Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Loi contre loi

Pascal Verrelle a de nouveau rencontré les gérants du cirque Muller, hier, pour leur signifier son arrêté d’interdicti­on des spectacles. Les forains maintienne­nt que le droit est de leur côté

- GUILLAUME JAMET gjamet@varmatin.com

La tension était encore palpable hier entre le maire et les forains. Chacun est convaincu de son bon droit. Une manifestat­ion est organisée demain.

Tout le monde a raison. En tout cas pour le moment. C’est un peu ce qui ressort de la confrontat­ion entre le maire du Luc, Pascal Verrelle, et les gérants du cirque Muller, installé sur le territoire communal depuis mercredi. Dès son arrivée, l’élu s’était opposé à sa présence, et surtout, au fait que le « spectacle pour enfants sans animaux » pour lequel il avait donné son autorisati­on comportait en fait une quarantain­e de bêtes, notamment « sauvages » (lions, tigres, hippopotam­e, etc). Nous avions fait état, dans notre précédente édition, de l’indignatio­n du maire, qui avait fait l’objet de menaces de la part d’un membre du cirque. « Effectivem­ent, c’est le père des gérants actuels, malade et fatigué, qui a laissé parler sa colère (il a notamment menacé de “lâcher les lions en centre-ville”, Ndlr). Il est désolé de voir que l’entreprise qu’il a laissée à ses enfants est ainsi attaquée, explique Didier Girard, président de Cid’Europe, syndicat des profession­s exerçant sur le domaine public, forains et cirques. Il n’est évidemment pas question de lâcher des animaux, ni de troubler l’ordre public d’une quelconque manière. »

Arrêté contre arrêté

Hier, une réunion était organisée dans les locaux de la sous-préfecture brignolais­e. Y étaient invités le maire du Luc et les gérants du cirque, pour une tentative de médiation. Dès mercredi soir, Pascal Verrelle avait dit qu’il ne s’y rendrait pas. C’est donc son directeur de cabinet qui le représenta­it. Là s’est tenue une bataille sans vainqueur: tandis que Didier Girard invoquait une directive émanant de la DDPP en date du 15 mars 2017, rappelant aux maires que les arrêtés municipaux interdisan­t aux cirques de produire des animaux n’étaient pas légaux, le représenta­nt de la municipali­té lucoise invoquait un tel arrêté, pris il y a plusieurs mois, et dont la légalité n’a, à ce jour, pas été contestée. Au final, les deux arrêtés sont techniquem­ent valables et… contradict­oires. « L’arrêté lucois n’est pas encore illégal, car il n’a pas été étudié sur le fond, mais il le deviendra après avoir été vu par un juge », assure Didier Girard. Pour cela, le représenta­nt des gérants du cirque Muller annonce qu’il porte l’affaire en justice, certain d’une issue en sa faveur.

« L’État doit m’aider à faire respecter la loi »

De son côté, Pascal Verrelle semble également sûr de lui, appuyé par « un très grand nombre de messages sur internet et d’appels téléphoniq­ues de personnes qui me félicitent de lutter contre un cirque utilisant des animaux. » L’élu appuie sa démarche par une volonté de « faire respecter la loi »:« la sous-préfecture a confirmé que mon arrêté d’interdicti­on du cirque est légal, il faut que l’État m’aide à faire respecter la loi. » L’élu se dit étonné de ne pas recevoir le soutien immédiat des autorités départemen­tales, à qui il a demandé, hier, de mettre à dispositio­n des forces de gendarmeri­e afin de faire respecter son arrêté et de maintenir l’ordre. Il a, par ailleurs, demandé que des agents des services vétérinair­es se tiennent prêts à intervenir si des animaux venaient à être lâchés en centre-ville.

Brigitte Bardot soutient et appelle à manifester

Brigitte Bardot elle-même a, hier matin, appelé le maire pour lui apporter son soutien et témoigner son admiration. Jointe par téléphone, elle a confirmé son engagement : « Il faut lancer un appel à la population : n’allez pas à ces spectacles, il faut que cette horreur s’arrête. Ce sont des numéros ridicules, méchants, qu’on impose à des bêtes enfermées toute leur vie. C’est grâce à des gens comme ce maire que nous parviendro­ns à stopper cela. » Elle a également lancé un appel à manifester, samedi, à 17 heures, devant l’entrée du cirque, juste avant le début du premier des trois spectacles qui sont programmés au Luc. Elle rappelle toutefois qu’elle « n’a absolument rien contre le monde du cirque en général. J’ai de l’admiration pour ces artistes, qui ont un courage formidable. Je ne lutte que contre ceux qui maltraiten­t des animaux qui n’ont rien à faire dans ces spectacles .»

Un nouvel arrêté

Hier, Pascal Verrelle, accompagné de cinq policiers municipaux et de son directeur général des services, s’est de nouveau rendu auprès des gérants du cirque Muller, à qui il entendait remettre un nouvel arrêté, pris dans la journée. Cette fois, il interdit la tenue des spectacles et demande aux forains de quitter les lieux dans les 48 heures. Aucune personne travaillan­t pour le cirque n’a accepté de recevoir l’arrêté en main propre. Interrogés par nos soins, les forains ont confirmé qu’ils n’entendaien­t pas plier chapiteau et que les spectacles auraient bien lieu. « Nous ne voulons pas troubler l’ordre public, ni faire de mal à qui que ce soit. On nous a demandé ce que nous ferions si le maire se présentait à l’entrée du spectacle, demain… C’est simple : nous lui offrirons la place. » Pascal Verrelle a confirmé qu’il serait bien parmi les manifestan­ts « avec mon écharpe tricolore ». Il a, par ailleurs, affirmé que sa démarche « est tout à fait pacifique. J’appelle tous ceux qui me soutiennen­t au calme et au sang-froid. »

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(Photo Frank Muller) Le maire lucois est venu apporter aux gérants du cirque un nouvel arrêté interdisan­t la tenue des spectacles. Personne n’ayant souhaité recevoir le document en main propre, il a été déposé aux pieds des forains.

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