Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Le ciment armé, invention signée Joseph Lambot

Brignoles Figure incontourn­able du paysage brignolais, Joseph Lambot traverse les siècles grâce à son invention du ciment armé. Portrait d’un homme à l’imaginatio­n sans limites

- VICTOR TILLET

Il demeure aujourd’hui encore une des personnali­tés les plus célèbres de l’histoire de Brignoles et Montfort-sur-Argens, où il vît le jour le 22 mai 1814, au sein d’une grande famille qui était propriétai­re du domaine de Miraval. Après des études d’ingénieur qui l’ont mené de Brignoles à Paris, il s’installe à Miraval et se consacre à l’agricultur­e et ses travaux.

Un matériau révolution­naire

En pleine révolution industriel­le, Joseph Lambot laisse libre cours à sa créativité, en commençant par intervenir sur ce qu’il y a autour de lui : « Au domaine de Miraval, il y avait des cultures, et notamment des orangers. Les orangers étaient transporté­s dans des caisses en bois. Joseph Lambot eut l’idée de remplacer ces caisses en bois par des objets plus solides », raconte Michel Dutto, président de l’associatio­n pour la sauvegarde du patrimoine brignolais. L’inventeur utilise d’abord une combinaiso­n de fil de fer et de ciment en 1845 pour renforcer l’armature des caisses. Il poursuit ses expériment­ations sur d’autres objets, et met au point une invention qu’il baptise le « ferciment ».

Deux barques pour tester le ferciment

Dans le brevet qu’il dépose, Lambot précise que ce matériau est destiné « à remplacer le bois en constructi­on navale et partout ailleurs où il est confronté à l’humidité ». Pour tester son invention, il réalise deux barques. « Sur un petit lac à l’entrée de Miraval, il décide d’essayer une barque », explique Michel Dutto. Le brevet du ciment armé est finalement déposé en 1855 à Marseille. L’une des deux barques est présentée à l’exposition universell­e de Paris la même année, mais ne rencontre pas un grand succès. Son invention fait toutefois sensation auprès du préfet maritime de Toulon, qui lui commande une bouée adaptée à son invention. Après cela, on ne trouve plus de travaux dans cette continuité. Joseph Lambot meurt en 1887 à Brignoles. Son invention a toutefois bouleversé le bâtiment, puisque le ciment armé est à l’origine de l’invention du béton armé.

Quand les barques refont parler d’elles

En 1953, les deux ouvrages pointent de nouveau le bout de leur coque. Laissées à l’abandon dans l’étang de Miraval, elles sont sauvées des eaux. Le prototype original a pris place au musée du Pays brignolais. La seconde a une histoire beaucoup plus originale : « L’autre barque a été offerte à Jacques Chaban-Delmas en 1955 lorsque celui-ci était ministre des Travaux publics, pour le musée du Bâtiment et travaux publics à Paris. Elle a été transporté­e par un Brignolais, Edmond Delacour. Le fourgon était si petit qu’il a fallu en découper un morceau pour faire tenir l’embarcatio­n », se souvient Michel Dutto. Et, détail insolite, le ministre en personne a navigué sur la barque : « Le jour de la présentati­on de l’ouvrage, Chaban-Delmas est monté dans la barque et a vogué 200 mètres sur la Seine ». Aujourd’hui, l’embarcatio­n se trouve au portmusée de Douarnenez, Un beau clin d’oeil de l’Histoire à Joseph Lambot, dont l’idée première était de révolution­ner la constructi­on navale.

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(Photo doc Romain Rojas et V.Ti.) Le prototype original de la barque en ferciment est exposé au musée du Pays brignolais. Dessous, un portrait de Joseph Lambot peint le mois dernier par Katerina Shepard.

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