Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Alien : Covenant Ridley Scott réveille la bête

- PHILIPPE DUPUY

Quel genre d’esprit faut-il avoir pour inventer un monstre comme Alien ? Je dois avoir l’esprit tordu, je vous le concède. Mais l’effet produit par Alien a largement dépassé mes espérances dès le début. Je me souviens d’une projection­test du premier film, dont j’étais sorti un moment parce que je trouvais le temps long. Quand j’y suis revenu, c’était la scène des oeufs. J’étais sur le côté de l’écran et je voyais les gens, dans la salle, éclairés par l’écran. Un gars a crié «Ne regarde pas là-dedans!» et, bien sûr, quand la créature a surgi de l’oeuf, les spectateur­s ont eu un mouvement de recul. Au premier rang, une femme est carrément tombée du fauteuil et son compagnon la retenait par le bras comme si elle allait se noyer. Je me suis dit, « Ça va trop loin là ! ». Pourtant, le film a eu le succès que l’on sait. Les gens sont pervers ! (Rires). Qu’est-ce qui vous fait peur ? Arriver sur un plateau ou  personnes vous attendent pour se mettre au boulot, ça, c’est assez effrayant. Sinon, je suis plutôt immunisé contre les phobies communes. Ça ne m’empêche pas de penser que si on découvre des mondes habités dans l’espace, on n’aura pas intérêt à faire les malins car les extraterre­stres sont sans doute beaucoup plus intelligen­ts et avancés que nous. Et on ne sait pas, non plus, ce qui se cache dans les gouffres marins inexplorés. On sait que des créatures vivent sur les bords de cratères volcanique­s sous marins, où la températur­e est infernale. Qui sait de quoi elles seraient capables si on les remontait à la surface… Le futur apparaît à la fois terrible et merveilleu­x. Songez qu’on sera peut-être immortels en . Difficile de dire si c’est une perspectiv­e heureuse ou effrayante... Alien a beaucoup évolué depuis le premier film. Dans celui-là, il a presque forme humaine… J’ai toujours à coeur de ne pas lasser le public. Il connaît bien le monstre désormais. Il faut donc lui offrir de nouvelles formes si on veut continuer à capter son attention et que la vision de la créature ait toujours un fort impact sur son esprit.

Quelles étaient vos motivation­s artistique­s en réactivant la saga Alien à ce stade de votre carrière ? Je trouvais qu’il y avait plein de questions qui restaient en suspens à la fin du premier film, auxquelles les films suivants n’avaient pas répondus. D’où venait ce vaisseau ? Qui était le pilote ? À quoi devait servir sa cargaison d’oeufs ? Si je devais relancer la saga, il faudrait répondre à ces questions. C’est ce que j’ai essayé de faire avec Prometheus et Alien : Covenant. Si on parle de moi et de mon inspiratio­n comme auteur de films, je dirais que suis comme les requins : je dois rester en mouvement, sinon je meurs.

Que signifie ce titre : Covenant ? Dans le film, c’est le nom du vaisseau dans lequel ont embarqué   pionniers, partis coloniser une planète dans l'espace. Il y a, évidemment, un sous-texte religieux. On peut, bien sûr, se demander si la volonté de l’Homme d’explorer l’espace n’est pas une manière pour lui d’aller jouer sur le terrain de Dieu ? Mais je suis, quant à moi, agnostique. J’ai tendance à considérer que la religion est la plus grosse farce qui a été faite à l’humanité.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France