Vanity Fair (France)

« J’AI SONGÉ À OUVRIR UN STAND DE TACOS »

Après avoir envisagé d’arrêter la musique, Feist revient avec un sixième album, Pleasure, dont elle raconte la genèse.

- — PROPOS RECUEILLIS PAR CLÉMENTINE GOLDSZAL

Mon précédent album est sorti en 2011, donc on peut dire que j’ai pris mon temps pour celui- ci ! Je fais de la musique depuis que j’ai 15 ans – j’en ai aujourd’hui 40 – et j’ai eu envie, en sortant de la tournée de Metals, de mettre les choses à plat. J’ai songé à reprendre des études ou même à ouvrir un stand de tacos à Miami. Je me demandais si je faisais ce métier par habitude ou par réelle envie. Et puis, je suis doucement revenue aux chansons, mais j’ai voulu faire les choses différemme­nt. Après avoir mis au point les compositio­ns à Toronto, nous avons décidé, avec mon producteur et mon aco

Renaud Letang lyte canadien , de partir enregis

Mocky trer dans trois studios différents. Le plan était d’y passer deux semaines à chaque fois, avec un intervalle d’un mois entre chaque séance. Nous jouerions toujours l’album en entier, avec l’idée que, dans chaque lieu, la lumière, l’atmosphère... donneraien­t une tonalité singulière et que mon humeur du jour modifierai­t mon approche, donc ma performanc­e. Je me suis mise à chercher des studios résidentie­ls partout dans le monde et la première étape nous a amenés à Stinson Beach. C’est une petite ville aujourd’hui très gentrifiée, au nord de San Francisco, qui a été, dans les années 1960, l’un des berceaux du mouvement hippie. On y arrive soit en longeant la côte pacifique, soit en traversant le parc de séquoias de Muir Woods. Le studio est installé dans une grande maison sur une colline qui surplombe la mer. Le matin, j’allais me promener sur la plage, puis nous passions douze à quinze heures à enregistre­r. Le matériel était dans le salon, la chambre juste à côté, la cuisine pas loin. J’aime ce côté domestique, quand tout se mélange ; je ne veux pas que la vie s’arrête quand je fais de la musique. Un mois après Stinson, nous nous sommes retrouvés à nouveau, cette fois- ci dans une ancienne église, au nord de l’État de New York, à une demi-heure de Woodstock. Le studio s’appelle Dreamland et a été créé par un batteur qui a joué avec Peter Gabriel dans les années 1980. Là, il y avait une réverb’ incroyable : c’était comme si l’église me répondait quand je chantais. La majorité de ce que nous avons gardé a été enregistré­e là-bas. La dernière étape, ça a été les Studios Ferber à Paris, que je fréquente depuis plus de dix ans. [le

Jarvis Cocker chanteur du groupe britanniqu­e Pulp] est passé déjeuner un jour et a enregistré sa partie pour notre duo [Century]. Mon vieil ami pianiste était dans le

Gonzales coin aussi ; il nous donnait son avis. C’est sur la fin que le titre, Pleasure, m’est apparu. J’aime l’idée d’un va- et-vient entre le plaisir et la souffrance, entre le désir et son assouvisse­ment. Le plaisir, c’est une manière de voir les choses ; c’est décider de se laisser guider dans chaque journée par la joie et pas par la tristesse. C’est cette envie de bonheur qui a dicté la réalisatio­n de ce disque. »

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