 : la visite mouvementée du président Faure à Toulon

Selon plusieurs témoignages, Henri Dupuy de Lôme aurait conseillé Jules Verne pour imaginer son sous-marin le Nautilus de 20 000 lieues sous les mers. Il l’aurait reçu à Sainte-Anne d’Evenos dans le Var, où sa fille a acquis en 1903 le vignoble qui porte aujourd’hui le nom de domaine Dupuy de Lôme. En matière de construction navale, Henri Dupuy de Lôme était un génie. Il créa à Toulon le premier navire de ligne à hélice, le Napoléon, lancé en 1850, le premier cuirassé le Gloire, mis à l’eau en 1852, le premier sous-marin Gymnote, lancé en 1888 après sa mort. Henri Dupuy de Lôme, né à Ploemeur dans le Morbihan, est le fils d’un capitaine de frégate et petit-fils, par sa mère, d’un armateur de la Compagnie des Indes. La mer était dans ses gènes. Après ses études à Polytechnique, il nommé en 1839 sous- ingénieur à l’arsenal de Toulon. C’est dans cette ville qu’il épouse Claire, avec laquelle il aura trois enfants. Mais ses enfants les plus célèbres demeurent ses bateaux. Et d’abord le premier grand navire à vapeur et à hélice au monde. Le prince de Joinville, commandant de l’escadre nationale de Toulon, lui donna son accord pour réaliser son projet. Construit au début de l’année 1848, le navire est d’abord baptisé, en guise de reconnaissance, Prince de Joinville. Quelques semaines après, l’Histoire ayant bousculé l’ordre des choses, il devient Vingt-Quatre février – afin de commémorer la date d’abdication du roi Louis-Philippe et l’instauration de la Deuxième république, le 24 février 1848. Il est ensuite appelé le Président au retour d’exil de Louis-Napoléon Bonaparte. C’est sous ce nom qu’il est mis à l’eau le 15 mai 1850. Il devient ensuite le Napoléon et transportera le 26 septembre 1852 le princeprésident Louis-Napoléon de Marseille à Toulon. Il atteindra à cette occasion les 13,86 noeuds – record de vitesse pour l’époque.

Il conçoit le premier sous-marin torpilleur

Ce succès valut à Dupuy de Lôme d’être nommé ingénieur de première classe et officier de la Légion d’honneur. En 1855, il sera médaillé d’honneur de l’Exposition universelle de Paris. Mais Dupuy de Lôme ne va pas en rester là. Il a en tête de faire évoluer l’histoire navale et la faire passer de la marine en bois à la marine en fer. Il souhaite fabriquer un premier cuirassé. Napoléon III, séduit par le projet, lui donne seul son accord, sans consulter les instances officielles de la Marine. Ce premier cuirassé s’appellera le Gloire .Misen chantier en mai 1858 sur les cales du Mourillon, il sera armé vingt-trois mois plus tard. Aux essais, en 1860, il atteint 13,5 noeuds, soit une vitesse comparable à celle des paquebots. C’est un succès. Il va faire des petits. Le ministre de la Marine Hamelin passe commande de trois cuirassés sur son modèle : l’Invincible à Toulon, le Normandie à Cherbourg, le Couronne à Lorient. L’élection d’Henri Dupuy de Lôme à l’Académie des sciences en 1866, à l’âge de 50 ans, ne met pas fin à sa carrière. Au contraire. Il devient directeur des Forges et chantiers de la Méditerranée de La Seyne. Seize années de prospérité vont s’ouvrir pour ces chantiers, un phare de la construction navale. Durant la guerre de 1870, le gouvernement lui confie la mise au point d’un dirigeable à hélice mû par huit hommes. Le dernier coup de génie de Dupuy de Lôme à Toulon: le premier sous-marin torpilleur, le Gymnote. Il en conçoit le principe et les plans mais n’eut pas la joie de le voir à l’eau, en 1888. Il mourut en 1885. Un des grands ingénieurs de la Marine disparaissait. Ses obsèques furent suivies à Toulon par plus de 2000 personnes. Il aura travaillé toute sa vie, regrettant dans ce poème de ne s’être point laissé aller à la paresse : « Paresse des humains, douce et puissante reine/ Heureux ceux qui, soumis à ta paisible loi/ Laissent couler leurs jours sans se donner la peine/ De se révolter contre toi ! »

(Photos DR) Henry Dupuy de Lôme 6 a construit le premier navire à hélice au monde, le Napoléon 5 5 6