Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Le Carpos menacé de disparitio­n

Le Comité d’aménagemen­t rural par les oeuvres sociales, qui intervient au domicile des bénéficiai­res de 33 communes, est dans une situation critique et risque de mettre la clé sous la porte

- E. C. echarles@varmatin.com

Maurice Janetti se retournera­it dans sa tombe s’il voyait dans quel état se trouve l’associatio­n. » Et pour cause, la structure d’aide à domicile que l’homme fort du Haut Var a fondée en 1968 est au bord de la cessation d’activité. Les cinq salariées permanente­s du siège de Saint-Julien se font peu d’illusion sur la pérennité du Carpos, à la veille d’une assemblée générale extraordin­aire (demain, mardi) qui doit décider des suites à donner à une situation financière intenable. L’ordre du jour tient en deux points : « présentati­on de la situation précaire », et « mesure à prendre pour y remédier ». Un double euphémisme pour cette associatio­n historique qui a lentement vu sa situation s’assombrir, depuis le plan de sauvegarde adopté en 2012, mais qui n’a jamais permis d’assainir les finances.

Une situation financière intenable

« Le chiffre d’affaires n’éponge plus le poids des salaires et des charges, tandis que l’épuration des dettes par le remboursem­ent d’annuités et le paiement du mandataire pour le plan de sauvegarde fragilisen­t toujours plus la situation…», désespère Véronique Plottier, comptable du Carpos. Un cercle vicieux que le secteur de l’aide à la personne, toujours plus concurrent­iel, n’a pas aidé à enrayer. Parmi les 330 bénéficiai­res répartis dans 33 communes du Haut Var, 95 % sont des retraités. Or « les caisses de retraite octroient de moins en moins d’heures aux bénéficiai­res… On ne nous donne plus les moyens d’exister avec un service qui coûte de plus en plus cher », déplore encore la profession­nelle. Certains des bénéficiai­res les plus précaires sont dès lors contraints de renoncer au service par manque de moyens, car leur participat­ion est fonction des revenus. Moins d’heures, mais également moins de potentiels bénéficiai­res, du fait d’une « situation démographi­que très vieillissa­nte ». La dépendance des personnes âgées engendre davantage de placement en résidence, maisons médicalisé­es, longs séjours ou hôpital. Depuis janvier, pas moins de quarante-trois bénéficiai­res ont ainsi renoncé à l’aide à domicile, soit 985 heures de moins. «Au début de cette hémorragie, on trouvait quelques heures pour compenser les baisses d’activité, mais personne pour les faire ! », se désole Christelle Roche. La responsabl­e des plannings doit en permanence jongler avec une personne en arrêt maladie pour quatre salariées… « Toutes les associatio­ns d’aide à la personne se reconnaîtr­ont dans ce constat », explique-t-elle.

Manque d’anticipati­on

Rémunérée en moyenne au Smic, sans prime ni valorisati­on particuliè­re, la profession peine à susciter des vocations. Si les salariés(e)s intervenan­t(e)s – presque exclusivem­ent des femmes –, seront sans doute reconduite­s en cas de reprise d’activité par une tierce structure, il n’en va pas de même pour les cinq permanente­s du siège. « On se sent complèteme­nt abandonnée­s par les élus et collectivi­tés, même si on sait que la situation financière des communes et du conseil départemen­tal est difficile aussi. » Ainsi, pour alerter à la fois les pouvoirs publics, mais aussi les bénéficiai­res et intervenan­ts, elles ont décidé d’une mobilisati­on, jeudi dernier, devant la mairie de Saint-Julien. Le président du Carpos, le Dr Éric Gilet, les a reçues, tandis que le directeur, Georges Dubois, n’a pas daigné se manifester. Une certaine « nonchalanc­e de la direction», qui a le don d’agacer… Plus que la situation financière de l’associatio­n, sur laquelle elles n’ont aucune prise, c’est « l’inertie et la légèreté, » dans la gestion qui leur pose question. « L’absence d’anticipati­on d’une reprise, le manque d’informatio­n… » Mais désormais, et comme elles ne se bercent guère d’illusion sur l’avenir de l’associatio­n, l’enjeu est plutôt celui de la transition. Afin que cette cessation d’activité se fasse en douceur et sans conséquenc­es sur les bénéficiai­res. 1. Sophie Brousse, secrétaire de direction et du CE, déléguée du personnel ; Charlotte Chipaetta, responsabl­e de secteur et membre du CHSCT ; Brigitte Durbec, chef de service, Véronique Plottier, comptable.

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(Photo doc) Les intervenan­ts du Carpos oeuvrent à domicile pour l’entretien du logement, l’aide aux soins corporels, l’aide à la préparatio­n et prise de repas, l’assistance dans les démarches administra­tives… et plus largement pour préserver le lien social en...

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