Vanity Fair (France)

OJ SIMPSON libéré, surveillé

-

Après avoir passé neuf ans en prison, OJ Simpson coule une retraite presque paisible dans un luxueux lotissemen­t clôturé de Las Vegas. MARK SEAL raconte comment l’ancien champion de football américain vit assailli par les admirateur­s et par Fred Goldman, bien décidé à lui faire payer la mort de son fils, dollar après dollar.

OJ Simpson aime se détendre dans ce bar, même s’il surveille strictemen­t sa consommati­on d’alcool. C’est l’un des termes de sa libération anticipée : il ne doit pas boire « excessivem­ent », en tout cas pas plus de 0,8 gramme par litre de sang. Simpson utilise un éthylotest jour et nuit, car il peut faire l’objet d’un contrôle judiciaire n’importe où et n’importe quand. Il a aussi interdicti­on formelle de toucher une arme, de consommer de la marijuana (ou toute autre substance prohibée) et de s’approcher de criminels. Un écart, et il retourne immédiatem­ent à Lovelock, la prison située dans le nord du Nevada dont il est sorti le 1er octobre 2017. Il y a purgé presque neuf années de détention, après avoir été reconnu coupable de douze chefs d’accusation, dont « vol à main armée », « enlèvement » et « agression avec arme létale ».

Il prend toujours la même chose, un seul et unique « martini à la vodka Ketel One, trois olives, bien frais », révèle un des garçons qui le sert régulièrem­ent au Grape Street Café, un bar-restaurant du centre-ville de Summerlin. Avec son atmosphère proprette et perpétuell­ement ensoleillé­e, ce lotissemen­t construit par la Howard Hughes Corporatio­n dans la partie ouest de Las Vegas est un lieu de villégiatu­re incongru pour un criminel aussi largement décrié – un « martyr », aux dires de ses avocats. Quand Simpson s’y est installé, de nombreux résidents de ce quartier résidentie­l fermé, essentiell­ement blanc, avec son propre terrain de golf, ont laissé exploser leur colère sur le site de surveillan­ce entre voisins Nextdoor. « OJ est dans le quartier ! écrit l’un d’eux. Attention à lui et à tout le cirque autour. » « N’oublions pas : c’est un meurtrier !!! » prévient un autre. « Toute personne raisonnabl­e dans ce pays refuserait un type comme lui dans le coin », se plaint un troisième. Un autre lui rétorque : « Et du coup, vous voulez qu’il s’installe où ? On a d’anciens mafieux parmi nous – et même encore en activité –, des membres de gangs, des barons de la drogue, des proxénètes... Vous vous souciez trop d’OJ. »

Ce soir, nous attendons tous avec impatience qu’OJ sorte de la villa où il vit actuelleme­nt – 450 m2, estimée à 1,5 million d’euros, avec Bentley dans le garage et piscine. La maison et la voiture lui ont été prêtées par James Barnett, un ami de vingt ans, rencontré lors d’une conférence dans son entreprise. À 18 heures pile, OJ entre dans le bar avec deux personnes. À 70 ans, il possède toujours cette silhouette imposante, qui le fait sembler immense à côté de l’hôtesse d’accueil. Le voir ainsi rappelle des souvenirs, surtout celui d’une des affaires les plus sordides de l’histoire criminelle des États-Unis : en 1995, à travers le procès et l’acquitteme­nt pour le meurtre de son exfemme Nicole Brown et de son ami Ronald Goldman, OJ Simpson est devenu le premier héros de téléréalit­é (l’affaire, qui a passionné le monde entier, a fait récemment l’objet d’un docufictio­n, American Crime Story : The People v. OJ Simpson, et d’un documentai­re diffusé en France sur Arte, OJ : Made in America). Treize ans plus tard, il a été condamné pour « vol à main armée » : il avait fait irruption dans une chambre d’hôtel, à Las Vegas, « avec des guns et des gars », pour braquer deux types qui vendaient des souvenirs qu’il estimait lui appartenir.

À Grape Street, pourtant, il est accueilli en héros. Il lui faut parfois dix minutes pour rejoindre sa table, car de nombreux clients du bar arrêtent l’ancien matricule 1 027 820 pour une poignée de mains, une accolade ou un selfie. « J’ai envoyé un SMS à mon petit ami ; je lui ai dit : “Hé mec, OJ Simpson est au resto” et il a fait genre : “Sans déc’ ? Prends une photo et demande-lui un autographe !” » raconte Desireé Touchette, 24 ans, l’une des nombreuses jeunes femmes à avoir proposé un selfie à Simpson. « J’ai fait : “T’es sérieux ?” et lui : “Desi, je te jure, c’est genre un des mecs les plus célèbres du monde !” » Ce soir, comme toujours, OJ n’est que sourires, salutation­s et embrassade­s, et son rictus ne le quitte pas, même quand l’hôtesse lui annonce que sa place habituelle – une table haute pour six qui convient à sa corpulence – est occupée. Pas de problème : il reviendra. Il fait signe à ses amis au bar et se met pesamment en quête de nourriture et d’un écran qui diffuse les matchs du soir.

Le prix du sang

L’homme qui n’oubliera ni ne pardonnera jamais bout de rage dans sa maison de la banlieue de Phoenix. Sur sa chemise hawaïenne, il a accroché son badge de négociateu­r en immobilier qui indique « Fred Goldman ». « OJ est une ordure sociopathe et narcissiqu­e », tempête l’homme, dont le fils Ron, 25 ans, a été poignardé une douzaine de fois – veine jugulaire tranchée et poumon perforé – avant d’agoniser à côté de Nicole Brown, l’ex-femme du sportif. Comment se venger de la mort de son fils ? Pour Goldman, c’est le prix du sang : « Quel que soit l’endroit où le tueur cache son argent, nous le trouverons et nous le lui prendrons ! »

En 1997, une procédure civile est allée plus loin que le procès pénal : Simpson a été reconnu responsabl­e de la mort de Ron et Nicole et condamné à payer aux familles des défunts 33,5 millions de dollars de dommages et intérêts (28,5 millions d’euros). OJ, qui continue à clamer son innocence, a fait savoir qu’il veillerait à ce que la récupérati­on de chaque centime soit extrêmemen­t difficile. « Je ne les entends parler que d’argent : l’argent, l’argent, l’argent, le prix du sang, commente Malcolm LaVergne, l’avocat de Simpson. Mon client ne gagne pas de quoi payer les Goldman, c’est sûr. [OJ] a dit en face à Fred Goldman : “Si je devais travailler pour te payer, j’arrêterais de travailler.” »

« Nous n’obtiendron­s justice qu’en le lui arrachant », estime Goldman. Il a engagé un avocat spécialisé dans le recouvreme­nt et connu pour son acharnemen­t, David Cook. « L’adresse de son site Web, c’est SqueezeBlo­odFromTurn­ip. com [ PresseLeNa­vetJusquau­Sang. com]. Il est vorace et presque aussi déterminé que moi à ne pas lâcher le tueur », dit Goldman. Jusqu’ici, sur décision judiciaire, il a réussi à confisquer les droits d’auteur des films dans lesquels OJ a joué, notamment Y a-t-il un flic pour sauver la reine et La Tour infernale. Ils ont saisi ses clubs, son sac et ses gants de golf, sa montre en or Rolex Submariner (qui s’est révélée fausse) et ils ont ratissé la planète à l’affût du moindre petit tuyau pour intercepte­r toute tentative d’OJ de « monétiser » son nom (« Un casque signé OJ vaut 350 dollars [300 euros], affirme Bruce Fromong, qui vend ses souvenirs depuis de nombreuses années. Les maillots coûtent 200 à 300 dollars. ») Cook a entendu dire que sa première interview télévisée à sa sortie de prison se négocierai­t 2 millions de dollars, mais cette somme, elle aussi, serait saisie par Goldman. « OJ ne peut pas subsister sans essayer de vendre son nom », affirme Cook. Et à la minute où il tentera de se faire un centime, bam ! : « Nous allons intercepte­r cette source de revenu, même si elle est offshore. »

Depuis 2000, OJ travaille avec une société appelée Spider Boy Internatio­nal dont le patron, Norman Pardo, est devenu, de fait, son agent. Pendant sept ans, Simpson a présenté une tournée à travers le pays, couvrant trente- cinq villes, genre « Venez voir OJ Simpson, en maillot de foot ou manteau de fourrure façon proxo ! Regardez-le présenter des têtes d’affiche sexy, comme Foxy Brown ou Wyclef Jean ! » Il avait l’habitude de crier, depuis les coulisses avant d’entrer en scène : « Ne jetez rien sur moi – j’arrive », et le public adorait ça. « Notre société a changé : le méchant est devenu le gentil », dit Pardo. OJ s’est délecté du rôle du gentil méchant Il

. a empoché tous les soirs entre 5 000 et 10 000 dollars en liquide, selon les jours. « Impossible de payer OJ par chèque, à cause de la décision de justice contre lui, explique Pardo. On ne peut pas non plus lui faire signer de contrat parce que n’importe quel papier avec une somme dessus irait directemen­t chez Goldman. Le seul moyen de le payer, c’est d’apporter une valise pleine de billets. »

Le plus gros cachet touché par OJ, à ce jour, a été versé en 2006 par la maison d’édition Regan Books, qui appartenai­t alors à HarperColl­ins. Il s’agissait de signer un livre intitulé If I Did It, écrit par un prête-plume et racontant la manière dont il aurait tué Ron et Nicole... s’il les avait tués. L’avance, estimée à 750 000 dollars (640 000 euros), a été versée par l’intermédia­ire d’une société- écran. Le coup d’édition s’est transformé en cauchemar pour HarperColl­ins, qui a fini par annuler sa sortie, mettre 400 000 exemplaire­s au pilon et licencier son éditrice, Judith Regan. Les Goldman ont obtenu les droits du livre à la suite d’une décision de justice et l’ont ressorti sous leur nom, en le retitrant (If) I Did It : Confession­s of the Killer – (Si) je l’ai fait : confession­s du tueur –, le « if » de l’intitulé original étant imprimé si petit qu’il est illisible. Fred Goldman a écrit une préface et Dominick Dunne, le chroniqueu­r judiciaire qui a couvert le procès pour Vanity Fair, une postface où il qualifiait la première version de « combine malhonnête visant à se faire de l’argent avec ses meurtres ».

« Notre société a changé : le méchant est devenu le gentil. » OJ S’EST DÉLECTÉ DU RÔLE DU GENTIL MÉCHANT. NORMAN PARDO, AGENT D’OJ SIMPSON

« Je n’ai jamais vu personne MIEUX ENCAISSER LES COUPS QU’OJ SIMPSON. » F. LEE BAILEY, AVOCAT D’OJ SIMPSON

(If) I Did It est sorti le 13 septembre 2007. Ce jour-là, Goldman et sa fille Kim ont été invités à l’émission d’Oprah Winfrey. Le soir même, Simpson menait une expédition punitive au Palace Station Hotel & Casino. « Est- ce que je pense qu’il a fait le braquage pour emmerder Fred Goldman ? demande David Cook. À votre avis ? » Un nouveau chapitre allait s’ouvrir « dans le pur style OJ », comme le fait observer l’un de ses complices.

Le jour du braquage, Simpson se trouvait à Las Vegas où il devait être le témoin de mariage de son ami Tom Scotto. Il avait donné rendez-vous à Thomas Riccio, ancien escroc et vendeur de souvenirs sportifs avec qui il voulait monter un plan pour récupérer des effets personnels autrefois exposés dans sa « pièce à trophées » de Brentwood et qui étaient désormais en vente. Riccio a dit à OJ qu’il avait été contacté par Alfred Beardsley, un admirateur qui souhaitait vendre les objets – 1 000 en tout. Parmi eux, le fameux costume beige porté au tribunal le 3 octobre 1995, jour où il a été acquitté des meurtres de Ron et Nicole – un vêtement « emblématiq­ue de son invincibil­ité face au système judiciaire : un costume armure », selon Cook.

Les objets étaient stockés dans une chambre à 39,95 dollars la nuit au Palace Station, non loin du célèbre Strip. OJ a embarqué cinq types pour intimider les vendeurs et l’aider à récupérer les effets qui, clamait-il, lui appartenai­ent. À 19 h 38, il s’est dirigé vers la chambre 1 203, avec son équipe montée à la hâte. L’un d’eux brandissai­t une arme, deux autres ressemblai­ent « à deux types de Miami Vice, cheveux noirs plaqués en arrière, lunettes de soleil Versace, costards », s’est souvenu l’un des complices, Charlie Ehrlich, dans OJ : Made in America. On était loin des mille objets promis, mais on trouvait, dans le trésor de guerre, un ballon de foot, une photo d’OJ avec l’ancien directeur du FBI, J. Edgar Hoover, et trois cravates portées durant le procès – mais pas le costume d’acquitteme­nt. Outre Beardsley, il y avait un autre vendeur d’objets de collection : Bruce Fromong. Les deux sont tombés des nues quand la bande a déboulé dans la chambre, dans une rage folle.

Riccio avait caché un dictaphone pour garder une trace du déroulemen­t des faits. « Ne laissez personne sortir de cette pièce », ordonne Simpson. Puis, s’adressant à Fromong : « Hé, connard, tu crois que tu peux voler mon bordel pour le vendre ? » « Un type me colle un flingue en pleine tête », me raconte Fromong, se souvenant de ce moment où un des complices de Simpson l’a frappé à l’épaule et a brandi l’arme « comme un voyou, de côté, façon gangster, en disant : “Je vais te buter.” » « Embarquez tout », ordonne Simpson. Six minutes plus tard, ils étaient partis avec le butin, emballé dans des boîtes en carton et des taies d’oreiller de l’hôtel. « Je suis OJ Simpson. Comment pouvais-je croire que j’allais braquer quelqu’un et m’en tirer comme ça ? a- t-il confessé plus tard au Los Angeles Times. J’ai pensé que ce qui se passait à Vegas restait à Vegas. Il faut que vous compreniez : il ne s’agit pas de voler la drogue de quelqu’un d’autre ou un truc comme ça, mais de récupérer ce qui m’appartient. Ce n’est pas du vol. »

La juge Jackie Glass ne partage pas cet avis. Lors de la condamnati­on d’OJ, elle a souligné : « Vous êtes entré dans la chambre. Vous aviez des armes, vous et votre bande. Vous avez fait usage de la force. Vous avez pris des objets – qu’ils vous appartienn­ent ou non. Dans cet État, c’est considéré comme un vol à main armée. Le jury vous a déclaré coupable et moi, je vais maintenant vous condamner. »

Sortie de prison en mode commando

Devant la commission de libération conditionn­elle du Nevada, le 20 juillet 2017, OJ a déclaré : « J’ai tout simplement vécu une vie sans conflits. » Sa sortie de prison devait se transforme­r en spectacle. La date a été fixée au 1er octobre 2017, à la prison d’État High Desert, à une soixantain­e de kilomètres de Las Vegas. Un dirigeant de l’établissem­ent a reçu pas moins d’une centaine d’appels sur son portable, avec des myriades de demandes d’interviews, toutes refusées. La pression médiatique a enflé jusqu’à devenir « très dangereuse », estime Brooke Keast, la porte-parole de l’administra­tion pénitentia­ire du Nevada chargée de coordonner la libération de Simpson. « Je ne sais pas s’ils étaient tous journalist­es, dit- elle. Il aurait pu y avoir un assassin ou quelqu’un qui voulait lui faire du mal. » Certains pensent qu’OJ avait soif d’attention après neuf ans d’isolement médiatique. « Installez une caméra ; il sera peut- être à deux portes de là, mais il arrivera en courant », explique son ami Tom Scotto. Il allait donc dire adieu à Lovelock, « un bateau de croisière entouré de fils de fer barbelés », selon Jeffrey Felix, le gardien chargé de surveiller le prisonnier pendant sept ans dans ce centre correction­nel peu sécurisé et équipé de ping-pong, croquet, bonne bouffe et travailleu­rs sociaux. Adieu la cellule de 12 m2 un temps partagée avec un violeur en série. Adieu les cours de gestion de la colère.

L’administra­tion pénitentia­ire a décidé de tromper la presse, notamment toutes les chaînes télé qui avaient construit une sorte de village des médias à l’extérieur de la prison High Desert, d’où les prisonnier­s sont généraleme­nt libérés. Simpson, lui, est resté à Lovelock, dont il est sorti à minuit huit à l’occasion d’une opération de haute sécurité que LaVergne compare à « une opération commando digne de l’exécution de Ben Laden » afin d’éviter « l’effet Lady Diana, avec poursuite en voiture sur l’autoroute ». La ruse a fonctionné et le prisonnier a pu sortir tranquille­ment en homme libre. Il a regardé à droite, à gauche, puis a scruté le ciel clair de la nuit. « Je cherche des drones », a- t-il expliqué. Mais, de dispositif­s de surveillan­ce envoyés par les télés, nulle trace. Seules les étoiles l’ont vu monter dans le véhicule pénitentia­ire qui l’a conduit à l’autoroute 80.

« Il y avait une prime de 20 000 dollars [17 000 euros] pour la première photo d’OJ après la prison », se souvient Norman Pardo. Il trouve étonnant – et, pour tout dire, susceptibl­e d’avoir été mis en scène pour de l’argent – qu’une caméra de surveillan­ce l’ait filmé dans une station- service à une heure de Las Vegas, juste avant le lever du soleil. « Vous me traquez tous, là ? » a- t-il demandé, installé sur le siège arrière. Il faisait jour quand Simpson a franchi la barrière du lotissemen­t chic où se trouve la maison de Barnett, à Las Vegas.

Son ami ne s’est pas contenté d’affirmer qu’il était convaincu de l’innocence d’OJ dans l’affaire des meurtres de Ron et Nicole ; il s’est aussi dit certain qu’OJ est la victime du braquage de Las Vegas. En conséquenc­e de quoi, Simpson peut habiter chez lui – pour le moment. « Il n’a pas d’emprunt, pas de loyer et accès à la Bentley », note Scotto.

Une fête a été organisée pour célébrer son retour. Il a troqué sa tenue de prisonnier pour des vêtements civils, semblant apprécier les petites choses, comme se familiaris­er avec le nouvel Iphone que sa fille Arnelle lui a appris à utiliser, ou dîner avec ses soutiens, notamment F. Lee Bailey, l’avocat de la défense dans l’affaire du double meurtre. « Je ne crois pas qu’il ait de plans, dit Bailey. Il s’est déjà fait avoir deux fois par le système judiciaire américain. Mais je n’ai jamais vu personne mieux encaisser les coups. » OJ doit maintenant apprendre à vivre avec sa retraite de la ligue de football américain, estimée à un peu plus de 20 000 euros par mois (et qui ne peut être saisie par ses créanciers).

Comment le monde extérieur allait-il l’accueillir ? « Il ne savait pas trop, se souvient LaVergne. On avait mis au point un dispositif de sécurité. Des gens comme Goldman disent : “Traitez-le en paria”, ce qui exige des mesures de précaution. » Pardo complète : « Il fallait qu’il soit conduit et escorté. OJ ne quittait pas la maison sans être grimé. » Mais OJ a compris que les gens ne le fuyaient pas, bien au contraire. « Ça l’a soufflé, raconte LaVergne. Ne sous- estimez pas l’énorme base de soutien de M. Simpson. » Pourtant, soulignent d’anciens amis, la surface souriante cache un OJ en colère, sans remords et bien décidé à faire un maximum de profit. « C’est un psychopath­e », estime Miguel Pereira, l’ancien patron de la société qui a rassemblé la caution pour le sortir de prison après le braquage de Las Vegas. Il a commencé à distribuer des stylos marqués « Sortie d’OJ » et s’occupe à présent de vendre les droits d’exploitati­on cinématogr­aphique du récit de sa relation avec Simpson. Pour Ron Shipp, ancien officier de la police de Los Angeles, autrefois ami et confident d’OJ, « la seule chose qui intéresse OJ, ce sont les billets ». Il ajoute : « Quand il a échappé à la condamnati­on pour meurtre, son avocat Johnnie Cochran lui a conseillé de ne pas accorder d’interview pendant un an, et il n’a même pas pu tenir un mois. Je pense qu’il va essayer de se faire le plus d’argent possible. Je ne sais pas comment il va le blanchir et le planquer. »

« OJ Simpson a changé, mais pas en bien, estime Pardo, qui lui a régulièrem­ent parlé pendant qu’il était en détention. Il a été élevé dans la religion baptiste. Mais quand il a commencé à lire le Coran, il a dit : “Pour la première fois de ma vie, j’ai le sentiment d’être un homme noir dans les années 1940, face à une justice entièremen­t blanche, et ils m’ont lynché”. » Quatre jours après sa libération, OJ était photograph­ié en train de dédicacer des souvenirs, dont le profit « devrait revenir à Goldman », estime David Cook. « Un mec m’a proposé 2 000 dollars [1 700 euros] pour voir OJ et lui faire signer un casque », témoigne Bruce Fromong. « Vous avez encore des objets qui lui appartienn­ent ? », lui ai-je demandé. « No comment », a- t-il répondu. « Là, maintenant, il cherche à se faire de nouveaux amis parce qu’il a des besoins, ajoute Pardo. Vous êtes son pote tant que vous lui êtes utile. Dès que vous ne lui servez plus, il va dire : “Je sais même pas qui est ce mec.” C’est ce qui m’est arrivé, à moi et à bien d’autres. » Les offres se bousculent. « Tout le monde parle de reality show, affirme Malcolm LaVergne. On est assaillis de coups de fil de gens qui disent : “On a une offre de contrat à 50 millions de dollars pour Simpson” ou “Nous sommes une agence et nous avons une propositio­n financière à faire à Simpson”. Il les ignore toutes. C’est un retraité tranquille qui profite de sa vie. Il se contente de respirer. Il apprend à souffler après avoir été en prison pendant près de dix ans. »

Pardo affirme qu’il a une offre émanant d’un individu prêt à payer entièremen­t les indemnités de plusieurs millions dues aux familles Goldman et Brown et à remettre OJ au boulot. Et Scotto se vante d’avoir négocié la première interview de Simpson à sa sortie de prison pour plus d’un million. « Quand OJ sera disposé à parler, on signera un accord pour le faire », assure-t-il. Le 8 novembre 2017, Simpson a été interdit de séjour à l’hôtel Cosmopolit­an après avoir été expulsé de son bar vers minuit. Il aurait été jugé « saoul et... gênant », d’après le site people TMZ – ce que son avocat nie faroucheme­nt. « L’histoire est totalement bidon », affirme OJ Simpson. Est-il capable de rester sobre pendant les cinq ans de sa libération conditionn­elle ? Mark Fuhrman, l’officier de la police de Los Angeles qui a été le premier sur les lieux du crime en 1994 et n’est pas vraiment porté à accorder à OJ le bénéfice du doute, le prédit : « Ces cinq ans vont être bien longs... » �

 ??  ??
 ??  ??
 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France