Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Handicap : une manette de l’espoir conçue dans l’agglo
Théo Jordan, tétraplégique, et David Combardieu, son beau-père, ont mutualisé leurs forces afin de redonner au premier la possibilité de jouer aux jeux vidéo. Pari tenu et commercialisation future
Il y a six ans, Théo Jordan, inconditionnel du jeu-vidéo, fait un terrible plongeon dans une piscine et devient tétraplégique. Alors adolescent, il perd -presque-toute mobilité, mais peut encore bouger ses bras et poignets. Pendant cinq ans, il doit se contenter de regarder sa Playstation sans pouvoir y toucher. Une situation qui exaspère son beau-père, David Combardieu, qui fouille Internet à la recherche d’une innovation qui permette à Théo de renouer avec cette passion. «On n’a rien trouvé, à notre grand étonnement. Rien de commercialisé en tout cas. Juste un Youtubeur américain, Ben Hecks, qui a créé des prototypes pour jouer à une main, et un ingénieur de Sony qui a bricolé une manette et l’a adapté à la paralysie cérébrale d’un handicapé. »
« Battre des valides ? C’est jouissif ! »
David n’en reste pas là. « Il y a deux ans, j’ai commencé à bricoler un premier exemplaire en prenant en compte toutes les recommandations de Théo», élucide cet ingénieur électronique et informatique de métier. Après plusieurs tentatives et une centaine d’heures de travail, le Saint-Cyrien arrive à un produit fini. Et Théo peut jouer de façon optimale et autonome. « Je passe désormais pas mal de temps devant la console. Le plus jouissif, c’est d’arriver à battre des valides », confesse-t-il, non sans une pointe de fierté. «C’est là qu’on s’est dit qu’il y avait un truc à faire, à commercialiser », ajoute l’étudiant en information et communication. « On a senti un engouement du cercle proche. On nous a dit qu’il fallait essayer de le développer. Alors on a lancé une cagnotte et détaillé le projet sur une plateforme de financement participatif », poursuit le beaupère.
euros récoltés en un mois
En un mois, les deux compères ont atteint l’objectif qu’ils s’étaient fixé et ont récolté 4600 euros. «Ca va nous permettre de réaliser deux prototypes pour PS4, de fabriquer une première présérie pour PS4 et d’élaborer un prototype Xbox. » Ils aimeraient aller encore plus haut, plus loin dans l’aventure. «On a pensé à créer un business plan, on a déjà un petit carnet d’adresses, des gens qui nous contactent dans l’espoir qu’on fasse quelque chose pour eux », poursuit David, les yeux écarquillés. « On va aller à la rencontre des associations, se rendre dans les salons. On veut des retours sur les points forts et les points faibles du produit, le faire connaître», affirment-ils en choeur. «Et réaliser un boîtier plus design », chambre Théo en s’adressant à son beau-père.
« Un potentiel démentiel »
Et pourquoi pas interpeller Sony ou Microsoft afin qu’ils les aident à démocratiser le projet ? « J’ai croisé des centaines de jeunes dans mon cas en centre de rééducation, et c’est pareil partout dans le monde. Il y a un potentiel démentiel et une engouement énorme pour les jeux vidéo », confie le jeune homme. « Si on arrive à lancer des séries, les coûts ne seront pas exorbitants », complète David. « Le matériel pour les handicapés est hors de prix, il faut changer ça ! » Leur prototype coûte une petite centaine d’euros. « Je peux jouer à n’importe quel jeu, ça me détend. C’est un loisir que je n’avais pas », témoigne Théo, à qui cette invention a changé l’existence.