Vanity Fair (France)

« IL A L’UNE DES PLUS BELLES VOIX DE LA POP MUSIC »

L’ancien leader de Pulp sort Room 29, album écrit avec le pianiste Chilly Gonzales. L’occasion pour le dandy anglais de rendre hommage au chanteur iconoclast­e SCOTT WALKER.

- PROPOS RECUEILLIS PAR CLÉMENTINE GOLDSZAL

«

Ce Californie­n est arrivé en Angleterre dans les années 1960 pour devenir chanteur des Walker Brothers, un boys band qui interpréta­it des ballades à la Phil Spector. Mais

n’aimait pas la célébrité. Scott Walker Il a rapidement commencé à travailler en solo et sa carrière a, dès lors, pris un tour étrange, presque schizophrè­ne. En 1967, il a sorti Scott, son premier album, puis Scott 2, Scott 3 et Scott 4 les trois années suivantes. Il écrivait des chansons sombres, dramatique­s, avec des arrangemen­ts orchestrau­x très différents de ce qui se faisait dans la pop à l’époque. Récemment, j’ai beaucoup écouté Scott 3, notamment le morceau Big Louise qui parle d’un travesti vieillissa­nt et isolé. Les thématique­s de ses chansons sont toujours intéressan­tes et inattendue­s. J’admire beaucoup ce contraste entre les paroles, qui traitent du quotidien de gens qui vivent un peu en dehors de la société, et l’orchestrat­ion très léchée, presque cinématogr­aphique. On retrouve cette qualité chez

, que Scott Walker a énorJacque­s Brel mément repris dans des versions traduites en anglais par .

Mort Shuman À partir des années 1980, les disques de Scott Walker ont commencé à moins se vendre et lui-même s’est plus ou moins retiré. Il est remonté sur scène de temps à autre avec les Walker Brothers pour des concerts, a sorti quelques albums, mais il n’a vraiment refait surface que dans les années 2000, avec de la musique expériment­ale. Certains de ses derniers morceaux sont d’ailleurs difficiles à écouter ; il rend sa voix très dure, les arrangemen­ts sont bizarres, mais même si je ne peux pas entièremen­t apprécier tout ce qu’il fait, je suis heureux qu’il le fasse. Je sais qu’il aime ces dissonance­s et j’aime qu’il continue à chercher et à explorer. Beaucoup des chanteurs qui ont connu le succès dans les sixties ont vite arrêté d’innover, se contentant de chanter leurs vieux tubes. Bien sûr, les gens adoreraien­t que Walker reprenne ses anciennes chansons, mais il s’y refuse, et c’est quelque chose que j’admire et respecte. Il a une oreille unique pour les sons inhabituel­s : en 2006, sur son album The Drift, on entend un son que le percussion­niste a obtenu en tapant sur un cochon mort. J’ai fait appel à ce même musicien pour jouer sur l’album de la chanteuse , que j’ai

Serafina Steer produit en 2013. Le disque s’appelle The Moths Are Real et je voulais reproduire le bruit d’un papillon de nuit enfermé dans un pot de confiture.

J’ai rencontré Scott Walker à Londres lors d’un festival il y a des années. En 2001, il a travaillé avec nous sur le dernier album de Pulp, We Love Life. Il a notamment fait de spectacula­ires arrangemen­ts de cordes. Moi, je n’aime pas beaucoup ma voix ; j’étais très intimidé de chanter devant lui qui a l’une des plus belles voix de la pop. Nous sommes restés en contact depuis. Je lui ai d’ailleurs fait écouter Room 29, qu’il a aimé. Son avis compte beaucoup pour moi. » —

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France