Vanity Fair (France)

En incarnant un même personnage à trois âges différents dans la nouvelle saison de l’acteur de renouvelle de l’intérieur un monde aux codes bien définis.

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quoi aurait bien pu ressembler la troisième saison de True Detective, qui approche de sa résolution, si son personnage principal avait été blanc ? La question peut sembler brutale, mais elle est tout sauf aberrante. Wayne Hays, le héros de l’anthologie (chaque saison présente une histoire indépendan­te de la précédente) créée par Nic Pizzolatto n’était pas, à l’origine, afro-américain. C’est Mahershala Ali qui a convaincu le showrunner fasciné par les névroses affectant le mâle occidental caucasien de revoir ses plans. La couleur de la peau est ainsi devenue l’enjeu central d’une intrigue déployée sur quatre décennies. Dans l’État de l’Arkansas, perméable comme la Louisiane de la première saison aux sortilèges du « Southern Gothic », Hays subit le racisme ordinaire de ses concitoyen­s. Ses pistes sont dédaignées par ses supérieurs et quand il interroge des témoins, c’est à son partenaire blanc ( Stephen Dorff, un peu perdu de vue depuis Somewhere de Sofia Coppola) qu’on répond. La question raciale semble ouvrir une brèche dans l’univers dur à cuire de Pizzolatto : Hays n’est pas seulement un détective bousillé dans un monde corrompu comme Matthew McConaughe­y en son temps, il est un homme noir dans un monde blanc. Ali s’engouffre dans la faille qu’il a révélée avec cette virtuosité à peine tape-à-l’oeil qu’on lui connaît depuis qu’il a campé un dealer bienveilla­nt dans Moonlight de Berry Jenkins. Le film lui a valu l’oscar du meilleur second rôle en 2016. Cet hiver, il y a ajouté un golden globe pour Green Book de Peter Farrelly, où il sillonne les routes hostiles du sud avec Viggo Mortensen, entérinant ainsi son statut de nouvelle idole hollywoodi­enne. —

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