Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Signé Roselyne
Lundi
C’est un indéniable succès qu’a enregistré François Fillon avec la manifestation organisée au Trocadéro, succès d’autant plus remarquable si l’on veut bien considérer le trouble de l’électorat de droite, les conditions atmosphériques et une organisation montée en quelques heures. Le meeting a renvoyé madame Hidalgo au ridicule puisqu’elle avait demandé l’annulation du rassemblement au motif de risques de débordements. On eût aimé le même principe de précaution lors des happenings de Nuit debout ou des défilés contre la loi El Khomri. Pour autant, si l’assistance fournie par le noyau dur des convaincus ne préjuge en rien d’une qualification pour le second tour, elle a eu le mérite pour Fillon d’amener à résipiscence ses adversaires, très nombreux dans son propre camp. Nicolas Sarkozy est le grand perdant de l’histoire, montrant au grand jour qu’il n’exerce plus aucun imperium dirimant à droite, et ses troupes ont tourné casaque en ralliant avec armes et bagages le camp du Sarthois. Alain Juppé, avec un ton sépulcral et une lucidité corrodante, a reconnu qu’il était trop vieux, trop plombé par les affaires et trop rejeté par l’électorat de droite pour constituer une alternative crédible. Même les centristes de l’UDI, après quelques déclarations tonitruantes d’indépendance, sont piteusement rentrés dans le rang, investitures aux législatives obligent. Tout cela n’est pas vraiment glorieux mais la monture de la droite pour la course présidentielle, même sérieusement amochée, tient bon, faisant preuve d’une résilience que n’avaient détectée ni les politiques pour qui la confraternité est une haine vigilante, ni les commentateurs pour qui l’analyse doit être un jeu de massacre.
Mercredi
C’est ma fête ! Cette journée dédiée aux droits des femmes en irrite plus d’un, plus d’une, certains arguant qu’une seule journée, c’est vraiment se moquer du monde, d’autres rappelant les indéniables progrès enregistrés. Le mars est pourtant l’occasion chaque année non pas de pleurnicher, mais de redire les chiffres révoltants des inégalités qui perdurent. Un exemple parmi tant d’autres est celui des chefs d’orchestre: sur chefs répertoriés en France, femmes seulement et aucune à la tête de grandes formations. Pour exercer, elles doivent créer leur structure, comme Zahia Ziouani avec Divertimento ou
Emmanuelle Haïm avec le Concert d’Astrée. Vous penserez peut-être que ce sont des revendications de femmes privilégiées et que leur vie n’a rien à voir avec la galère de celles qui forment les gros bataillons de la précarité et de la pauvreté. Certes, mais étudier les discriminations dont elles sont l’objet est éclairant. Entendre les directeurs de maison de musique confine parfois à la caricature: les femmes feraient fuir le public, seraient incapables de se faire obéir des instrumentistes et trop fragiles pour un métier réputé viril ! Toutes les rengaines que l’on nous sert sournoisement pour nous éliminer des postes de commandement sont à l’oeuvre. Mais c’est aussi dans la tête des femmes que tout se passe. Après plusieurs siècles d’injustice, beaucoup ont intériorisé une prétendue infériorité et pensent que ces fonctions ne sont pas pour elles. C’est ainsi que les femmes sont quasiment absentes des classes de direction dans les conservatoires. Comme le disait si bien madame de Staël : «On nous a ôté le collier du servage mais nous en avons encore la marque autour
du cou.» Seules des politiques volontaristes pourront établir l’égalité réelle, et pour l’instant, nos candidats à l’élection présidentielle se sont contentés de quelques déclarations égalitaires de bon aloi mais sans portée opérationnelle.
Jeudi
Je serais à la place d’Emmanuel Macron, je commencerais à me faire du souci en constatant que nombre de vieux chevaux de retour de la politique française tentent de sauter dans la brouette qu’il pousse jusqu’à l’Élysée. Robert Hue, Bertrand Delanoë, Patrick Braouezec, François Bayrou, Daniel Cohn-Bendit, c’est vraiment le wagon de la France en marche arrière. Il est urgent pour notre sémillante « Gueule d’ange » de mettre les ringards au placard, sinon son principal argument, celui de la jeunesse et du renouvellement, apparaîtra comme inopérant. Être le moniteur d’un car d’excursion pour pensionnaires d’une maison de retraite ne vous acquiert même pas les voix des personnes âgées… Heureusement pour lui, sa poussée dans les sondages fait commettre des sottises odieuses à ses adversaires. Le parti Les Républicains le représente en une caricature clairement antisémite maintenant retirée du site, et Vincent Peillon, soutien de Benoît Hamon, fait un parallèle entre « En marche ! » et les chambres à gaz! Comment va-t-on tenir encore six semaines dans un tel cloaque ?
« Après plusieurs siècles d’injustice, beaucoup de femmes ont intériorisé une prétendue infériorité. »
Vendredi
Hier soir, Benoît Hamon était l’invité de L’Émission politique sur France . Il n’est pas mal, le « petit Benoit », comme le dénomment avec commisération ceux qu’on n’ose appeler ses amis. Son problème est simple et insoluble : il « ne fait pas président ». Pourtant, il dit des choses intéressantes, il est même le seul candidat à émettre quelques idées nouvelles qui devraient enflammer le débat. Mais l’utopie ne fait pas vendre, sauf à être portée par un tribun charismatique. Là où il faudrait un Nelson Mandela ou un Martin Luther King pour porter le rêve, le parti socialiste n’a trouvé qu’un animateur besogneux et tristounet.
Samedi
Les protagonistes du quadrille présidentiel sont sur la piste. Pour l’instant, sept candidats ont leurs parrainages et Jean-Luc Mélenchon devrait jouer dans la phalange malgré quelques difficultés à rassembler les précieux formulaires avant la date butoir du mars à heures. On voit mal qui pourrait rejoindre cet octuor nonobstant une surprise toujours possible, la qualification de monsieur Asselineau en portant témoignage. Le constat est clair : candidats au premier tour en , en et en . Le choc du avril avec l’élimination de Lionel Jospin, la perspective d’un contrôle pointilleux des engagements financiers à mettre en oeuvre et les nouveaux modes de validation des parrainages ont fait leur oeuvre de clarification et en ans, le nombre des candidats a été divisé par deux. Je ne sais si la démocratie y a gagné, mais l’empreinte écologique de la campagne, certainement!