aux portes du pénitencie­r version Yohji Yamamoto ? J’ai lu récemment que adorait

Catherine Deneuve les tatouages, ça nous fait déjà ça en commun. Je compose le numéro de . « Allô

SIXIÈME VERRE. Michel Denisot Michel ? Désolée de vous déranger à 1 heure du matin. Vous auriez le 06 de Deneuve par hasard ? Je dois impérative­ment lui parler ! » �

 ??  ?? était le fils decompte que carlosFran­çoise dolto ? »
était le fils decompte que carlosFran­çoise dolto ? »

Newspapers in French

Newspapers from France