« JIM JARMUSCH EST UN POÈTE »
Reda Kateb dit toute son admiration pour le réalisateur de Stranger Than Paradise et les grands acteurs mutiques comme Forest Whitaker.
J’ai découvert le cinéma de Jim Jarà la sortie de Dead Man en musch 1995, mais c’est en voyant Down By Law, et plus tard Stranger Than Paradise, que j’ai eu le coup de foudre. Jarmusch est un poète de cinéma : il fait surgir la poésie dans des endroits où l’on n’imaginerait pas la trouver. C’est le cas avec les deux personnages solitaires qui déambulent comme des étrangers dans Détroit pour Only Lovers Left Alive mais aussi dans Down By Law, avec Roberto Benigni et Tom Waits, qui est presque un film comique. Quand j’étais petit, mes parents m’emmenaient beaucoup au cinéma. J’ai vu Le Roi et l’Oiseau [de ] au moins quinze fois
Paul Grimault avec mon père qui se retapait toutes les séances car, à l’époque, on ne pouvait pas simplement regarder le DVD en boucle. Ma mère m’a emmené voir La Strada [de
], un autre choc. Plus tard, Federico Fellini quand j’étais étudiant, puis apprenti comédien, j’ai été ouvreur et projectionniste dans le cinéma où j’avais découvert ces films, Le Luxy à Ivry-sur-Seine. Je n’étais pas très bon d’ailleurs – il m’est arrivé de monter le film à l’envers et un jour je me suis trompé de pellicule alors que le maire et le producteur étaient dans la salle. Mais ce job me convenait bien : je pouvais voir les films et surtout les revoir.
J’aime la manière dont Jarmusch sait filmer le silence, sans maniérisme. The Limits of Control par exemple, avec
Isaac de , est un film presque sans dialoBankolé gues et j’admire beaucoup les réalisateurs qui peuvent saisir les intentions, les corps, dans un autre type de narration. Je ne l’ai jamais rencontré, mais mon ami , qui
Slimane Dazi a un petit rôle dans son dernier film, m’a confirmé que c’était un mec génial. Ça m’a fait plaisir : je suis toujours heureux quand on me dit que les artistes que j’idéalise sont des gens bien.
La musique est aussi très importante dans ses films. Grâce à Broken Flowers, j’ai découvert le jazz éthiopien, une musique qui convient parfaitement à un long travelling sur une route qui défile. Et il y a bien sûr la BO du Wu-Tang Clan pour Ghost Dog. Sans parler de , l’un des acteurs
Forest Whitaker qui m’a donné envie de faire ce métier. J’aime sa personnalité insondable, son silence. J’aime l’idée de jouer un tueur à gages comme un samouraï. Il y a de ça d’ailleurs, dans La Résistance de l’air, mon dernier film. Mon personnage est passionné de tir. Il apprécie le silence, a un rapport particulier à la respiration. Sur un tournage, quand j’entends : “Moteur ! Silence !”, j’ai l’impression d’entrer dans un espace différent, de trouver mon rythme. Whitaker, je l’aime dans Smoke [de ], dans Le Der
Wayne Wang nier roi d’Écosse [de ]...
Kevin Macdonald Je l’aime même quand les films sont moins bons. Je ne crois pas aux parcours immaculés. Un acteur n’est pas tenu de faire des choses géniales à chaque fois. L’important, c’est de rester dans une énergie, de ne pas se laisser scléroser par la pression. Ne pas penser que l’on porte tout le film sur ses épaules, ça aide à mieux jouer. Le réalisateur qui a fixé les bases pour moi, c’est . Plus récemment,
Jacques Audiard la manière dont travaillait
Ryan Gosling sur le tournage de Lost River m’a beaucoup inspiré : faire confiance aux autres, mettre de côté ses angoisses, faire en sorte que tout le monde sur le plateau ait l’impression de faire son propre film... C’est valable quel que soit le genre de film que l’on tourne et j’ai essayé de retrouver ça en réalisant mon court-métrage [Pitchoune]. D’ailleurs, comme acteur, je me verrais bien explorer d’autres univers de cinéma. Si me proposait cinq minutes
Will Ferrell dans sa prochaine réalisation, je n’hésiterais pas une seconde ! » —