Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Richard Ferrand : ouverture d’une enquête préliminaire
Coup de tonnerre hier : le parquet de Brest a finalement décidé de faire mener des investigations par la police judiciaire de Rennes sur les faits signalés ces derniers jours
La pression s’accroît sur le ministre Richard Ferrand, après l’ouverture d’une enquête préliminaire dans l’affaire immobilière impliquant ce soutien de la première heure d’Emmanuel Macron, mais Matignon ne voit « aucune raison » qu’il démissionne à ce stade malgré des demandes à droite et à gauche. « Après analyse des éléments complémentaires susceptibles de mettre en cause M. Richard Ferrand […] révélés par différents organes de presse », le procureur de la République de Brest, Eric Mathais, a saisi, hier, « la direction interrégionale de la police judiciaire de Rennes d’une enquête préliminaire ». Mais « aussi longtemps qu’il n’y a pas de mise en examen, il n’y a aucune raison de demander à M. Ferrand de quitter le gouvernement », a ensuite réaffirmé le Premier ministre Edouard Philippe (issu de LR), en déplacement en Seine-et-Marne, lui réaffirmant sa « confiance ». « Je ne ferai pas de commentaires » a, pour sa part, déclaré le président de la République, en Bretagne. Emmanuel Macron avait appelé, mercredi, le gouvernement à la « solidarité », tout en estimant que la presse ne devait « pas devenir juge ». Le ministre de la Justice, François Bayrou (MoDem), qui présentait, hier, son emblématique projet de loi pour la « confiance dans notre vie démocratique » [lire en page précédente], a été assailli par la presse de questions sur M. Ferrand. Il s’est refusé à tout commentaire direct, s’abritant derrière le Code de procédure pénale qui proscrit toute instruction « dans des affaires individuelles ». Porte-parole du gouvernement, Christophe Castaner a, lui, qualifié cette enquête de « bonne nouvelle parce qu’elle va permettre de sortir du débat moral » et confirme que « la justice est libre et indépendante ». Selon le procureur de Brest, elle « aura pour but de recueillir tout élément permettant une analyse complète des faits et de rechercher si ceux-ci sont susceptibles ou non de constituer une infraction pénale en matière de manquements au devoir de probité et aux règles spécifiques du code de la mutualité ». Selon Le Canard enchaîné, les Mutuelles de Bretagne, dont Richard Ferrand était alors le directeur général, avaient souhaité en 2011 louer des locaux commerciaux à Brest pour ouvrir un centre de soins. L’entreprise avait choisi, entre trois propositions, celle d’une société immobilière appartenant à la compagne du ministre. Le procureur de Brest avait estimé le 26 mai que les faits ne constituaient pas une infraction et ne permettaient pas d’ouvrir une enquête. Depuis, de nouvelles révélations sont intervenues dans plusieurs médias et le parti LR a fait une nouvelle démarche auprès du parquet. L’association anticorruption Anticor a également adressé, mercredi, au parquet de Brest une plainte contre X, sur le fondement du délit d’abus de confiance [lire ci-dessous]
Une affaire Fillon bis ?
S’étonnant du « silence troublant du président de la République », le secrétaire général de LR Bernard Accoyer a estimé que le ministre devrait être «mis en retrait du gouvernement ». « On ne va pas à chaque fois demander à quelqu’un de démissionner », a estimé à l’inverse, Thierry Solère (LR), tout en considérant que le ministre pourrait partir s’ «il gêne le gouvernement ». La présidente du FN, Marine Le Pen, a critiqué la gestion de l’affaire par l’exécutif, dénonçant un «enrichissement personnel », qui « ressemble fichtrement à l’affaire Fillon ». Razzy Hammadi, porte-parole du PS, a plaidé pour le « retrait » de M. Ferrand, jugeant la position du gouvernement « intenable » voire « toxique » ,etla comparant à l’affaire Cahuzac.