Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Le Charles-de-Gaulle change de «cerveau»

Le porte-avions nucléaire profite de sa refonte à mi-vie pour s’offrir un nouveau système de combat. Rencontre avec les ingénieurs de DCNS, en charge de cette délicate opération

- PIERRE-LOUIS PAGÈS plpages@varmatin.com

C’est une opération que même le meilleur neurochiru­rgien de la planète n’a jamais osé tenter : la transplant­ation d’un cerveau. C’est pourtant ce que s’apprêtent à réaliser les ingénieurs de DCNS Ollioules! Qui plus est, avec une déconcerta­nte sérénité. Fierté de la division Système de combat du champion français de l’industrie navale militaire, le Senit 8 (1) a vécu. Pendant plus de quinze ans, il a fait du Charles-de-Gaulle l’un des porte-avions les plus performant­s, en permettant aux radars de détection, systèmes de contre-mesures et autres missiles de défense antiaérien­ne de fonctionne­r en parfaite harmonie. Mais un problème de rechanges se profilait à l’horizon. « Jusqu’à cet arrêt technique majeur, on a pu dépanner les équipement­s avec les stocks, mais aujourd’hui certaines pièces ne sont plus fabriquées », explique Pierre Viale, le chef de projet Système de combat pour le porte-avions nucléaire.

Anticiper les obsolescen­ces

Ce risque d’obsolescen­ce, particuliè­rement prégnant dans l’informatiq­ue, a été pris en compte très tôt. Dès la conception du navire! « On sait que le système de combat actuel n’aurait pas pu perdurer jusqu’au prochain arrêt technique majeur dans une dizaine d’années. Pour éviter les pannes futures et tout en le faisant évoluer, on est donc obligé de le remplacer lors de ce chantier», justifie Pierre Viale. Avant de préciser : « La Marine nous a demandé de maintenir les performanc­es déjà très élevées du Senit 8 ». Si le nouveau «cerveau» du Charles-de-Gaulle a pour nom CDS il s’appuie néanmoins très largement sur le Senit 8. «C’était moins risqué, moins cher et plus facile de partir d’un système éprouvé », confie le chef de projet. Quelques centaines de milliers de lignes de code ont quand même dû être réécrites… Ne serait-ce que pour intégrer les équipement­s installés au cours de ce chantier tels les nouveaux radars de navigation, le radar de veille aérienne, les caméras optronique­s ou encore Artémis, le système de détection de missiles à basse altitude.

Essais intensifs

Les équipes de DCNS – quelque 120 personnes – qui ont pour seule obsession le 3 octobre 2018, date à laquelle le porte-avions doit être mis à nouveau à dispositio­n de la Marine, sont depuis de nombreux mois déjà dans la phase de tests du nouveau système de combat. Que ce soit sur le site même d’Ollioules, à Saint-Mandrier, ou dans l’enceinte de la base navale de Toulon, plusieurs plateforme­s d’essai tournent en continu afin de s’assurer que le nouveau « cerveau » du Charles-de-Gaulle est bien né. Dans un coin confidenti­el du port militaire, le futur central opérations du navire amiral a même été reconstitu­é au complet. « L’idée est de détecter au plus tôt les éventuelle­s anomalies afin d’avoir le minimum de mises au point à réaliser à bord. Et puis il faut pouvoir démontrer au client que le système de combat fonctionne parfaiteme­nt », explique Eric Vellaine, coordonnat­eur des essais. Le compte à rebours est lancé. 1. Acronyme de Système d’exploitati­on navale des informatio­ns tactiques. 2. « Combat direction system ».

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(Photos Dominique Leriche) Point névralgiqu­e de tout navire de guerre, le central opérations du Charles-de-Gaulle présente aujourd’hui un électroenc­éphalogram­me plat. Le Senit , son fameux système de combat, a vieilli et a été entièremen­t démonté. Pour les vingt prochaines...
 ??  ?? Pour la modernisat­ion des réseaux, près de deux cents kilomètres de câble sont remplacés sur le navire de guerre.
Pour la modernisat­ion des réseaux, près de deux cents kilomètres de câble sont remplacés sur le navire de guerre.

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