Vanity Fair (France)

Nom de code : ALPHA PROJECT

Le 17 mai dernier, le joaillier américain a dévoilé sous le sceau du secret à New York sa dernière collection haute joaillerie, jusque-là objet de tous les mystères.

- BÉNÉDICTE BURGUET

Sur la Cinquième Avenue, des ateliers Harry Winston à la boutique du joaillier, il y a un bloc d’immeubles. Ces 350 mètres, les bijoux qui composent la ligne Legacy les ont parcourus sous très haute escorte. Pour ce « trajet », quatre camions blindés ont été affrétés. Jusqu’ici, rien de révolution­naire dans le monde ultra- sécurisé de la haute joaillerie, à un détail près : trois voyageaien­t à vide, seul le quatrième était chargé... d’un bijou à la fois. Sorte de bonneteau géant joué sur vingt- deux allers-retours, soit le nombre de pièces que compte la collection. Harry Winston, victime du « casse du siècle » en décembre 2008 à Paris, a sorti l’artillerie lourde pour protéger son dernier trésor totalisant 836 carats : présentati­on officielle en comité restreint, interdicti­on de photograph­ier la collection. Les clients, eux, devront se déplacer à New York exclusivem­ent et sur invitation nominative de la maison. En effet,

Legacy ne voyagera pas. Il faut dire que la confidenti­alité fait partie de l’ADN de la marque née en 1932 : Harry Winston lui-même refusait d’être pris en photo (les seuls clichés existant le montrent de dos). Question discrétion, difficile de faire mieux : en 1949, il a expédié le Hope (3), un incroyable diamant bleu de 45,52 carats qui aurait appartenu à la couronne de France, par simple courrier postal.

Pour cette dernière collection, là encore, culte du secret. Legacy est inspirée du mythique diamant poire Winston Legacy de 101 carats – un des plus beaux dans cette taille – vendu par Christie’s au joaillier en mai 2013 pour la somme de 26,7 millions de dollars, soit 254 400 dollars le carat. Un record. Pendant trois ans, les gemmologue­s HW ont arpenté les mines de diamants à la recherche de gemmes exceptionn­elles. Puis, ils les ont fait sertir par leurs artisans à New York. À Manhattan, une partie du siège a même été interdite d’accès et réservée à l’équipe réduite occupée par le très confidenti­el « Alpha Project ».

Le 17 mai dernier, le joaillier a enfin dévoilé dans sa boutique amirale une collection hallucinan­te échappant aux standards du très rare : au total, 1 667 diamants blancs essentiell­ement taillés en poire, tous sans exception de couleur D flawless. Sur du velours bleu nuit étincelaie­nt des boucles d’oreilles format lustre (1), des bagues cocktail poids lourd et aussi des colliers dont deux pourvus (2) d’un pendentif poire, l’un de 31,04 et l’autre de 34,27 carats.

Ce soir- là, derrière une porte au bout d’un couloir dérobé, dans un salon gris pâle hautement gardé, une v itrine. Ici dort le Winston Legacy exposé aux regards pour la toute première fois. On s’approche. On respire à peine. « Est- il à vendre lui aussi ? » « Non... Sauf si un acheteur se manifeste », répond- on chez Winston. Les paris sont ouverts. —

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