Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Goulard et Ferrand quittent le gouvernement
Il ne devait être que “technique” mais l’annonce coup sur coup du départ de deux poids lourds du gouvernement menacés par des enquêtes promet un remaniement d’une tout autre ampleur
La ministre des Armées qui visitait encore lundi sans rien laisser paraître le Salon du Bourget au côté du chef de l’Etat, a pris tout le monde de court en annonçant par voie de communiqué sa décision de ne « plus faire partie du gouvernement ». « Dans l’hypothèse où l’enquête préliminaire visant le MoDem conduirait à vérifier les conditions d’emploi de mes assistants au Parlement européen, je souhaite être en mesure de démontrer librement ma bonne foi », a expliqué la ministre démissionnaire.
Lepage entendue comme témoin
Le parquet de Paris avait ouvert le 9 juin une enquête pour « abus de confiance et recel » visant à déterminer si le parti du Garde des sceaux François Bayrou avait employé des collaborateurs aux frais du Parlement européen où ils auraient occupé des emplois fictifs d’attachés parlementaires. L’ex-ministre Corinne Lepage était entendue comme témoin ce mardi dans cette enquête. Les enquêteurs s’interrogent sur les conditions d’emplois de salariés du MoDem à Paris ayant cumulé leur fonction avec celle d’assistants de députés au Parlement européen, notamment lors de la législature 2009-2014. En 2014, Corinne Lepage, en rupture avec le MoDem, affirmait dans un livre que le parti avait « exigé » d’elle qu’un de ses assistants parlementaires européens travaille au siège parisien, ce qu’elle avait refusé. « Le président a accepté la démission de Sylvie Goulard et lui a indiqué qu’il respectait son choix », a déclaré laconiquement l’Elysée, précisant que Sylvie Goulard avait « échangé (...) ces derniers jours » à ce propos avec Emmanuel Macron et Edouard Philippe.
Le gouvernement formé demain
« Elle a volontairement demandé à ne pas être reconduite ». « Elle s’est appliquée des critères d’exigence qui peuvent surprendre en France mais qui sont standards dans d’autres pays européens », a expliqué une source proche de la ministre. L’Elysée avait fait savoir lundi soir, dans la foulée de l’annonce d’un premier départ, celui du ministre de la Cohésion des territoires Richard Ferrand, que la nouvelle équipe gouvernementale serait formée mercredi, avant 18 heures. Après avoir présenté au chef de l’Etat lundi sa démission et celle de son gouvernement, conformément à la tradition républicaine au lendemain d’élections législatives, Edouard Philippe avait pour sa part été immédiatement reconduit dans ses fonctions. Richard Ferrand, confortablement réélu dimanche dans sa circonscription du Finistère en dépit de l’enquête préliminaire dont il fait l’objet dans une affaire immobilière, doit rejoindre l’Assemblée nationale pour y prendre les rênes du groupe La République en marche, à la demande du chef de l’Etat. La démission de Sylvie Goulard pourrait-elle cependant faire tache d’huile ?
De Sarnez en réflexion
Outre François Bayrou, Marielle de Sarnez, ministre des Affaires européennes, est également susceptible de devoir rendre un jour ou l’autre des comptes à la justice dans l’affaire du MoDem. Elle n’écarte pas l’idée de quitter le gouvernement et pourrait briguer la présidence du groupe MoDem à l’Assemblée, selon des sources Modem. « La position de M. Bayrou et de M Sarnez ne sont pas exactement les mêmes dans la mesure où M. Bayrou est garde des Sceaux et porte la loi de confiance et de moralisation de la vie politique, ce qui pose quand même un problème », a pour sa part jugé Corinne Lepage sur RTL. « François Bayrou a vocation à rester au gouvernement » , il n’y a « aucun » problème, avait assuré Edouard Philippe, hier matin sur RMC et BFMTV. Contacté, le ministre de la Justice a lui-même dit « respecter » la « décision personnelle » de Mme Goulard. Il n’a pas souhaité faire davantage de commentaires sur cette démission ni sur le sort des autres ministres MoDem, notamment le sien. Le Premier ministre a lui laissé filtrer quelques bribes d’informations sur la composition de son deuxième gouvernement, avant l’annonce de Mme Goulard. Il n’est « pas impossible » qu’il prenne de nouveaux membres venus des rangs des Républicains (LR), a-t-il déclaré. « Le même dispositif que lors de la nomination du précédent gouvernement est mis en place » pour vérifier la situation fiscale et patrimoniale des nouveaux entrants, a-t-on expliqué côté Elysée.