Stroll, un apprenti sous pression

C’est le nouveau benjamin du paddock. Propulsé titulaire chez Williams cet hiver en lieu et place de Felipe Massa – finalement devenu son coéquipier après le transfert de Valtteri Bottas –, Lance Stroll, 18 ans, devance aujourd’hui Max Verstappen, 19 ans, sur la grille des jeunes loups de la F1. Sur l’échelle des valeurs, en revanche, il suffit de jeter un coup d’oeil aux chronos et classements des cinq premières étapes pour mesurer le grand écart séparant le ‘‘rookie’’ canadien de la pépite néerlandaise de Red Bull. Attendu au tournant par les détracteurs qui pointent du doigt la fortune familiale lui ayant permis de gravir les échelons à toute vitesse, le fils du milliardaire Lawrence Stroll – l’un des actionnaires de l’écurie de Grove – n’a pas fait grand-chose d’emblée pour leur clouer le bec. Après avoir dominé de la tête et des épaules le championnat d’Europe FIA F3 l’an dernier (14 victoires !), le voilà englué dans les abysses de la hiérarchie avec des statistiques faméliques : trois abandons, zéro point. Pas vraiment l’idéal pour partir hier matin à la découverte du vertigineux toboggan monégasque...

Villeneuve : « Deux échéances difficiles »

« Que ce soit parmi sa famille et ses proches, ou en général, il y a beaucoup d’attention autour de Lance et c’est dur à gérer pour lui », avait plaidé Paddy Lowe, le directeur technique de Williams, au lendemain d’un GP d’Espagne raté dans les grandes largeurs (16e). « Les pilotes sont les meilleurs et les pires pour se faire violence s’ils ne sont pas satisfaits de leurs performances. Cela engendre forcément encore plus de pression. Hélas, il n’y a pas de solution miracle. Lance a tout en main pour apprendre vite. À lui de savoir en profiter. » Croisé sur le quai Antoine-Ier entre les deux séances d’essais libres, Jacques Villeneuve, lui, ne mâche pas ses mots quand on lui demande de juger les premiers pas de son compatriote au top niveau. « Sûr que je n’aimerais pas être à sa place », lâche le champion du monde 1997, désormais consultant sur les chaînes du groupe Canal +. « Inutile de tourner autour du pot : Lance n’a pas encore démontré qu’il mérite son volant. Certains disent qu’il est jeune et qu’il lui faut du temps, mais on n’est pas en F1 pour faire ses classes. Verstappen avait tout de suite affiché son potentiel. Là, je pense qu’il lui reste deux échéances difficiles à négocier. Monaco, ce sera chaud. Et Montréal très chaud ! Ensuite, peutêtre que le contexte s’apaisera, qu’on lui lâchera les baskets et qu’il commencera à aller vite... » Hier, l’apprenti sous pression n’est pas vraiment parvenu à redorer son blason. Second galop d’essai abrégé après avoir chiffonné la Williams numéro 18 dans les rails du virage de Massenet, il a conclu son exploration du mythique tourniquet en pâle position : 16e à une demi-seconde de la référence Massa. Peut mieux faire, comme on dit...

(Photos Jean-François Ottonello) Dur apprentissage pour Lance Stroll !