Vanity Fair (France)

RÊVES DE JEUNE FILLE

La Française OKlou sort sa première mixtape, Galore. Où l’électro prend la couleur des songes.

- Texte Pascaline Potdevin

C’ est comme une comète qui brille au loin et dont on attend, à chaque fois, les rares passages impatiemme­nt : OKlou nous tourne autour depuis un moment. Son électro vaporeuse s’est dévoilée en 2015 dans un premier EP, Avril, dont la pochette, un faon échoué au fond d’une piscine, est longtemps restée imprimée en nous. Bêtes graciles et menaces qui planent, chair tendre et béton armé : autant de vents contraires qui soufflaien­t sur l’un de ses concerts parisiens, deux ans plus tard. La Française de 27 ans y déployait ses premiers titres (dont une unique chanson en français, le beau Toyota, sortie cette année en duo avec Flavien Berger) devant un écran où passaient en boucle des images de Bambi fuyant un incendie. C’est ce même alliage de candeur et de noirceur qu’on a ensuite retrouvé sur l’EP The Rite of May, et enfin aujourd’hui sur Galore, premier album estampillé « mixtape », mais bien plus abouti et cohérent que la plupart des disques que l’on entend ces derniers temps.

OKlou a pensé cet album comme une histoire, un récit nourri de tout ce qui l’habite et se métamorpho­se en elle depuis des années. Née en Poitou-Charentes, Marylou Mayniel a été formée au conservato­ire, entre violoncell­e et piano. Des réminiscen­ces classiques que l’on retrouve dans la vélocité gracieuse des synthés de Fall, Unearth Me ou d’un Rosebud presque baroque : « Notre point commun, avec Casey MQ [co-producteur de l’album], c’est que nous sommes pianistes. Nos recherches et improvisat­ions sur clavier nous ont donné envie d’aller vers une écriture instrument­ale riche. Sont venues ensuite les mélodies de voix, qui n’avaient presque qu’un rôle d’accompagne­ment. »

OKlou a trouvé sa voie entre la délicatess­e d’une Caroline Polachek et la liberté folle d’une Rosalia – « des femmes qui incarnent une forme d’émancipati­on et de création qui [l’ont] beaucoup inspirée » – mais aussi avec le RnB diffracté des DJ Détente et Sega Bodega – « des génies des logiciels », un art qu’elle maîtrise aussi de son côté – et surtout, dans « beaucoup, beaucoup de rêves ». Des songes de jeune fille aux larmes scintillan­tes mêlées d’eau lourde, qui compte ses victoires et ses blessures entre deux dessins animés.

Galore se clôt sur I Didn’t Give Up on You dans un concert de grillons et quelques notes de guitare acoustique. Comme pour enfin s’incarner et atterrir en douceur dans la dernière soirée d’un été qui se meurt.

Galore d’OKlou (Because).

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