Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Sa voiture classée pièce à conviction: le casse-tête !
Nathalie Domingo est privée de son véhicule, saisi comme pièce à conviction après un échange de tirs entre la police et un braqueur présumé en 2016 à Toulon. Témoignage
Nathalie Domingo a le sentiment d’être «laissée pour compte ». Elle est la victime collatérale d’une procédure judiciaire ouverte au tribunal de grande instance (TGI) de Toulon. Sa voiture a été saisie par le 22 juillet 2016 dans le cadre d’une affaire qui ne la concerne pas. La Nissan Micra de cette Toulonnaise se trouvait au mauvais endroit, au mauvais moment. «Je ne peux même pas récupérer mes affaires restées à l’intérieur.»
Les faits
Vendredi 22 juillet 2016, vers 20 heures, des coups de feu éclatent dans une rue du quartier du Pont-du-Las à Toulon Un individu armé, suspecté d’avoir commis un braquage, est pris en étau par des policiers. La scène se déroule devant les fenêtres de l’appartement de Nathalie Domingo. « Je suis allée me planquer dans la chambre des enfants », se souvient-elle. Le suspect, blessé, est interpellé sur le trottoir, le véhicule de la Toulonnaise a été atteint par plusieurs balles. « Vers 22 h 30, il y a eu un sacré raffut, j’ai rouvert les volets et j’ai vu qu’une remorqueuse emmenait ma voiture, poursuit Nathalie Domingo, je n’ai pas eu d’explication, on m’a juste dit d’aller porter plainte.»
L’attente
La mère de famille, en congés au moment des faits, découvre dès le lendemain les locaux de la police judiciaire (PJ) de Toulon. « Je me suis retrouvée à attendre dans la même pièce que le témoin du braquage. » Un gardien de la paix enregistre sa plainte. « On m’a dit qu’il fallait que je reste disponible pour aller chercher ma voiture (entreposée dans un garage à Six-Fours, Ndlr). Je devais me tenir prête sinon je risquais d’avoir à payer des frais de garde. Alors j’ai renoncé à partir en vacances », affirme-t-elle. Et d’attendre qu’on l’appelle. En vain.
La désillusion
Le temps passe et Nathalie Domingo va devoir reprendre le travail sans sa voiture. « J’ai eu du mal à savoir comment ça allait se passer. J’ai dû aller à la pêche aux infos : au tribunal, à la PJ… » La voiture restera immobilisée jusqu’à ce qu’une reconstitution judiciaire soit organisée par la juge d’instruction chargée du dossier, apprend-elle. « Je ne sais pas si ça prendra des mois ou des années. »
L’aberration
« Allez expliquer que votre voiture a été criblée de balles… » Quand la Toulonnaise se tourne vers son assureur, le verdict est sans appel : la Nissan Micra – plus de 180 000 kilomètres au compteur – ne vaut pas le prix des réparations. « Je savais que ma voiture était en fin de vie, mais elle roulait encore super bien, je la faisais entretenir… » Elle obtient quelques centaines d’euros d’indemnisation. Mais doit continuer à régler les mensualités tant que la voiture ne part pas à la casse. « L’assurance refuse de résilier, on me dit que je dois céder le véhicule. Mais je ne peux pas en disposer ! C’est une aberration.»
Les démarches
Après dix mensualités de 46 euros pour assurer son véhicule immobilisé dans un garage, Nathalie Domingo a fini par prendre le risque de faire opposition, ce mois-ci, pour stopper les prélèvements sur son compte. Entre-temps, elle s’est également rapprochée d’une avocate rencontrée à la Maison de la justice et du droit. « En février, j’ai fait une liste des affaires que je voulais récupérer dans la voiture, mais je n’ai plus de nouvelles.» La quinquagénaire a également racheté une voiture récemment. «J’ai attendu pour mettre de côté et reporté les travaux que je voulais faire dans ma cuisine.»
L’amertume
Aujourd’hui Nathalie Domingo est amère. «On est pris dans un engrenage, il n’y a aucune considération, aucune information… Nous, les petites gens, ne sommes rien. Et encore, je ne devrais pas me plaindre puisque je n’étais pas dans la voiture [au moment de la fusillade] Mais je n’ai rien demandé à personne, je suis victime dans cette affaire… » 1. Nos éditions des 23 et 24 juillet 2016