Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Jardim - Emery : les intellos du foot

L’un présente le philosophe Edgar Morin comme une de ses grandes influences, l’autre passe pour un fou de tactique et de management. Portraits

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Jardim, jamais sans ballon

Leonardo Jardim, 42 ans, n’a jamais été joueur profession­nel. Il a préféré se lancer dans des études d’éducation physique à Madère. Très vite, le Portugais a passé ses diplômes d’entraîneur afin de « passer de l’autre côté » à l’âge de 22 ans, sans qu’il n’y soit contraint par une quelconque blessure. Progressiv­ement, il a franchi les paliers : entraîneur adjoint en troisième division, entraîneur principal dans ce même club de Camacha, etc... Il a alors une vision transversa­le et globale de son sport. Il échange beaucoup avec d’autres entraîneur­s de sports collectifs, notamment de volley. Il a gardé cette approche, et aujourd’hui encore, il s’en sert.

Pragmatiqu­e, comme Deschamps

D’ailleurs, son leitmotiv est le suivant : « Je suis entraîneur de football, pas d’athlétisme ». Il met donc un point d’honneur à faire en sorte que tout travail, même physique, se réalise avec un ballon aux pieds. « Il y a deux raisons à cela, expliquet-il. La première, c’est que les joueurs ont l’impression de moins travailler au niveau de l’endurance et de la puissance. Or ce n’est pas le cas. La deuxième, c’est qu’ils sont toujours en conditions réelles et qu’ils améliorent constammen­t leur relation au ballon et leur technique individuel­le. » Jardim est surtout un pragmatiqu­e. En cela, il se différenci­e de Pep Guardiola l’entraîneur de Manchester City, qu’il vient d’éliminer en Ligue des champions. Il se rapproche plutôt de Didier Deschamps, le sélectionn­eur français, avec lequel il entretient les meilleures relations. A Monaco, il a souvent fait évoluer son schéma tactique et il s’adapte aux joueurs qu’il a à dispositio­n. Catalogué intellectu­el du football en raison de son passé universita­ire, il aime en jouer. Ainsi durant cette trêve internatio­nale, il a rencontré le sociologue français Edgar Morin (95 ans), dont il admire les écrits. « Sa relation à la complexité du monde m’a aidé à comprendre que je devais m’adapter, pour éviter les chocs culturels », explique aujourd’hui Jardim.

Emery, le danger de partout

Le Basque Unai Emery, 45 ans, vient pour sa part d’une famille de footballeu­rs : son père et son grandpère étaient gardiens profession­nels. Lui-même a réalisé une modeste carrière de milieu gauche, en 2e et 3e divisions espagnoles. C’est dans le dernier club où il joue, à Lorca, qu’il se lance comme entraîneur. Il arrive à hisser le club en 2e division pour la première fois de son histoire, et frôle même le passage dans l’élite la saison suivante... En Espagne, il accumule les succès avec Almeria (2006-2008), Valence (2008-2012) et surtout le FC Séville (2013-2016), triple vainqueur de l’Europa League. En revanche son exil en Russie, au Spartak Moscou, en 2012, est un échec. Il est limogé au mois de novembre pour mauvais résultats. La patte Emery, c’est « le dépassemen­t de fonction », explique Romain Molina, auteur de la biographie ‘‘Unai Emery, El Maestro’’. « Il veut que les attaquants défendent, que les défenseurs attaquent et que le danger vienne de partout. Il demande beaucoup aux latéraux ».

Co-auteur d’un livre sur la mentalité de gagnant

Le Basque est un passionné de tactique et de management. Il a d’ailleurs coécrit un ouvrage ‘‘Mentalidad Ganadora’’ (Mentalité de gagnant). Seul problème, son PSG a perdu l’imperdable en 8e de finale de Ligue des champions, s’écroulant à Barcelone 6-1, alors qu’il avait gagné 4-0 à l’aller. « C’est son plus gros échec. Le sommeil, il ne doit pas être facile à trouver, reconnaît Romain Molina. Mais de là à le faire passer pour un débile, avec le palmarès qu’il a... » A-t-il suffisamme­nt compris qu’il changeait de statut en rejoignant le PSG et ses ambitions affichées de remporter la LDC ? « Il arrive dans un grand club avec des grands joueurs qui savent ce qu’ils doivent faire, et son management doit être différent d’avant », considère Jocelyn Angloma, ancien latéral du PSG.

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