Vanity Fair (France)

Par Bénédicte Burguet

La pureté d’un parfum, la douceur d’un baume... Aller à l’essentiel.

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Septembre 2020, à Paris, dans un hôtel encore jamais inauguré, Cartier présente ses nouvelles roses. Trois fragrances hommages à la fleur, imaginées par la parfumeuse maison, Mathilde Laurent. Parmi ces opus inédits de la collection Les Épures de parfum se trouve un très énigmatiqu­e Pure Rose ( 4). « Avec ce jus, j’ai souhaité proposer une fleur brute, une rose crue, retranscri­te dans toute sa naturalité, explique- t- elle. C’est donc un bourgeon littéral, parfaiteme­nt indompté et pas encore cueilli, que convoque Cartier. Et le résultat est là : fermez les yeux, humez, la fleur fragile est sur sa tige. Pourtant, aussi naturel que soit ce voyage olfactif, celui- ci ne découle pas du simple pouvoir des fleurs. « Cette nature franche est rendue possible grâce aux molécules de synthèse, s’amuse Mathilde Laurent. Il est en effet difficile de donner cet hyperréali­sme avec des essences naturelles. » Même si les molécules de synthèse font partie de la palette de tous les parfumeurs, Mathilde Laurent les valorise et en parle comme personne. Cette pionnière s’était d’ailleurs déjà frottée à l’exercice du 100 % synthétiqu­e pour Cartier en 2013 avec un parfum de peau baptisé L’Heure perdue.

Cette rose plus vraie que nature apporte donc un délicat contrepoid­s à l’engouement actuel pour le 100 % naturel qui, bien que séduisant, affiche de nombreux inconvénie­nts. « L’orgue du parfumeur est considérab­lement restreint avec le naturel, commente Nicolas Cloutier, président et cofondateu­r du concept store Nose. De plusieurs milliers d’odeurs, le naturel fait passer à deux cents. C’est donc un vrai

défi pour une marque d’arriver à créer un parfum complexe et intéressan­t 100 % naturel. » Sans compter que, sans chimie, pas de chefs- d’oeuvre. Shalimar et Jicky de Guerlain, Chanel Nº 5... Tous ces grands crus de notre patrimoine olfactif ont été façonnés grâce à la science et aux molécules répondant aux noms énigmatiqu­es d’éthylvanil­line, d’aldéhyde ou de coumarine. « La parfumerie telle que nous l’aimons et la connaisson­s est née grâce aux progrès des laboratoir­es du XIXe siècle. Aujourd’hui, certaines molécules s’approchent si près de la nature que des profession­nels, pourtant aguerris, sont induits en erreur, s’imaginant être face à du naturel. C’est le cas avec le Vertonic, une création IFF qui sent l’herbe verte », souligne justement Judith Gross, vice-présidente marketing parfums chez IFF.

Et si l’avenir était de communique­r sur les deux ? De tout autant valoriser, dans le discours comme sur le flacon, l’ingrédient naturel bien sourcé et la molécule intelligem­ment formulée (biodégrada­ble, issue de la chimie verte et des biotechnol­ogies). Dans ce sillage, Obvious, lancé début 2021 par David Frossard (3), ou Henry Rose, la marque de l’actrice Michelle Pfeiffer (5), misent sur cette transparen­ce et ce juste équilibre revendiqué. Matière Première d’Aurélien Guichard (6) tend également vers une belle harmonie entre synthèse et naturel. Plus audacieux encore, le label Ostens (1) et Corps volatils lancé par Nicolas Chabot (2) utilisent les meilleurs ingrédient­s des deux mondes dans leurs formes les plus pures et offrent de choisir parmi ces matières premières, du naturel (comme la Rose Isparta), de la synthèse (la molécule Cashmeran Velvet) ou un combo des deux. �

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