Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

D. Dalmasso

- P.-L. P.

dû demander une dérogation pour pouvoir exercer. Et puis je suis descendu le long de la côte pour arriver finalement à La Londe », explique-t-il. Mais à aucun moment cet ancien officier de sapeurs pompiers n’a le sentiment d’avoir mis sa vie en danger pour sauver celle des autres. « J’ai clairement connu des situations à risques, mais je ne suis pas là pour mettre ma vie en danger. En tant que patron de la SNS 710, le premier de mes devoirs est de ramener mon équipage vivant au port », assure Hervé Duchemin. Et d’ajouter, comme pour mieux convaincre : « Un gars qui tombe dans les chutes du Niagara, je ne vais pas sauter pour tenter de le sauver ». Cet « antihéros » a pourtant sauvé bien d’autres vies. Même s’il répugne à utiliser cette expression. Lorsqu’on lui demande lequel l’a le plus marqué, il n’hésite pas longtemps. «Ça remonte à 25-30 ans. J’étais patron à Saint-Cast-leGuildo, en Bretagne. On a été appelé pour porter secours à un catamaran d’une quinzaine de mètres. Il appartenai­t à une famille allemande ayant tout vendu pour venir vivre dans le sud. La forte houle nous empêchait de voir loin. Malgré le Cross Jobourg qui nous disait d’abandonner les recherches, on a insisté. On n’a rien lâché. Et puis au lever du jour, on a aperçu une tâche rouge. On a mis le cap dessus, c’était le radeau de survie. La famille, un couple et deux enfants, était à l’intérieur. Je me souviendra­i toujours de leurs regards quand ils ont ouvert le toit du radeau ». Un peu plus à l’ouest, David Dalmasso, patron du canot tous temps SNS 078 du port d’Hyères, a la même modestie. La même pudeur. « Ce que je fais à la SNSM, ça y reste». Mécanicien automobile de métier, l’homme n’est visiblemen­t pas du genre à fanfaronne­r une fois rentré au port. L’humilité des gens de mer, assurément. Plaisancie­r depuis tout petit, David Dalmasso a très vite voulu donner un peu de son temps libre pour rendre service. Et à 46 ans, il affiche déjà 19 ans de sauvetage ! Avec quelques grosses interventi­ons. Mais lui aussi, il faut le « harceler » pour qu’il accepte de raconter des bribes de ses interventi­ons. A-t-il déjà eu peur ? «Oui, mais je ne pars pas non plus en mer avec la peur au ventre. Sinon, il vaudrait mieux que j’arrête », lâche-t-il. Des 60 interventi­ons que lui et la vingtaine de bénévoles opérationn­els de la station d’Hyères réalisent en moyenne chaque année, David Dalmasso en a gardé deux en mémoire. Les deux sauvetages ont eu une issue heureuse. « Ilya 7 ans environ, on est intervenu de nuit au Petit Langoustie­r, à l’extrême ouest de Porqueroll­es. Une vedette de 13 mètres s’était échouée avec 2 couples et quatre enfants à son bord. On les a sortis avec l’annexe de notre canot tous temps. L’interventi­on pour secourir deux couples et leurs quatre enfants était rendue difficile par une mer d’ouest bien formée», raconte sans emphase le sauveteur hyérois. Puis il enchaîne, comme gagné à nouveau par une poussée d’adrénaline à l’évocation de ces sauvetages passés : « L’an dernier, le 1er mai, on a été appelé pour porter assistance à deux voiliers à une quinzaine de milles dans le sud du Levant. Deux jeunes s’étaient lancé un défi. En plus de la SNS 078, le canot tous temps de Saint-Tropez et un hélicoptèr­e Dauphin de service public ont participé au sauvetage. Quand on a retrouvé les deux voiliers, leurs occupants, épuisés, s’étaient cloîtrés ». Outre la rade d’Hyères, Hervé Duchemin et David Dalmasso ont en commun la reconnaiss­ance des personnes qu’ils ont secourues. « Notre seule récompense ».

Je ne prends pas la mer avec la peur au ventre ” Notre seule récompense : la reconnaiss­ance”

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