Ferments COSMÉTIQUES
À l’image des cures de probiotiques recommandées à chaque changement de saison, la nouvelle nutricosmétique enrichit les soins en bactéries et levures qui embellissent la peau.
Quel est le secret du lait d’ânesse de Cléopâtre ? D’où viennent les actifs de la crème de La Mer et de l’acide hyaluronique, cette molécule à laquelle rides et ridules ne résistent pas ? La réponse est dans la biofermentation. À l’origine de nos yaourts, kéfirs et autres kombuchas, elle est aussi le secret d’une nouvelle génération de sérums et de crèmes qui favorisent le renouvellement naturel de la peau.
« Les microorganismes que sont les bactéries, les levures ou les enzymes sont de vraies petites usines à molécules, explique Gérard Redziniak, scientifique et consultant en dermocosmétologie. Mises en présence d’un substrat (eau additionnée d’acides aminés provenant de céréales, d’algues ou de polysaccharides de fruits, par exemple), elles produisent des structures moléculaires nouvelles. Ce procédé existe depuis l’Antiquité : c’est celui du lait d’ânesse fermenté de Cléopâtre, du vinaigre de rinçage pour faire briller les cheveux... » Aujourd’hui, c’est devenu l’immense et passionnant terrain de jeu de la biotechnologie qui utilise ces éléments en complexes nutritifs ou isolément. « L’utilisation des probiotiques en cosmétique remonte à dix ans, précise Véronique Delvigne, directrice de la communication scientifique chez Lancôme. Nous sommes dans une démarche ciblée. La crème Génifique, par exemple, associe deux probiotiques : une bifidobactérie (comme dans le yaourt) et une levure (proche du fromage persillé). Développées dans un milieu favorable, elles se divisent et se multiplient. La biomasse obtenue est ensuite fragmentée par réaction enzymatique ou ultrasons pour stopper sa fermentation avant d’être introduite dans la formule cosmétique. » Cette méthode est également utilisée pour créer la fameuse molécule d’acide hyaluronique. « Les microorganismes ont l’avantage de pouvoir être modifiés pour produire une molécule d’intérêt en grande quantité, explique MarieCaroline Renault, directrice de la marque Filorga. Nous en utilisons de différentes souches pour donner naissance aussi bien à l’acide hyaluronique qu’à notre complexe polyrevitalisant NCTF contenu dans nos produits injectables et dans nos crèmes. » Mais quel est leur intérêt pour la peau ? Ils sont en parfaite affinité avec le microbiome, cette flore cutanée vivante et protectrice que les scientifiques commencent à peine à découvrir. Ces probiotiques sont aussi une source de micronutriments directement assimilables par les cellules. « Ils aident à un meilleur renouvellement de l’épiderme, renforcent sa fonction protectrice et favorisent une bonne cicatrisation », énumère Véronique Delvigne. « La fermentation a de l’avenir, s’enthousiasme MarieCaroline Renault. Il est très probable que dans les prochaines années la majorité des principes actifs soient obtenus grâce à cette méthode ». Et que nous devenions, du coup, les plus fervents adeptes des ferments. —