Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Sébastien Martinez, le superman de la mémoire
Diplômé de l’École des Mines d’Alès, ce trentenaire seynois a mis de côté ses connaissances énergétiques pour enseigner au plus grand nombre ses méthodes de mémorisation
Longtemps, Sébastien Martinez a éprouvé une réelle aversion pour le « par coeur ». Ce qui ne l’a pas empêché de suivre une brillante scolarité. Mettant à profit d’évidentes facilités pour les sciences, il a même obtenu son bac S avec la mention « Bien ». Avant de sortir de l’École des Mines d’Alès, un diplôme d’ingénieur en poche. Mais ça, c’était avant… Plus d’un de ses anciens professeurs serait sans doute surpris d’apprendre que Sébastien Martinez vit aujourd’hui de la mémoire. Depuis 2012, le jeune homme – 30 ans, mais une allure de premier communiant – est formateur en mémorisation. Et autant dire qu’en cette période, à l’approche des examens de fin d’année, il ne chôme pas. De Nice à Marseille, profitant des vacances scolaires, il multiplie les stages auprès des 14-25 ans. Du simple lycéen en classe de terminale à l’étudiant qui prépare les concours aux grandes écoles, en passant par le «carabin », ils sont de plus en plus nombreux à vouloir acquérir les procédés mnémotechniques mis au point par Sébastien Martinez. Ce petit truc qui fera peut-être la différence. Il faut dire que le natif de La Seynesur-Mer a des références. En 2015, il est ainsi sacré champion de France de la mémoire. Titre qu’il a abandonné le 11 mars dernier. « J’ai amélioré mon score de 25 % par rapport au précédent championnat. Je suis donc en progression, même si je n’ai fini que sur la deuxième marche du podium. C’est l’illustration parfaite que tout est question d’entraînement. J’ai été battu par quelqu’un qui s’est préparé quatre heures par jour pendant des semaines, alors que moi, je me suis davantage consacré à la formation et à développer mon activité professionnelle », explique-t-il, sans paraître affecté par ce que d’autres compétiteurs auraient vite fait de considérer comme une contre-performance. Pas le genre de la maison. L’homme adore apparemment l’adversité. Ça le motive, l’amuse encore
plus. Son analyse de la première compétition à laquelle il a participé le prouve. «C’était en 2014 à Londres. J’ai pris une grosse claque. Face à des néophytes, j’avais l’impression d’être bon. Mais confronté à des athlètes de la mémoire, je me suis rendu compte que j’étais loin d’avoir le niveau. Ça m’a remis la tête sur les épaules », raconte-t-il avec la froideur d’un scientifique. Avant d’ajouter: « Je suis revenu de Londres plus boosté qu’abattu ». Un état d’esprit qu’il a gardé de ses années de basket. « Pour progresser, il faut toujours se confronter à meilleur que soi ».
Faciliter l’apprentissage du plus grand nombre
Athlète de la mémoire. L’expression est lâchée. Tout ne serait donc qu’une question d’entraînement. Et de technique. Sébastien Martinez l’affirme : «Nous sommes tous des génies, encore faut-il connaître les bonnes stratégies et s’entraîner ». L’intéressé en a été persuadé assez vite après avoir mis en application des premiers exercices de mémorisation. « Après la lecture d’un livre du psychologue anglais Tony Buzan, j’ai réussi à mémoriser sans faute une liste de 20 mots, alors que sans aucune technique je n’en retenais que cinq ». Dès lors, il dévore tous les livres sur le sujet qui lui tombent sous la main, les synthétise, y ajoute une pincée d’organisation acquise en école d’ingénieur, jusqu’à élaborer sa propre méthode où la dimension ludique est primordiale. Sorti en mai 2016, son livre Une mémoire infaillible. Briller en société sans sortir son smartphone cartonne. Vingt mille exemplaires ont déjà été écoulés. « C’est énorme!», lâche le superman de la mémoire varois. Ce succès de librairie ne fait pas pour autant de Sébastien Martinez un millionnaire. Loin s’en faut. « Je me verse un Smic mensuel », confie-t-il, sans jouer les Cosette. On est bien loin du salaire auquel il pourrait prétendre avec son diplôme d’ingénieur. Reste donc la question fondamentale: si ce n’est pas l’appât du gain, quelle est sa motivation ? On a quelques difficultés en effet à comprendre pourquoi Sébastien Martinez, aux convictions écologistes assumées, a tourné le dos au secteur photovoltaïque dans lequel il a travaillé pendant deux ans. « D’abord pour vivre avec ma compagne, elle aussi ingénieur. On en avait assez d’habiter à deux ou trois heures l’un de l’autre ». Ce qui n’empêche pas notre « superman de la mémoire» de vouloir donner du sens à son existence. «J’ai envie d’apporter ma pierre au système éducatif français. D’ici une dizaine d’années, je rêve que l’emploi du temps de nos écoliers s’enrichisse d’une nouvelle matière à part entière: apprendre à apprendre ».
Nous sommes tous des génies ”